La veillée et le jour de prière pour la paix pour la Syrie fut un « miracle », a déclaré le Patriarche latin de Jérusalem, Mgr Fouad Twal, mais il craint que la situation dans le pays et la crise des réfugiés ne continue à s'aggraver. Dans une interview accordée à des journalistes de à Rome, samedi dernier, le patriarche d’origine jordanienne a déclaré : «Après seulement une journée de prière, nous avons changé la vision du monde ».
(Rome) – La veillée et le jour de prière pour la paix pour la Syrie fut un « miracle », a déclaré le Patriarche latin de Jérusalem, Mgr Fouad Twal, mais il craint que la situation dans le pays et la crise des réfugiés ne continue à s’aggraver.
Dans une interview accordée à des journalistes de à Rome, samedi dernier, le patriarche d’origine jordanienne a déclaré qu’il y avait un «avant» et un «après», pour cette journée de prière du 7 septembre, décrétée par le pape François pour éviter toute attaque militaire punitive pour répondre à l’attaque aux armes chimiques sur la banlieue de Damas le 21 août dernier.
« Avant ce jour, le choix était porté sur la guerre », a-t-il dit. «Après la veillée, ce choix s’est porté sur une solution diplomatique, et tout a changé. »
« Après seulement une journée de prière, nous avons changé la vision du monde, alors nous devons croire en notre force de chrétiens», a-t-il ajouté, décrivant l’événement comme un «miracle».
« Nos armées sont les fidèles qui font le bien, qui prient et croient en la paix », a-t-il dit.
La veillée de Jérusalem, qui s’est tenue à Gethsémani, a réuni les membres de toutes les confessions chrétiennes, ainsi que certains musulmans, a ajouté Mgr Fouad Twal.
Mais il craint que, bien que l’escalade ait été évitée, la situation ne soit susceptible de se détériorer encore. Le dialogue, a-t-il dit, est presque impossible, car on ne sait pas clairement qui sont les différents interlocuteurs de l’opposition, et par qui les rebelles sont approvisionnés à l’extérieur du pays. «Personne ne veut que des rebelles, extrémistes et mercenaires payés par des groupes étrangers. Personne. » dit-il. «Cela va empirer, et nous avons peur ».
Son espoir est que finalement les deux parties puissent se rencontrer à mi-chemin et trouvent une solution pour contenter chacune d’elle.
Le Patriarche latin a évoqué les centaines de milliers de réfugiés de la région qui sont contraints d’errer d’un pays à l’autre en essayant de fuir la guerre, et parfois la persécution.
Un million de personnes ont fui la Syrie cette année, certains d’entre eux-sont chrétiens, et essayent de continuer à vivre du mieux qu’ils peuvent. La guerre cause non seulement des blessures physiques, mais aussi morales, et la vie dans les camps est insoutenable, mais il a déclaré que le patriarcat est en train de faire ce qu’il peut pour fournir emplois et hospitalité.
En outre, il a évoqué les 100 000 morts au cours des deux dernières années et demie. « Aucune de ces morts ne questionne la conscience de l’Occident ? » a-t-il demandé.
Selon lui, la clé de la paix est l’éducation, et il a souligné qu’elle était la priorité du patriarcat qui gère des dizaines d’écoles en Terre Sainte, dont beaucoup sont fréquentées par des élèves de diverses confessions, chrétiens et musulmans.
En ce qui concerne le conflit israélo-palestinien, il a dit souffrir « parce que personne ne parle plus de notre situation ». Une situation qui selon lui a « empiré » : « en bref, parce que l’Occident n’est pas préoccupé par l’occupation militaire israélienne ». Il cite également des difficultés avec l’Autorité palestinienne, limitée par l’occupation et le fait que les deux côtés soient toujours en guerre. Pour cette raison, il est difficilement possible de croire en un dialogue politique », a-t-il dit. « Cela fait 66 ans que nous dialoguons ! », dit-il.
Gaza, a-t-il ajouté, est «une prison à ciel ouvert pour les 1333 chrétiens qui y vivent», et il a noté que alors que la Jordanie compte toujours « plus d’écoles, plus de familles, plus de séminaires, plus de prêtres », c’est le contraire qui se passe dans les territoires palestiniens. « Il y a plus de problèmes, moins de chrétiens, moins de prêtres et de séminaristes, il est donc important que ceux qui sont ici y restent ».
Le patriarche a souligné qu’« on ne peut jamais séparer la religion et la politique » au Moyen-Orient, et il a exprimé son espoir et sa satisfaction du fait que, ces derniers jours, le roi Abdallah II de Jordanie ait appelé tous les responsables religieux pour discuter des défis politiques.
En ce qui concerne les relations entre Israël et l’Église, il a déclaré que le dialogue était plus étroit ces derniers mois en raison de l’augmentation des actes de vandalisme sur les lieux saints. «L’année dernière, il y a eu une vingtaine d’actes de vandalisme par des extrémistes israéliens et musulmans – douze par des israéliens, et sept ou huit par des musulmans», a-t-il déclaré.
Mais il a ajouté : « Nous sommes l’Église du Calvaire, mais aussi l’Église de la Résurrection, avec l’espoir de la Pentecôte. Nous ne baisserons jamais les bras. Nous continuerons à regarder vers l’avenir ». Et il a fait observer comment l’Eglise catholique poursuit son dialogue à travers ses hôpitaux, ses organismes de bienfaisance et ses écoles.
En outre, il a déclaré que les chrétiens « ne se sentent pas seuls», et il a constaté la «solidarité mondiale avec l’Eglise locale ».
Le Patriarche latin était à Rome pour une conférence des évêques latins du monde arabe (CELRA), un groupe fondé en 1967 pour promouvoir la collégialité et la communion entre les Églises locales, et appliquer les réformes du Concile Vatican II.