Moses Montefiore, philanthrope juif séfarade britannique d’origine italienne, tomba amoureux de la Terre Sainte lors de ses voyages dans le pays et décida de faire profiter ses congénères de sa fortune. Ses entreprises en ce sens étaient très diversifiées, allant de l’assistance des populations suite à des catastrophes naturelles à la mise en œuvre de projets destinés à défendre les intérêts des Juifs de Palestine.
C’est ainsi qu’en 1857 il fit construire, avec l’argent d’une donation du Juif Américain Judah Touro, un moulin à farine en face de la Vieille Ville, entre la porte de Jaffa et le mont Sion (l’actuel quartier de Yémin Moshé). Cette machine fut édifiée afin de permettre aux Juifs de venir y travailler et de se procurer de la farine. À cette époque, les Palestiniens étaient à la tête de la plupart des moulins, et il s’agissait dans l’esprit de Moses Montéfiore d’assurer l’autonomie des Juifs de Palestine.
Le moulin maudit
Pour la petite histoire, les propriétaires arabes du moulin auraient demandé à un vieil homme de jeter un sort au moulin, par jalousie pour la modernité de l’ouvrage. Succès de la malédiction ou concours de circonstances ? En tout cas, les ailes du moulin demeurent figées depuis le milieu des années 1870. Concrètement, une mauvaise exposition au vent et un défaut technique expliqueraient sa courte durée d’activité. En effet, la machine a été construite sur le modèle des moulins européens, or le blé de Terre Sainte étant plus dur, il fallait donc plus de vent pour l’écraser et en faire de la farine. De plus, la Révolution industrielle accoucha des premières machines à vapeur qui rendirent obsolètes les techniques de fonctionnement du moulin.
Plus tard, en 1948, le toit du moulin fit office de poste de tir et d’observation pour l’armée israélienne. Afin de gêner cette dernière, les Britanniques auraient alors fait sauter le toit du moulin. Il fut restauré en 1998 par la Fondation de Jérusalem (voir encadré) et abrite aujourd’hui un musée consacré à la vie de Moses Montefiore.
Liat Rosner, porte-parole de la Fondation, confie qu’un projet de remise en marche du moulin est en cours afin de rendre le site touristique plus attrayant. Il est prévu que le moulin ne fonctionne qu’avec la puissance du vent. Cependant, lors des visites scolaires et de groupes un générateur pourrait prendre le relais en cas de besoin, lorsque le vent ne sera pas assez fort pour faire tourner les ailes. Dans un but pédagogique, les visiteurs pourront assister au processus de transformation du blé en farine.
Début des travaux
Les travaux devraient commencer en août ou septembre 2012 et durer trois mois. Pour le moment, les responsables du projet fabriquent en ce moment les différents éléments nécessaires à la construction du moulin. Les pièces sont usinées en Hollande et en Angleterre, le but étant de construire une réplique authentique du moulin d’origine, monté en Angleterre. Une fois les matériaux arrivés sur place, des ingénieurs israéliens s’occuperont du montage.
Il est également question de faire des travaux d’agrandissement du musée, dont la visite est pour l’instant gratuite. La question du maintien de la gratuité suite aux innovations n’a pas encore été étudiée. Affaire à suivre pour ce qui demeure un monument historique au cœur du plus ancien quartier juif hors les murs.
Yémin Moshé
Yémin Moshé, également appelé quartier de Montéfiore, est le premier quartier Juif à avoir été construit hors des murs de la Vieille Ville.
Les premières habitations de l’actuel quartier formèrent un bloc appelé avec optimisme Mishkenot Sha’ananim, les « Demeures des Bienheureux ». Pourquoi avec optimisme ?
En fait, Moses Montéfiore fit construire cette bâtisse à cet endroit pour désengorger la Vieille Ville, grouillante et quelque peu insalubre. Cependant, les nouvelles habitations n’attirèrent pas foule, justement à cause de leur situation géographique. Autrefois en effet, vivre à l’intérieur de la Vieille Ville était considéré par les Juifs comme l’endroit le plus sûr, ces derniers redoutant de se faire attaquer en dehors des murailles. Pour mettre en confiance les destinataires, le toit du bâtiment avait même été orné de créneaux pour imiter des remparts !
Après l’épidémie de choléra en 1866 qui toucha gravement la population de la Vieille Ville de Jérusalem, le moulin et ses environs connurent un succès grandissant, jusqu’à nos jours où l’on se bat pour un lopin de terre.
La Fondation de Jérusalem
La Fondation de Jérusalem, créée en 1966, est une association se définissant comme indépendante et apolitique. Elle a pour vocation de développer et promouvoir une société moderne et ouverte à Jérusalem en répondant aux besoins culturels, artistiques, éducatifs et sociaux de la ville. Ses fonds proviennent de dons de différents partenaires mondiaux, dont l’Union Européenne. Trois millions de shekels (environ 59 000 euros) furent nécessaires pour la restauration du moulin en 1998. Le budget prévu pour les innovations est à ce jour impossible à obtenir !
Dernière mise à jour: 31/12/2023 15:15