Pas facile de trouver une illustration de première page quand aucun grand dossier ne se détache vraiment du numéro. Mais le choix de cette photo du Saint Sépulcre prise entre 1898 et 1914 nous permet de soulever plusieurs sujets.
En premier lieu, le sujet de l’article du père Eugenio Alliata ofm sur les linteaux du Saint Sépulcre. Cette photo offre une illustration en grand de leur existence au-dessus des portes d’entrée de l’édifice jusqu’en 1929, pour plus de détails il faudra lire l’article.
En second lieu, le cliché, pris un Samedi Saint orthodoxe, nous montre la foi des chrétiens arabes. Car si la fête du feu nouveau est de nos jours devenue la fête d’orthodoxes étrangers au pays (pour l’essentiel arrivant par charters entiers des pays de l’Est, de Chypre et de Grèce), elle a été, avant les pèlerinages de masse et jusqu’à la fermeture des frontières environnantes, durant des siècles la fête de la chrétienté arabe proche orientale. Sous l’Empire ottoman et jusqu’en 1967, Jérusalem a vécu une sorte d’espace Schengen avant l’heure, les biens et les personnes circulaient assez librement pour que l’on monte de tous les pays arabes vers Jérusalem : d’Irak, d’Egypte, de Syrie, de Jordanie, du Liban, de Turquie. Un temps dont les plus anciens se souviennent encore et qu’ils vivent avec une nostalgie grandissante à mesure que les « raisons de sécurité » leur compliquent, à eux qui habitent la Vieille Ville de Jérusalem, de plus en plus l’accès au Saint Sépulcre le Samedi saint !
Ce cliché, comme tous les clichés anciens que nous empruntons gracieusement à la Bibliothèque du Congrès américain de Washington (merci à elle), ont l’âge de la revue ou environ. Ils ont été pris entre 1860 pour les premiers et 1940 plus ou moins.
Ils nous restituent une Terre Sainte, qui s’appelait tout entière Palestine, pleine de vie et de dynamisme, riche de traditions et en pleine évolution.
Non seulement Jérusalem (entre autres) était vivante et bien vivante, mais elle était encore plus belle. Ce n’était déjà certes plus depuis longtemps la Jérusalem biblique, mais deux détails sont frappants.
Le premier c’est que la ville n’était pas embarrassée de fils électriques dans tous les sens, auxquels sont venus s’ajouter les réservoirs d’eau en zinc ou en plastique sur les toits et, dernier fléau, après les antennes hertziennes : les paraboles des satellites ! Mais ce qui fait par-dessus tout sa beauté c’est que dans cette Palestine-là, juifs, chrétiens et musulmans faisaient bon ménage. Bien sûr certains clichés restituent les tensions occasionnelles ou naissantes, comme les drapeaux noirs aux balcons de maisons palestiniennes à l’entrée de Lord Balfour dans la ville en 1925 ! ou des photos d’émeutes en 1929, mais dans l’ensemble, c’est une Jérusalem unifiée et un pays qui veut se développer sans renoncer à son art de vivre qui se donne à voir.
Depuis le numéro de janvier-février et grâce au père de Tarragon op, nous vous partageons ces trésors. Cela participe de notre joie à fêter les 90 ans de la revue.
Nous continuerons jusqu’à la fin de l’année civile et plus quand le besoin s’en ferait sentir.
Dernière mise à jour: 20/11/2023 16:52