Actualité et archéologie du Moyen-Orient et du monde de la Bible

Deux saintes palestiniennes pour aujourd’hui

Marie-Armelle Beaulieu
19 juillet 2015
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Les Palestiniens ont fait de la canonisation de deux des leurs une victoire nationale. Est-ce bien cela, n’est-ce que cela ? L’aspect politique n’a-t-il pas pris le pas sur le message spirituel ? Et si Le message de la canonisation était une piqûre de rappel faite à l’Église de Terre Sainte sur son appel à la sainteté ?


Le 17 mai dernier, le pape François canonisait deux saintes Palestiniennes : Sr Marie Alphonsine Ghattas et Sr Marie de Jésus Crucifié, dans le monde Mariam Baouardy. La concomitance fortuite (?) avec l’annonce, trois jours avant, de la finalisation de l’accord cadre entre le Saint-Siège et l’État de Palestine a contribué à politiser l’événement.

Avant cela, le traitement médiatique n’avait pas laissé la situation politique en reste. Les Palestiniens affichaient fièrement, et dans un sentiment nationaliste non dissimulé, cette “promotion” sur les autels. Quant à nos évêques, ils rappelaient le contexte douloureux dans lequel ces canonisations s’inscrivaient. Pour une fois, on ne parlait pas des Palestiniens comme de terroristes, pour une fois, la langue arabe se révélait être aussi une langue de sainteté. Soit. Sauf que…

Sauf que l’Église catholique ne canonise pas en fonction d’un agenda politique. Le décret de canonisation, rendu public le 14 février 2015, venait parachever un long processus initié dès la première moitié du XXe. Il avait déjà permis la béatification de Sr Mariam en 1983, la même année où Sr Marie-Alphonsine était reconnue vénérable avant d’être béatifiée en 2009. C’est l’authentification de deux miracles qui a ouvert à ces filles de Terre Sainte la voie vers la canonisation.

Pour autant, la canonisation intervient pour un temps donné. C’est le sens même de la formule consacrée de canonisation prononcée par le pape : “Vous, vénérés frères (il s’adresse aux cardinaux et aux évêques) déjà par écrit vous avez manifesté personnellement votre pensée et déclaré ces bienheureuses comme exemples de vie chrétienne et de sainteté à proposer à l’Église tout entière, notamment en considération de la situation de notre temps”.

“Notamment en considération de la situation de notre temps”. L’Église ne regarde pas vers le passé lorsqu’elle canonise, elle regarde vers les besoins d’un temps présent. C’est dans ce temps que la reconnaissance de l’exemplarité des saints va donner toute sa mesure. C’est pour aujourd’hui que leurs messages se dévoilent à l’Église universelle, dont le diocèse de Jérusalem n’est alors que partie, mais pour lequel le message revêt une importance singulière puisqu’il s’inscrit dans sa propre culture.

Or, quelle est-elle la situation de notre temps, et particulièrement ici, sur la terre où sont nées ces deux saintes ? Où en est la chrétienté palestinienne aujourd’hui ?

La (re)lecture des Lineamenta pour l’Assemblée spéciale des évêques pour le Moyen Orient, écrits après consultation des chrétiens de la région et le Document de travail qui en était résulté, demeurent d’une vive actualité. Ces textes de 2009 et 2010 révélaient chez les chrétiens arabes des aspirations nouvelles. On y voyait affleurer des sentiments que la rue arabe chrétienne aujourd’hui en Palestine et Israël ne démentent pas. Ces documents donnent le pouls d’une Église assise sur un trésor mais qui pourrait bien s’essouffler.

Les raisons de cet essoufflement sont multiples. Bien sûr, le conflit tient officiellement la corde. Ou du moins, c’est la raison la plus facile à invoquer. Toute la population est épuisée. Et les chrétiens ne font pas exception.

Une crise se dessine

En Palestine, les plus jeunes souffrent de l’enfermement auquel ils sont contraints. De plus ils manquent de perspectives pour le futur et le présent n’est pas toujours facile à vivre. Alors que les Églises s’efforcent de leur venir en aide – construisant des logements, fournissant des emplois, offrant tout ou partie des scolarités, palliant les déficiences du système sanitaire etc. – de nombreux chrétiens se plaignent que ce n’est pas assez. Beaucoup rêvent d’ailleurs.

