En 2013, 27 femmes ont trouvé la mort dans le cadre de « crime d’honneur ». C’est plus de deux fois plus que l’année précédente. En 2010, l’assassinat de Haya Baradiya, 21 ans d'Hébron avait suscité un débat dans la société palestinienne sans faire changer ni les mentalités ni les lois. Des militantes y croient pourtant encore.
(Jérusalem/MMLV) – Le 8 mars 2014, la journée internationale de la femme a été l’occasion pour plusieurs activistes palestiniennes d’exprimer leur mécontentement et leur détresse devant le siège présidentiel de Ramallah. Leur but était de demander au Président Mahmoud Abbas d’adopter rapidement une loi pour mettre fin aux « crimes d’honneur » dans le pays.
Ces actes sont infligés aux femmes par leur mari ou leur famille, lorsqu’elles sont accusées d’avoir eu une conduite contraire à la morale. Ainsi, 27 femmes ont trouvé la mort après avoir été passées à tabac, étranglées ou pendues en 2013, soit deux fois plus qu’en 2012. Une augmentation qui ne semble pourtant pas inquiéter les autorités locales de Cisjordanie et de Gaza où résidaient les victimes. Certains activistes les jugent même trop laxistes, voir réticentes à identifier publiquement les suspects. Un environnement qui conduit les tueurs potentiels à croire qu’ils peuvent agir en toute impunité.
Le problème est que depuis la scission entre la Cisjordanie et Gaza en 2006 et malgré la pression de la rue, le Conseil législatif palestinien est paralysé et n’a donc pas voté de nouvelle loi. Les coupables de crimes d’honneur sont donc soumis au code pénal de 1936 à Gaza, et à celui de 1960 en Cisjordanie. Et malgré plusieurs décrets mis en œuvre par Mahmoud Abbas pour atténuer les excuses dans le cas d’un meurtre pour des questions d’honneur, l’article 340 des deux codes implique toujours une réduction de peine pour un homme ayant tué sa femme ou parente après avoir découvert qu’elle avait commis l’adultère.
Lors de la manifestation à Ramallah, la présidente de l’union des comités des femmes, Khitam Saafin, a déclaré : « Nous demandons l’adoption immédiate d’une loi limitant les décharges et l’atténuation des excuses pour les coupables de crimes d’honneur. Nous voulons un code pénal moderne, qui réponde aux besoins des femmes ».
Mahmoud Abbas a immédiatement demandé au cabinet présidentiel de former un comité juridique, en charge de procéder à un examen complet des articles présents dans le code pénal, relatifs à la discrimination envers les femmes. Ce comité est composé de juristes, de représentants du ministère de la justice, et de membres d’organisations de la société civile. Ils vont tous travailler à la mise en œuvre d’une loi qui conviendrait à tous les segments de la société palestinienne.
Mais ce travail va être très rude à accomplir, et certains doutent fortement de son succès, sachant que de telles initiatives ont déjà été prises dans le passé, et se sont conclues par des échecs. Le directeur d’Al-Haq, Shawan Jabarin parle d’ « absence de volonté politique ». Pour la directrice du Women’s affairs technical commitee (WATC), compte tenu de la situation économique et politique dans le pays, et de la division entre les palestiniens, l’adoption d’une nouvelle loi pourrait ne pas être suffisante pour mettre fin aux crimes d’honneur. « Un décret devrait être publié afin que les auteurs reçoivent une punition sévère. Il ne suffit pas de ratifier une loi pour exercer des pressions aux niveaux civil et populaire. Les gens doivent être conscients de la gravité de ces meurtres commis sur les femmes, et cela ne peut être fait que par l’intermédiaire de sanctions dissuasives », a-t-elle déclaré.