À l’occasion de la visite au Saint-Sépulcre, les guides disent comment le Patriarche Sophrone fit allégeance au Calife Omar en lui donnant les clés de la ville et obtint ainsi que le Saint Sépulcre fût épargné et la population chrétienne avec lui. Un texte d’Omar confirma cette protection
Jérusalem fut détruite et rebâtie neuf fois au cours des 30 derniers siècles. Selon la tradition juive, le nom “MoRiYaH” rappelle qu’ici se trouve le lieu où Abraham fut prêt à offrir son fils en sacrifice. Une dernière mise à l’épreuve de sa foi en Dieu en Genèse ch. 22. Il est opportun de souligner que la tradition juive propose la lecture de ce texte tous les matins, créant un lien particulier sur le sens du sacrifice et de la vie.
Moriyah est le lieu d’où Dieu transmet la tradition vivante (horah), d’où sort le vrai respect et crainte positive de Dieu (yirah) et Sa Lumière luit (orah) sur le monde entier. Jésus reprit ces éléments en enseignant dans le Temple, en appelant à la foi et il demanda à ses disciples, lors de son Ascension, de porter ce Message depuis Jérusalem jusqu’aux extrémités de la Terre (Actes 1,8-13,47).
À ce niveau, toutes sortes de peuples se sont présentés dans ce lieu “nombril du monde”.
Jérusalem est donc au coeur de l’universalité. Chacun croirait volontiers avoir une vérité “indémontrable” à situer Jérusalem au cœur de “sa” foi. Il en fut ainsi de l’Islam. Jérusalem n’est pas mentionnée dans le Coran. Pourtant la Sourate 17 (Al-Isra) affirme que le Prophète Mahomet s’éleva aux cieux depuis la Kaaba de La Mecque. L’Ange Gabriel le porta sur al-Burqa (créature grande et blanche – plus grande qu’un âne et moins épaisse qu’une mule) jusqu’ “à la plus lointaine mosquée” (considérée comme Al Aqsa). L’Islam avait ainsi créé un lien éternel avec le Mont du Temple par ce périple nocturne du Messager.
En l’an 6 de la révélation musulmane, Omar Ibn Al-Khattab qui jusque là défendait la religion traditionnelle des Quraych, affirma sa foi en Mohamet. Il l’avait persécuté pendant plusieurs années. Né à La Mecque, homme d’une prodigieuse intelligence, il vécut à Rome et en Perse. Il devint un arbitre-juge de conflits légaux respecté pour sa droiture.
Omar Ibn-Al Khattab, apprenant que sa sœur s’était convertie à l’Islam, s’apprêtait à tuer Mohamet mais alors qu’il venait de la frapper violemment, il lut le texte d’une sourate (Ta Ha) qu’elle voulait lui cacher et prononça alors l’attestation de foi (la chahada). Il devint un partisan fervent de la foi naissante qu’il porta de l’Afrique à la Perse avec force et une conviction droite, marquée par son profond sens de la justice. Il devint le deuxième calife de l’Islam.
Il rencontra le patriarche Sophronios de l’Église de Jérusalem qui représentait tous les Chrétiens de la Ville. Omar avait le projet de raser le Saint-Sépulcre et d’interdire aux Chrétiens de confesser le Christ. Avec un sens rare du doigté et d’intuition spirituels les deux hommes parvinrent à un accord signé en 636, voici donc maintenant 1376 ans.
Ce document ou “Achtiname/Pacte d’unité” détermina les relations entre le monde musulman et les Églises chrétiennes de Terre Sainte jusqu’à ce jour. Le Calife se refusa à nuire aux chrétiens de Jérusalem, préserva l’Église de la Résurrection ou Saint Sépulcre. Une mosquée fait face au centre de la foi chrétienne. Le texte est publié tous les ans, en grec et en arabe, dans les calendriers du Patriarcat Roum orthodoxe de Jérusalem (héritier de la totalité de l’Empire romain).
Les fidèles qui entrent dans les portes de Jérusalem aujourd’hui ne sont pratiquement pas au courant du fait que cet accord – souvent rompu ou “déjoué” – a sauvé le christianisme aux lieux mêmes où il est né.
Le texte précise : “Qu’ils aient pleine et entière assurance en ce qui concerne leur vie, leurs églises, leurs croyances et pour tous les lieux de pèlerinage qu’ils possèdent à ce jour à l’intérieur ou hors de la ville, à savoir la KAMAME (église de la Résurrection), l’église de Bethléem, où Jésus – que la Paix soit sur Lui – est né (soient protégées selon les paroles du Prophète). De mêmes le reste des Chrétiens qui habitent ici…”.
Cela fait donc 1376 ans que le christianisme local dépend d’un accord musulman, religieux autant que juridique. Il ne fut supprimé par aucune autorité politique ou religieuse en 1918 à la chute de l’empire ottoman.
Ce “décret” de dialogue a toujours donné aux Chrétiens locaux un sens aigu d’être les fils spirituels du Patriarche Sophronios et du croyant Omar Ibn-Al-Khattab.
L’Église a une responsabilité particulière à agir avec le discernement aigu des enjeux si délicats de la foi tels qu’ils s’expriment sur cette Terre Sainte.
Dernière mise à jour: 01/01/2024 16:30