En Israël, si l’enfermement n’est pas de mise, les difficultés des chrétiens à vivre leur double identité, arabe et chrétienne, au cœur de l’État juif ne sont guère plus reposantes. Elles sont même tout aussi fatigantes.

Mais en parallèle au conflit, la société palestinienne connaît de profonds bouleversements. Le cadre traditionnel de la famille éclate, ici comme ailleurs. La société de consommation gangrène, ici comme ailleurs. Le monde va trop vite, ici comme ailleurs. Internet et les réseaux sociaux servent le meilleur comme le pire, ici comme ailleurs. L’Église de Terre Sainte est en proie aux mêmes assauts que l’Église d’Europe, avec seulement quelques décennies de “retard”.

C’est parce que l’identité religieuse demeure ici très forte qu’un certain nombre d’aspects extérieurs sont saufs. Ce que quelqu’un résumait un jour : “Ici (en Palestine) c’est le contraire de la France. En France nous avons des croyants qui ne pratiquent pas. Ici, il y a des pratiquants qui ne croient pas.” La formule est aisée, et à l’analyse beaucoup trop sévère. Pourtant…

Parmi les jeunes chrétiens, si beaucoup se définissent encore comme chrétiens, nombreux sont ceux qui peinent à trouver du sens dans une pratique religieuse rituelle. Messes, processions, récitations de prières et du chapelet ont porté la foi de générations de chrétiens arabes. Mais ces pratiques se délitent.

Les signes de croix et les génuflexions des nombreux jeunes qui entrent encore dans les églises sont faits à ce point machinalement qu’ils ne ressemblent plus à rien. Ici ou là, les jeunes filles se voilent la tête durant la célébration uniquement pour éviter le courroux de leur curé.

Quels chrétiens ?

Ce que certains jeunes chrétiens estiment être de la pratique, c’est de passer le temps de la messe devant la porte de l’église à fumer et discuter, en attendant que les “choses sérieuses” commencent, comme la procession des scouts sous les bannières de leur troupe, de la Croix de Terre Sainte et de leur drapeau national.

Les “cathos-Pride” (marche de la fierté) locales ont du succès. C’est indéniable. Mais le risque c’est de n’être chrétien que parce qu’on sait ne pas être juif ou musulman. On sent confusément que ce n’est pas assez, mais l’Église n’enchante plus et les rites ne semblent pas en mesure de faire évoluer la situation tant politique que sociale ? (1).

Les plus âgés aussi expriment fatigue et lassitude. Eux s’inquiètent pour leurs enfants. Combien sont-ils qui les incitent même à émigrer ? Certes, ils essaient encore de transmettre la foi à leurs jeunes en leur disant que cette identité chrétienne est capitale dans la construction de leur(s) nation(s). Mais au fond, la question les taraude : n’est-ce pas un mensonge ? Qui se soucie encore, tant en Palestine qu’en Israël, de l’apport du christianisme à ces sociétés dans lesquelles ils sont, chaque décennie, plus minoritaires ?

Dans ce contexte, même l’institution ecclésiale n’est pas épargnée. Certes, l’Église leur vient en aide. Mais la question se pose de savoir si la réponse de l’institution est bien appropriée. Les plus virulents n’hésitent plus à dénoncer un système qu’ils trouvent vieillissant et qui tendrait à les déresponsabiliser, ou qui ne les arme pas assez pour faire face aux défis qui sont les leurs. Ici ou là, on entend les accents d’une certaine délégitimisation de l’institution et de ceux qui la portent.

La diplomatie du langage ecclésial dans l’Instrumentun Laboris ne trompait personne quand il écrivait : “Les ministres du Christ, les personnes consacrées, hommes et femmes, et tous ceux qui cherchent à Le suivre de plus près portent une lourde responsabilité spirituelle et morale dans la communauté : ils devraient être modèles et exemple pour les autres. La communauté attend d’eux qu’ils vivent concrètement les valeurs de l’Évangile de manière exemplaire. On ne s’étonnera pas de constater que beaucoup de fidèles souhaitent de leur part une plus grande simplicité de vie, un réel détachement par rapport à l’argent et aux commodités du monde, une pratique rayonnante de la chasteté et une pureté de mœurs transparente.” (2)

Un vœu qui serait resté pieux à entendre certains chrétiens, dont les critiques se font de plus en plus ouvertes contre les curés et la hiérarchie tant latine qu’orientale.

