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L’Iran aux urnes, peu de place pour les réformistes

Carlo Giorgi
27 février 2016
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Les élections législatives se déroulent actuellement en Iran ; un événement d'une grande importance qui désignera pour les huit prochaines années les 290 nouveaux membres du Parlement et les 88 juristes islamiques de l’Assemblée des experts. La consultation d'aujourd'hui est une partie qui semble (presque) déjà jouée. « Le taux d'abstention est le plus grand danger», explique Riccardo Redaelli, professeur de géopolitique à l'Université catholique du Sacré Cœur de Milan.


Les élections législatives se déroulent actuellement en Iran ; un événement d’une grande importance qui désignera pour les huit prochaines années les 290 nouveaux membres du Parlement et les 88 juristes islamiques de l’Assemblée des Experts. La consultation d’aujourd’hui semble pourtant une partie de jeu (presque) déjà jouée : d’une part, les conservateurs avec l’ayatollah Ali Khamenei déploient une armée de candidats acceptables pour le pouvoir religieux. De l’autre, le président modéré Hassan Rohani, ne peut compter que sur une petite troupe d’aspirants aux sièges parlementaires. C’est certainement l’humeur incertaine de l’électorat iranien qui fera pencher la balance.

« Le taux d’abstention est le plus grand danger », explique Riccardo Redaelli, professeur de géopolitique à l’Université catholique du Sacré Cœur de Milan et directeur du master Middle Eastern Studies (Mimes) de la Haute école d’économie et de relations internationales (ASERI).  « La désillusion est grande parmi la population – explique Redaelli -, étant donné que ces élections sont pratiquement déjà jouées et ce bien avant le vote ; le Conseil des Gardiens de la Révolution a décimé presque tous les réformistes et les candidats modérés. Un choix clairement souhaité par le chef suprême (rahbar), l’âgé et faiblissant ayatollah Ali Khamenei, inquiet à l’idée que puisse s’ouvrir une nouvelle saison réformiste, à la suite du compromis nucléaire avec l’Occident que le gouvernement du président Hassan Rohani a accepté. Cependant, les dirigeants modérés et réformistes tentent de mobiliser l’électorat qui, dans la majorité, est bien hostile aux conservateurs.

Y a-t-il une possibilité que ces élections changent l’équilibre du parlement actuel ?

Ayant disqualifié la plupart des réformistes, il semble très improbable que dans le futur le parlement connaisse de grandes révolutions. Toutefois, le président Rohani espère affaiblir le bloc des ultra-conservateurs, liés à son prédécesseur Mahmoud Ahmadinejad et aux branches les plus sombres du Nizam (le «système», nom donné au régime au pouvoir), au profit d’une majorité centriste de «conservateurs modérés » et pragmatiques. Peu nombreux sont les candidats vraiment réformistes.

Une victoire conservatrice pourrait mettre un frein à la voie réformiste du président Rohani, ou s’agit-il d’un chemin irréversible, peu importe le résultat de ces élections ?

Rohani n’est pas un réformateur, mais son programme est ce qui s’en rapproche le plus en Iran aujourd’hui. C’est un centriste pragmatique et ouvert aux besoins de la société civile, de plus en plus exaspérée par la crise économique, la corruption et le harcèlement quotidien d’un régime très impopulaire, mais qui, de fait, n’a pas d’alternative politique. Rohani tente d’améliorer le système politique, en travaillant avec prudence à la réduction de la distance entre le régime et la population. Mais les variables sont nombreuses : crises internes, menaces extérieures, tensions régionales… Le chemin vers un Iran plus ouvert et modéré reste très sinueux.

Si l’on pense au bien de minorités religieuses, y compris les chrétiens, quel scénario serait le plus souhaitable ?

Pour les chrétiens et les autres minorités, cette évolution progressive vers une société plus ouverte, tolérante et moins idéologique est plus que souhaitable. Bien que les chrétiens ne soient pas harcelés en tant que tels, les limites à la vie et l’activité des églises chrétiennes au sein de la République islamique sont évidentes. Toutefois, il convient de noter que le système garantit les sièges réservés au parlement pour les minorités religieuses (chrétiens, juifs, zoroastriens) et la façon dont les dirigeants de ces communautés essaient de ne pas trop s’impliquer dans les luttes politiques internes à l’élite fragmentée du pouvoir iranien.

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