Dans 16 jours, les électeurs israéliens seront appelés à renouveler leur Parlement. Alors que la campagne est peu axée sur le débat d’idées, les sondages restent imprécis sur l’issue des élections. Si Netanyahu reste favori, l’alliance Herzog-Livni pourrait atteindre des scores intéressants.
(Jérusalem/n.k.) – 16jours. C’est le temps qu’il reste aux citoyens israéliens pour faire leur choix. Choix de taille puisqu’il s’agit de désigner un nouveau Parlement, d’où proviendra le futur Premier ministre d’Israël.
En décembre 2014, Benyamin Netanyahu, l’actuel chef du gouvernement, avait limogé les deux ministres « frondeurs » Tzipi Livni (Justice) et Yaïr Lapid (Finances), à la suite de nombreuses semaines de tensions. Cette mini-crise politique avait alors amené Netanyahu à convoquer de nouvelles élections, anticipées par rapport à celles qui devait se dérouler en novembre 2017. Le fait n’est pas si inhabituel en Israël, pays où le système politique, s’il assure une bonne représentation de la diversité du pays à la Knesset, reste particulièrement instable. Le mode d’élection des députés est en effet à un tour, avec une proportionnelle intégrale. Ce qui oblige le parti majoritaire à former une coalition. C’est ainsi qu’aucun gouvernement dans l’histoire d’Israël n’est parvenu au terme de ses quatre années de mandat.
La campagne électorale qui se déroule depuis décembre est pour le moins agitée. L’image donnée n’est pas très reluisante, et c’est peu dire que les problèmes des israéliens ne retiennent pas vraiment l’attention des différents candidats.
Il est maintenant connu que depuis quelques années, les Israéliens sont particulièrement préoccupés par les questions économiques et sociales. Cherté de la vie, difficultés d’accès au logement, pouvoir d’achat… une bonne partie de la population souhaite que les choses changent d’abord à ce niveau-là. Une enquête menée en décembre par le site Walla a révélé que pour les israéliens, les questions économiques et sociales étaient deux fois plus importantes que les enjeux sécuritaires ou diplomatiques.
Face à cela, que proposent les partis en présence ?
Pour le favori des sondages, le Likoud (vu d’Occident comme un parti de droite extrême, mené par Netanyahu), la campagne est menée sur les thèmes sécuritaires et diplomatiques. Netanyahu n’a pour l’instant quasiment pas abordé les questions économiques, ses interventions se focalisant sur l’Iran et les islamistes, voulant donner l’impression que « sans lui, le chaos ».
Face à lui, le tandem Tzipi Livni (centriste)-Isaac Herzog (leader travailliste) a choisi pour thème de campagne le « tout sauf Netanyahu ». L’Union sioniste considère que les neuf ans de Bibi passés à la tête du pays sont un gâchis. Difficile cependant d’en savoir plus sur un programme d’action concret.
La surprise de la campagne est peut-être la liste arabe unie, regroupant les différents partis arabes, qui pourrait faire une belle percée électorale (on estime ses gains entre 12 et 14 sièges à la Knesset). Important également, le taux de participation des arabes israéliens, qui pourrait augmenter (l’institut Stanet parle de 62% de participation arabe contre 56% en 2013).
Les sondages restent à ce jour indécis, même si une courte victoire du Likoud se dessine. Celui-ci obtiendrait entre 23 et 25 sièges, talonné de près par l’Union sioniste. L’enjeu n’est pas tant la victoire dans les urnes que la capacité à former ensuite une coalition pour composer un gouvernement. Et pour cela, le Likoud a davantage de latitude, avec les différents partis ultra-nationalistes (comme le Foyer juif de Naftali Bennet) ou religieux.
L’image que les commentateurs et journalistes israéliens retiennent pour l’instant du scrutin est la campagne de « boules puantes » organisée entre les différents protagonistes. Benyamin Netanyahu a été accusé de dilapider la fortune de l’Etat pour les frais personnels de sa maison, avec une focalisation particulière sur son épouse, Sarah Netanyahu qui aurait un gout prononcé pour le luxe. Isaac Herzog a résumé cela dans un langage fleuri : « Bibi s’empiffre avec des sushis au petit-déjeuner, aux frais de l’État. C’est digne d’une république bananière! »
De son côté le Likoud ne s’est pas privé de railler l’Union sioniste, en soulignant que Livni et Herzog avaient besoin d’être deux pour diriger le pays quand Netanyahu y arrivait très bien tout seul. Les internautes ont également pu faire la découverte des talents d’acteurs de l’actuel Premier ministre, qui s’est amusé à mimer un baby-sitter (« Bibi-sitter »), chargé de surveiller les enfants turbulents « Tzipi » et « Bugie » (le surnom d’Herzog).
Mais l’épisode le plus controversé de cette campagne demeure sans aucun doute le déplacement de Netanyahu, le 3 mars prochain, à Washington pour un discours devant le Congrès américain. L’invitation a été lancée par le président républicain de l’institution, en dépit du protocole, et contre l’avis du Président Obama. Officiellement, Netanyahu vient parler de l’Iran, et mettre en garde une nouvelle fois les Etats-Unis contre un mauvais accord. Mais il ne fait aucun doute que le déplacement est politique, moins de deux semaines avant les élections israéliennes. Israéliens et américains ne se sont pas privés de réprouver un tel geste, à commencer par Barack Obama qui n’accordera aucune entrevue au leader israélien.
Susan Rice, conseillère à la sécurité nationale, estime que le choix de Netanyahu aura un « effet destructeur sur les relations israélo-américaines ». John Kerry a quant à lui taclé ceux qui parlent de l’accord sur l’Iran « alors qu’il est pour l’instant inexistant ».
En dépit de tout cela, il demeure fort probable que Benyamin Netanyahu accède pour la quatrième fois au poste de chef du gouvernement israélien.