Le temps n'est pas à aller planter un arbre à Jérusalem ces jours-ci. Pluie, neige fondue se sont installées dans tout Israël et avec elles, c'est l'avalanche des annulations des festivités de Tou Bichvat, le nouvel an des arbres. Alors en attendant d'aller refleurir le désert et le reste, autant s'instruire sur les origines de la fête.
(Jérusalem/TD) – En 2016, Tou Bichvat est fêtée les 24 et 25 janvier. Tou Bichvat (le 15e jour du mois de Chevat), aussi appelée le “Nouvel an des arbres”, est une fête juive d’institution rabbinique. De nos jours en Israël, elle joue le rôle d’une fête de l’environnement, de la nature et de l’écologie. Mais il n’en a pas toujours été ainsi.
À l’origine, la date marque le début de la nouvelle année pour les dîmes et prescriptions végétales. C’est une des quatre nouvelles années juives du calendrier hébraïque. La date permet notamment de calculer le moment à partir duquel il est autorisé de consommer les fruits d’un arbre. Dans la loi juive, il est en effet interdit de manger les fruits ayant mûri sur un arbre avant trois années à partir du jour de Tou Bichvat. La quatrième année, les fruits et les revenus doivent être consacrés à Dieu. Ça n’est qu’à partir de la cinquième année qu’ils peuvent être exploités pour le profit (Lévitique 19, 23-25).
Au fil des siècles de nouvelles pratiques se sont greffées à la date : à compter du XVIe siècle le rituel de consommation de fruits et fruits secs du territoire d’Israël se répand dans de nombreuses des communautés juives.
À partir du début du XXe siècle, avec l’émigration massive de nombreux juifs vers la Palestine, la fête devient symbole du renouveau du peuple juif et de la terre d’Israël.
Une nouvelle coutume fait alors son apparition : s’inspirant probablement de l’Arbor Day américain, la tradition de plantation d’arbres naît parallèlement à l’essor du sionisme.
Le premier grand évènement de plantation d’arbres a lieu en 1907 : l’association des Enseignants Hébreux de Palestine organise une campagne de plantation à l’école agricole Mikvé-Israël, près de Jaffa, à laquelle participent professeurs et élèves des écoles juives.
Depuis lors, chaque année à l’occasion de la fête, de nombreux israéliens sortent se promener dans la nature et planter des arbres, en famille ou avec des associations. Il est aussi de bon augure de faire une donation au Keren Kayemeth LeIsrael, le Fonds National Juif, qui possède et gère plusieurs centaines de milliers d’hectares en Terre Sainte. Grâce à ces campagnes de reforestation, financées notamment par les dons que la fête de Tou Bichvat occasionne, ce ne sont pas moins de 240 millions d’arbres qui ont été plantés depuis le début du XXe siècle.
Plus d’un million Israéliens prennent part chaque année aux activités de plantation d’arbres proposées par le Fonds. Sur internet, on peut même choisir où faire planter son arbre, à partir de 36 shekels (environ 8 euros).
Cette fête rappelle l’importance toute particulière des arbres dans le judaïsme. La Torah est dite « arbre de vie ». C’est d’un arbre, celui de la connaissance du bien et du mal, qu’Ève prend le fruit dans la Genèse. Certaines thèses défendent même que les anciens hébreux vénéraient les arbres (article en anglais).
Cette année les pluies diluviennes et la neige fondue qui tombent depuis quelques jours ont causé l’annulation et le report de nombreux évènements censés avoir lieu au grand air. Cependant, la plantation n’étant pas un rituel religieux à proprement parler, elle peut se faire dans les jours suivant la fête, d’autant plus quand la météo laisse à désirer ! En attendant, les planteurs déçus pourront se consoler avec les “trente espèces de la terre d’Israël” et les “quatre coupes de vin rouge et blanc” du repas rituel, avec modération bien sûr.