Le remarquable et délicat travail du synode pour le Moyen Orient, vécu en 2010 sous la houlette du pape Benoît XVI, voulait prévenir (avant les événements tragiques que l’on connaît actuellement) le risque d’affaiblissement du christianisme au Moyen Orient. “Nos Églises ont une origine apostolique et nos pays ont été le berceau du christianisme. Ce sont des terres bénies par la présence du Christ lui-même et celle des premières générations chrétiennes. Il est certain que l’affaiblissement, voire la disparition, du christianisme là où il est né est une perte pour l’Église universelle. Nous portons là une lourde responsabilité : non seulement, maintenir la foi chrétienne en ces terres saintes, mais plus encore maintenir l’esprit de l’Évangile dans ces populations chrétiennes et dans leurs rapports avec les non-chrétiens, et maintenir vive la mémoire des origines.”

Il est évident que tout le christianisme du Moyen Orient, ni celui de Terre Sainte en particulier, ne se réduit pas à ce tableau. De tout temps, et depuis les récents développements, des chrétiens dans la région ont vécu et vivent un authentique attachement au Christ, dans une vie spirituelle profonde et personnelle. Terre Sainte Magazine ne manquera pas dans les prochains numéros d’aller à la rencontre de jeunes et moins jeunes engagés en Église et dans la société.

Reste que les travaux du synode soulignaient le risque de voir les chrétiens entretenir un christianisme d’héritage. Héritage et traditions sont de belles valeurs qui doivent constamment se revivifier à leurs propres sources. Et le synode était et demeure un rappel à les ancrer de nouveau résolument sur la forte tradition spirituelle locale, sur une vie de prière authentique (et pas seulement récitée), sur un discernement – individuel et en Église – des gestes à poser pour vivre en chrétien dans toutes les dimensions de la vie.

Et le synode donnait des pistes de travail et d’approfondissement susceptibles de répondre à la soif spirituelle des jeunes qu’il constatait mais dont il regrettait qu’elle ne soit pas étanchée. La lecture de la Bible, la vie de prière personnelle, l’envoi en mission, la formation des jeunes dans les écoles et dans de nouveaux types de catéchèse, l’excellence de l’éducation pour devenir des citoyens responsables.

Des saintes imitables

La canonisation des saintes Mariam et Marie-Alphonsine est dans le droit fil du synode. Toutes deux sont données en exemple pour aider jeunes et moins jeunes à assumer la tête haute, sans raideur ni esprit de ghettos, leur présence ici.

Sur l’antenne de France info, au micro de Sébastien Laugenie, le sociologue palestinien Bernard Sabella a bien exprimé les enjeux de l’événement. “Ces canonisations sont un message d’espoir pour les chrétiens locaux. Ces deux saintes nous sont données en exemple pour continuer à servir notre société en tant que citoyens, au service de tous, musulmans et juifs, comme l’ont fait les deux saintes.”

En même temps soulignait-il, ces canonisations sont pour les Palestiniens un message d’enracinement non seulement dans leur foi orientale, mais aussi dans leur légitimité à vivre et demeurer ici au Proche Orient les Chrétiens syriens, jordaniens, libanais, sont partie intégrantes de cette région. Il faut qu’ils continuent à vivre ici et ne doivent pas émigrer. Partir n’est pas la solution. La solution c’est au contraire de s’enraciner, de s’investir pleinement dans notre société. Et le message vaut pour nos compatriotes musulmans : nous sommes d’ici, nous sommes pour ici, nous faisons partie de la civilisation arabe musulmane.”

Comment deux femmes de la fin du XIXe siècle peuvent-elles être exemplaires pour le début du XXIe ? Elles ont vécu en Palestine à une époque charnière. En ouvrant, vers 1830, les frontières du pays à l’installation d’étrangers, Mehemet Ali, vice roi d’Égypte, allait précipiter la Palestine dans une nouvelle modernité. L’Empire ottoman vivait ses dernières décennies dans un chant du cygne qui produisit le meilleur et le pire – avec le génocide des chrétiens de l’actuelle Turquie. Au rythme de sa déliquescence, tout le Moyen Orient se redessinait, se recomposait avec l’intervention plus ou moins heureuse de nations étrangères.

