Comme beaucoup, je me souviendrai de l’endroit où j’étais quand la nouvelle est tombée. 12h58, heure de Jérusalem. Consulat Général de France. Un SMS de la correspondante de i-télé (Merci Caroline). Les appels téléphoniques s’enchaînent. C’est l’heure de l’apéritif. Mon absence ne se fait pas trop remarquer. Mais stupéfaction et ma joie si. Oui ma joie. J’ai immédiatement ressenti le renoncement de Benoît XVI pas seulement comme inattendu, mais humble, plus encore prophétique. Prophétique justement parce que humble. Impossible durant ce déjeuner officiel de jeter un œil sur mon smart-phone… Dès que je suis de retour aux affaires, on me presse de réagir. Et me reviennent les images et les sentiments lors du voyage du Saint-Père en Terre Sainte en mai 2009. Un numéro de La Terre Sainte y fut consacré (mai-juin 2009). Contre toute attente (sic), j’avais été bouleversée par ses mots, ses gestes et sa prière. Bien sûr la convocation de l’Assemblée spéciale des évêques pour le Moyen-Orient, le travail qu’il a suscité, l’exhortation apostolique qui en est le fruit et qui continue de nous faire vivre. Et la multitude des messages, lors des rencontres officielles, des audiences du mercredi, des messages lors de l’Angélus etc. que le pape a adressés en direction du Proche-Orient pour une paix juste, la cessation des violences, traduisant sa sollicitude pour les Chrétiens qui ont la grâce de vivre dans le berceau du christianisme.
Le pape, qui a tant aimé la chrétienté du Proche-Orient se retire sur la pointe des pieds et tant pis pour le séisme médiatique. Lui, il s’en retourne à ses livres et à la prière.
Seuls les photographes du Vatican ont pu saisir cette image dans la tombe vide qui clame silencieusement la Résurrection du Christ. Quant à moi, je l’ai vu prier dans la chapelle dite de l’Apparition, devant le Saint-Sacrement. Et j’ai pleuré. Pleuré de me sentir porter, pleurer de nous sentir portés, aimés, nous chrétiens de Terre Sainte et avec nous non seulement les chrétiens du monde mais l’humanité toute entière. Pleuré, comme de soulagement de le sentir, lui, porter le poids du monde avec le Christ.
Témoin de cette prière, tous les débats, toutes les polémiques, tous les scandales ne me sont plus jamais apparus que comme des accidents de l’histoire contemporaine. Bien sûr il faut débattre dans l’Église aujourd’hui, bien sûr il faut devant les polémiques chercher à éclairer le point de vue de l’Église, bien sûr il faut demander pardon pour les scandales et prendre les mesures nécessaires pour les dénoncer et en guérir… Mais rien, ni aujourd’hui ni demain n’est en mesure de remettre en question la sainteté fondamentale de l’Église ni l’assurance du Salut qui nous est acquis en Christ. Ce pape là me l’a enseigné.
Benoît XVI n’aura pas la chance du Cardinal Martini. Ce dernier, les années où il se retira à Jérusalem, venait incognito au Saint-Sépulcre. On le voyait, chapelet à la main, devant l’autel de l’apparition de Jésus à Marie-Madeleine. Effacé, retiré, devenu vigie de prière.
Benoît XVI n’aura pas la chance du Cardinal Martini. Il ne pourra pas venir se blottir une nouvelle fois dans la tombe. Alors nous l’y porterons, à chacune de nos visites. Et là, par prière interposée nous lui demanderons : « Priez pour nous très saint Père ».
Dernière mise à jour: 30/12/2023 15:07