Une rumeur d’élections anticipées parcourt le pays depuis quelques jours. Le Premier ministre a démenti une dissolution de la Knesset, mais des élections internes au Likoud pourraient avoir lieu prochainement. Les luttes de pouvoir ont dores et déjà commencé.
(Jérusalem/n.k.) La session d’hiver du Parlement israélien s’ouvre ce mercredi 22 octobre dans un climat politique bouillonnant. Deux « dossiers » occupent particulièrement la classe politique israélienne : l’éventuel renouvellement de la Knesset (le Parlement israélien), et les élections internes au parti dominant de la coalition gouvernementale, le Likoud.
La question d’élections nationales anticipées et de dissolution de la Knesset n’est pas une question étonnante. Le système politique israélien est tel que les gouvernements sont régulièrement obligés de dissoudre le Parlement pour convoquer de nouvelles élections. C’est la conséquence directe du mode d’élection des députés : la proportionnelle intégrale à un tour, très performante en termes de représentativité de la population à la Knesset, mais très peu arrangeante pour la composition de coalitions gouvernementales. Il faut en effet s’arranger pour composer, avec les 120 députés élus, un gouvernement cohérent, sur des équilibres toujours fragiles.
Depuis la création de l’Etat hébreu en 1948, aucun gouvernement n’a été au terme de son mandat (de quatre ans, selon les lois fondamentales du pays). Il a fallu à chaque fois dissoudre la Knesset et convoquer des élections anticipées. C’est ce qui s’est passé dans les premiers mois de l’année 2013, au cours desquels Benyamin Netanyahu a été reconduit dans ses fonctions, avec l’entrée dans son gouvernement de personnalités marquées très à droite. Bien souvent, les élections anticipées répondent à un besoin politique plus qu’à une exigence démocratique.
Plusieurs rumeurs ont vu le jour depuis le début de semaine concernant de possibles élections nationales, moins d’un an après la reconduction de Benyamin Netanyahu dans ses fonctions. La date évoquée se situerait aux alentours du mois de mai. Pour l’instant, le Premier ministre n’a rien évoqué publiquement, bien au contraire. Au cours de sa « soirée d’anniversaire » (!), le chef du gouvernement a ainsi déclaré : « La dernière chose dont Israël a besoin pour le moment, ce sont des élections ». Pour le moment. Si de telles élections devaient avoir lieu, ce ne pourrait vraisemblablement être qu’après des élections internes au Likoud, le parti du Premier ministre.
A n’en pas douter, c’est bien le dossier principal qui intéresse aujourd’hui le chef du gouvernement. La question est de taille : Benyamin Netanyahu ne peut pas espérer convoquer de nouvelles élections nationales s’il n’a pas déjà fait le « ménage » au sein du Likoud et affirmé son ascendant. Le départ, en septembre, du ministre de l’Intérieur Gideon Saar, a rebattu les cartes au sein du parti de droite radicale. Jusque-là considéré comme étoile montante du Likoud et « dauphin » naturel de M. Netanyahu, M. Saar a annoncé vouloir prendre « une pause dans (sa) vie politique » en quittant le gouvernement et la Knesset. Nul ne sait s’il serait prêt à revenir dans la bataille politique pour disputer la tête du parti historique de droite. L’autre figure que Benyamin Netanyahu semble redouter est l’ancien ministre de la Communication, Moshe Khalon. Celui-ci est récemment revenu sur le devant de la scène politique, en émettant l’idée de fonder un nouveau parti politique, axé notamment sur les questions économiques et sociales (coût de la vie entre autres). La création d’un tel parti pourrait être dangereuse pour Benyamin Netanyahu, qui risquerait de voir partir un grand nombre d’électeurs du Likoud.
Les remous politiques ne s’arrêtent pas au sein du seul Likoud. Membres de la coalition gouvernementale, Tzipi Livni (ministre de la Justice, et membre du parti centriste Hatnuah) et Yaïr Lapid (président du parti de centre-gauche « Yesh Atid » « il y a un futur », fort de 19 députés à la Knesset) ont annoncé un rapprochement. Celui-ci se fera notamment pour contrer l’alliance des ultras-nationalistes. « Nous allons former un front uni au sein du gouvernement et de la Knesset sur les dossiers politico-diplomatiques. Ce sera un bloc de 25 députés en faveur d’un accord politique (avec les Palestiniens, ndlr) contre les Danonistes (Danny Danon, faucon du Likoud, ndlr) et les nationalistes ». 25 députés sur 120, de quoi constituer une force de pression importante dans une coalition gouvernementale. Il faut en effet faire entendre sa voix, dans une alliance où coexistent aussi le Likoud et le parti d’extrême droite de Naftalli Bennett « Israel Beteinou » (« Israël notre maison »).
Reste aussi la question de l’ouverture que Benyamin Netanyahu pourrait faire sur sa droite. Déjà classé comme très à droite, hostile à la solution d’une paix à deux Etats et étiqueté comme « faucon », le chef du gouvernement pourrait accueillir au sein d’une prochaine coalition quelques ministres et députés religieux (ultra-orthodoxes).
La bataille pour le pouvoir risque d’être ardue pour la droite et le centre. Mais elle reste limitée à ces seules factions politiques, la gauche israélienne n’arrivant que difficilement à se restructurer depuis la défaite historique de 1977 qui a tourné la page du socialisme israélien (symbolisé par des figures tels Ben Gourion ou Golda Meir).
Le pays est donc à la veille de changements politiques importants. Il est peu probable que la Knesset conserve la même composition jusqu’en 2017 (comme ce devrait être le cas). Ce qui est sûr, c’est que le principal parti de gouvernement, le Likoud, connaîtra une phase de primaires internes prochainement.