C’est dans ce contexte que ces deux femmes sont nées, c’est dans ce contexte qu’elles se sont dressées. On peut vanter leur humilité, leur effacement et sans aucun doute avaient-elles ces vertus. Mais quel courage et quelle détermination aussi.

Des femmes fortes

On pourrait regarder Mariam Baouardy et Marie Alphonsine telle que la piété du XIXe nous offre de les voir : de façon mièvre. On pourrait leur réserver le sort qui a été longtemps fait à Thérèse de l’Enfant Jésus – qui leur est contemporaine – et passer à côté de leurs charismes.

Car ces deux femmes ne se sont pas contentées d’embrasser la vie religieuse. Mais appuyées sur le cœur de leur vie religieuse, le Christ, elles se sont dressées à la limite de la rupture avec l’Église et avec la société de leur temps pour bâtir, construire, éduquer des âmes et des esprits. L’Église ne vient pas de canoniser deux pieuses religieuses, mais deux bâtisseuses et fondatrices.

Sr Marie-Alphonsine va fonder la première congrégation religieuse arabe dans une Église palestinienne qui vivait en langue étrangère. Malgré leur dévouement, les institutions religieuses qui s’installèrent en Palestine à la seconde moitié du XIXe méconnaissaient par trop la mentalité du pays “pour que leur action réussît à transformer le milieu si fermé dans lequel restait encore confinée la femme orientale”.

La biographie de la sainte citée ici – dont le style n’est pas vraiment révolutionnaire – ose parler de “libération” de la femme. La congrégation des sœurs du Rosaire naît presque comme une école de prière, avant de devenir les écoles d’excellence que l’on connaît aujourd’hui. Mais son but est très tôt d’enseigner aux femmes, au cœur de la société arabe et majoritairement musulmane, à être des femmes de valeur, relais de l’évangélisation de la chrétienté locale.

Penser à “armer” spirituellement et intellectuellement les femmes au XIXe siècle, début du XXe dans une société d’Orient majoritairement musulmane, le tout dans le respect de leur mentalité propre, de leurs coutumes, de leurs usages, mais non sans les bousculer aussi, c’était révolutionnaire. Et pourtant cela s’est imposé en douceur, grâce à la prière, à une vie authentique de charité et de pauvreté.

Et les sœurs du Rosaire ont osé aller dans des coins reculés où “il fallait partir de zéro”. Oui, ce zèle missionnaire au cœur de la société palestinienne est le bienvenu pour les chrétiens de Terre Sainte dans la situation actuelle. Par Marie, avec comme support des écoles et le service des paroisses et des pauvres, Sr Marie-Alphonsine a conduit au Christ et les religieuses de sa congrégation et des générations de femmes.

Si les apparitions et miracles ont authentifié la sainteté de Sr Marie-Alphonsine Ghattas, ce n’est pas eux qu’il faut chercher à imiter mais bel et bien cette ardeur à former les chrétiens pour les défis qui sont les leurs aujourd’hui. Dans un langage moderne, on pourrait dire que Sainte Marie-Alphonsine a voulu former des militantes. Une militance qui n’était pas d’opposition mais de construction. On pouvait faire mieux pour les femmes, on pouvait faire différemment pour que toute la société en profitât.

Et ce message reste d’actualité. Certes, aujourd’hui les filles vont à l’école mais le rôle que leur assigne leur société est-il au niveau de ce à quoi elles peuvent légitimement aspirer ? Alors que l’islam local se radicalise, les femmes d’ici ont besoin de connaître et leur religion et leurs latitudes de liberté. Quant à l’Église d’Orient, est-elle prête à entendre la voix des femmes et à accueillir leur différence ? Les deux saintes en leur temps se sont heurtées à un clergé qui n’aimait pas beaucoup qu’une tête dépassât. Y a-t-il aujourd’hui de la place dans l’Église locale pour un rôle assigné à côté du clergé ?

Ce qu’apporte Mariam, pour être radicalement différent dans la forme, ne l’est pas dans la nature qui est celle du service de l’Église et de la société. Mais là où la première choisit la voie apostolique de l’éducation, la seconde enseigne l’intelligence du cœur dans une vie radicalement contemplative.

