Dans le numéro de septembre-octobre 2016 de la version italienne de Terre Sainte Magazine, Mgr David M. Jaeger nous apporte sa réflexion sur la relation entre Islam et violence.
Aux États-Unis, l’extrême droite condamne le président Barack Obama pour son prétendu refus de parler du « terrorisme islamique radical », et donc de relier Islam et terrorisme. Même au sein de l’Eglise quelques voix se plaignent de l’ »omission » similaire du Saint-Père. « Appelons le terrorisme par son nom et son prénom ! » clament-ils. Alors pourquoi ne pas le faire ? Parce que ce serait, justement, faire le jeu des terroristes. On accèderait alors à leur demande injuste d’usurper l’identité authentique (et c’est en ce sens qu’il faut entendre le mot «radical») de la religion que partage plus d’un milliard de personnes sur tous les continents, mettant finalement en œuvre le tant convoité « choc des civilisations », longtemps rêvé par les partisans Orwelliens de l’état de guerre permanent. Avec l’échec du « communisme international », les bellicistes se sont retrouvés désorientés, l’ennemi mondial pourtant indispensable manquait à l’appel, ce prétexte permettant de prendre toute mesure. La tentation est forte, et ce même pour les gens du quotidien, de réduire une variété d’événements terrifiants à une formule aussi simple qu’elle puisse rentrer dans les 140 caractères imposés par Twitter. Nombreux tombent dans le piège. Trop. Nous résistons, non pas parce que nous sommes « de bonnes âmes », pas plus dans un élan d’irénisme facile, mais pour la vérité, la justice et, surtout, notre sécurité. Nous voyons les choses telles qu’elles sont réellement.
Admettons – mais sans l’accorder – que « tous les terroristes soient musulmans », cela ne signifierait pas que « tous les musulmans sont des terroristes » actifs et encore moins potentiels. Une infime partie des musulmans dans le monde, statistiquement non significative, soutiendrait le terrorisme. Beaucoup d’autres en sont ses victimes, et encore plus nombreux sont ceux qui s’y opposent de manière décisive.
Bien sûr, dans les écritures musulmanes, vous pouvez trouver des versets qui, pris isolément de l’ensemble océanique de leur patrimoine idéologique, pourraient être abusés pour argumenter que cette religion tend à encourager et à imposer la violence – comme d’autres extrémistes et adversaires savent le faire en référence aux traditions juives et chrétiennes. Et si encore nous supposions – ce qui n’est pas le cas – qu’il est plus facile de le faire avec l’Islam ; quel profit tirerions-nous à soutenir l’argument des terroristes qui précisément s’appuient sur ces versets – et pas sur d’autres, opposés – afin de caractériser la religion dont ils se sont appropriés ? N’est-il pas beaucoup plus bénéfique – en nous plaçant sur le terrain de la prudence stratégique et mettant de côté toute prétention naïve – de le nier ? N’est-il pas beaucoup plus sage de repousser leur tentative de nous faire tomber dans le piège de la diabolisation de nos voisins musulmans ? Sachons au contraire nous montrer sincères admirateurs des vastes trésors de sagesse, de compassion et, oui, d’humanité et de miséricorde qui excellent dans l’encyclopédique tradition religieuse et culturelle des musulmans du monde entier, nous faisant alliés et non pas ennemis. Ainsi, le Concile Vatican II enseigne que « L’Église regarde aussi avec estime les musulmans, qui adorent le Dieu unique, vivant et subsistant, miséricordieux et tout-puissant » auxquels ces derniers rendent culte « surtout par la prière, l’aumône et le jeûne » (Nostra Aetate. n° 3).
Je vous écris peu de temps après avoir lu la dure – mais raisonnée et documentée – réplique d’un rabbin israélien à un collègue extrémiste qui invoquait une allégation présumée xénophobe afin de blâmer les jeunes juifs militaires qui « trahissaient la Nation » en se livrant à des activités bénévoles d’aide aux enfants africains réfugiés à Tel Aviv.