Alors que l’État islamique en Irak et au Levant se répand de façon fulgurante sur les territoires irakien et syrien menaçant les populations civiles musulmanes comme les minorités, le silence des grands responsables religieux de l'Islam avait de quoi déconcerter l’opinion publique. Des voix commencent désormais à s’élever pour le bien de l'humanité suite à l'appel lancé par le Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, ce mardi 12 aout.
(Jérusalem – E.R.) – Alors que l’État islamique en Irak et au Levant se répand de façon fulgurante sur les territoires irakien et syrien menaçant les populations civiles musulmanes comme les minorités, le silence des grands responsables religieux de l’Islam avait de quoi déconcerter l’opinion publique. Des voix commencent désormais à s’élever pour le bien de l’humanité suite à l’appel lancé par le Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, ce mardi 12 aout.
Abou Bakr Al-Baghdadi quand il s’est auto-proclamé « calife », le 29 juin dernier, s’affichait comme le « chef de tous les musulmans » faisant fi des structures et instances religieuses existantes. Dans plusieurs vidéos, il a réclamé l’allégeance et obéissance de tous les musulmans. « Obéissez-moi tant que vous obéissez à Dieu », a-t-il ordonné. Un des rares groupes à le dénoncer rapidement ne fut autre qu’Al-Aeda, le mouvement terroriste de Ben Laden répandu un peu partout dans le monde via ses poches de militants jihadistes. Dans un document d’une vingtaine de pages écrite par prédicateur islamiste Abou Qatada, Al-Aeda a declaré le califat « Nul et non avenu car non approuvé par les djihadistes dans d’autres parties du monde ». Les Frères Musulmans n’ont pas hésité à parler « d’hérésie ».
Outre cette rivalité entre groupes terroristes jihadistes peu de voix de l’Islam officiel s’étaient fait entendre face à cet extrémisme tyrannique et à bien des égards sous estimé. « Il serait stupide de considérer que l’ensemble des musulmans puissent se reconnaître dans les actes des bouchers de Mossoul pour autant, nous ne les voyons pas s’organiser” commentait le site français Boulvard Voltaire. Sur la radio France Inter lors d’une interview, Dalil Boubakeur, recteur de la Mosquée de Paris et président du Conseil français du culte musulman reconnaissait « la froideur (de ses pairs) par rapport au massacre des chrétiens et des yézidis« .
C’est peut-être la ferme interpellation du Pape François (communiqué traduit en plusieurs langues) en ce mardi 12 aout qui a renversé la tendance. En effet, le Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, dans un communiqué adressé au monde musulman, a demandé aux responsables religieux musulmans de prendre leurs responsabilités et d’exercer toute leur influence dans « une prise de position claire, courageuse ». Le Vatican clamait encore : « Aucune cause ne saurait justifier une telle barbarie et certainement pas une religion. Il s’agit d’une offense d’une extrême gravité envers l’humanité et envers Dieu qui en est le Créateur ».
Le même jour, des prises de positions sont arrivées d’Égypte. C’est tout d’abord le Cheikh Ahmad al-Tayeb, Grand Imam de la mosquée et de l’université Al-Azhar – elle-même fondée sous un califat (Fatimides) – qui a prit la parole. Il a appelé les irakiens à se rassembler afin de « sauver l’Irak et son peuple de l’extrémisme sous toutes ses formes et des forces extérieures qui les guettent » (Al Monitor). Il a encore ajouté : “le Califat ne peut être rétabli par la force”.
Dans la foulée est parvenue une déclaration de la plus haute autorité religieuse d’Egypte, le Grand Mufti Shawki Allam. Ce dernier y affirmait que l’État islamique en Irak et au Levant “viole tous les principes de l’islam et que groupe sanguinaire représente un danger pour les musulmans du monde entier” (agence MENA). L’organisation de la coopération islamique (OCI) qui compte 57 pays musulmans, via son secrétaire le saoudien Iyad Madini, a aussi dénoncé comme étant “un crime intolerable” les actions du Califat. Il a lui aussi redit que ces pratiques « n’ont rien à voir avec l’islam et ses principes de tolérance et de coexistence ».
Le Califat, qui dans l’esprit collectif de bien des musulmans résonne comme l’âge d’Or de leur histoire, semble avoir été volé par l’État islamique en Irak et au Levant et Radwane al-Sayyed, professeur d’études islamiques à l’Université libanaise n’en doute pas : “plus l’État islamique en Irak et au Levant va gagner en puissance, et plus ils grandiront, plus ils s’attireront d’ennemis” (Courrier International). Reste maintenant à voir qui sera suffisamment influent pour enrayer ce mouvement expansioniste qui a déjà séduit des milliers de combattants.