En fait, sainte Mariam n’enseigne rien. Elle est illettrée, elle n’a rien écrit mais tout au plus dicté des lettres. Née en Galilée en 1846, dans une famille grecque catholique, Mariam Baouardy doit quitter la Terre Sainte quand elle se retrouve orpheline à 3 ans. Elle n’y reviendra qu’en 1875 pour bâtir littéralement le Carmel de Bethléem, puisqu’après moult péripéties, elle est devenue carmélite. Elle meurt en 1878 dans sa 33e année. Rares sont les saints qui ont été comblés d’autant de grâces mystiques : extases, lévitation, don d’ubiquité, possessions diabolique et angélique, apparitions, don de prophétie, stigmates.

La vie surnaturelle est naturelle chez Mariam. On peut-être rebuté par ce côté littéralement extra-ordinaire. Surtout quand on est européen. Il est probablement plus accessible aux orientaux. Mais sainte Mariam elle aussi est prudente sur ces manifestations. Elle conseille à un évêque : “Le Seigneur vous dit : Attachez-vous à la foi, à l’Église, à l’Évangile. Mais si vous allez voir et consulter ici et là l’extraordinaire, votre foi faiblira.”

La raison pour laquelle à fréquenter Mariam on ne s’épouvante pas du surnaturel de sa vie, c’est parce qu’elle s’est effacée. On pourrait dire de Mariam qu’elle “voit les cieux ouverts”, comme saint Etienne au moment d’être lapidé, et qu’elle tient ouvert le battant de la porte pour que, de là où nous sommes, nous puissions voir nous aussi. Comprendre de quel amour nous sommes aimés. Saisir ce que cet amour doit entraîner dans nos vies de confiance, d’amour à donner à notre tour, d’abandon, d’humilité.

Mariam est capable d’enseigner aux chrétiens du monde l’intimité avec le Christ, avec les saints, avec la Vierge Marie. L’humilité de Mariam n’est pas une manière de faire accepter aux chrétiens d’Orient les coups qu’ils reçoivent d’ici ou de là, ce n’est pas une pilule contre les humiliations. C’est un effacement pour nous montrer l’amour du crucifié, ce qu’il a enduré lui pour nous sauver. Mariam n’a qu’un seul désir  que nous comprenions de quel amour nous sommes aimés et qu’à notre tour nous aimions.

Et son amour à elle se portera sur tout. Sur la création – qui mérite d’être un peu plus respectée ici y compris par les chrétiens, y compris dans le champ de “l’écologie”. Sur tous les hommes : en son temps la question du “vivre ensemble” avec l’islam ne se posait pas moins crûment qu’aujourd’hui, et Mariam a aimé les musulmans. Mariam aimait passionnément son prochain.

Mariam, c’est celle aussi qui a connu la douleur, la souffrance, la désespérance. Cette souffrance qu’elle n’a jamais recherchée pour elle-même, elle l’a transformée en joie, en amour parce qu’elle les a vécues en Dieu, avec le Christ pour le Salut du plus grand nombre.

Ces deux saintes sont résolument modernes et nécessaires à l’Église du temps où nous sommes. Parce que dans des situations souvent compliquées, elles ont suivi la voie que leur montrait le Christ. Leur société avait besoin de changement, de se revivifier à sa propre tradition, d’intégrer une situation nouvelle. Et elles ont su inventer et réinventer pour leur temps leur propre vie religieuse. Et elles sont pour aujourd’hui encore une source d’inspiration d’autant plus forte qu’elles sont (relativement) contemporaines. Oui la Terre Sainte peut et est appelée à être encore une terre de sainteté.

Le message qu’elles nous délivrent est une façon de voir dans l’ordinaire de nos vies, la constante présence, la sollicitude et l’amour du Christ. Et à leur peuple, sainte Marie-Alphonsine et sainte  Mariam de Jésus crucifié adressent cette question ouverte : “Et toi, Église de Palestine, sauras-tu réinventer ta sainteté aujourd’hui ?”. τ

(1). On parle ici d’une majorité de jeunes. Grâce à Dieu, une minorité portée par des groupes de prières, de réflexions, de mouvements chrétiens vivent une authentique relation au Christ et à son Église. Ceux-là feront l’objet d’autres articles dans le futur. Mais pour authentique que soit leur foi, eux aussi partagent un certain nombre de questions sur l’Église,
ses rites, son fonctionnement.

(2). Instrumetum Laboris, II B 58

(3). Instrumentum I, A, 2,22

Dernière mise à jour: 19/11/2023 21:53

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