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Remous en Israël autour d’une « liste noire » de rabbins

Christophe Lafontaine
13 juillet 2017
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Une blacklist de 160 rabbins de la diaspora aurait été compilée par le Grand rabbinat d’Israël. Si le Grand rabbin David Lau a démenti son existence, les tensions avec les juifs à l’étranger montent encore d’un cran.


160 rabbins blacklistés. Les autorités du Grand rabbinat d’Israël auraient constitué « une liste noire » de rabbins originaires de 24 pays. Majoritairement issus des Etats-Unis et du Canada. Cette liste comprend des rabbins des mouvements orthodoxes, réformés et conservateurs. Selon le Jewish Telegraphic Agency (JTA) qui a publié cette recension le week-end dernier, 66 rabbins américains sont fichés, dont au moins 20 % sont orthodoxes. La divulgation de ces noms a « déclenché un tollé en Israël et dans le monde », selon les mots du directeur d’Itim, le rabbin Seth Farber, rapporte le journal La Croix. Cette « liste noire » aurait été dressée suite à une requête juridique menée par Itim, une association aidant les Israéliens à se repérer dans la bureaucratie religieuse israélienne. L’association demandait la liste des rabbins étrangers approuvés et a reçu cette liste dans ce cadre.

Elle répertorie les rabbins auxquels la plus haute instance religieuse de l’Etat d’Israël (pour les séfarades comme les ashkénazes) ne fait pas confiance pour attester de l’identité juive des immigrants. Or la confirmation de la judaïté est une condition sine qua non pour immigrer en Israël. En vertu de la « loi du retour » permettant à toute personne juive ou d’origine juive de devenir citoyen israélien, ou dans le cadre d’un mariage (voire d’une conversion), les rabbins de la diaspora aident à garantir le statut religieux des futurs immigrants ou des futurs mariés selon les conditions pré-requises. Dans le cadre de la constitution d’un dossier religieux, ils ont l’autorité d’émettre des attestations confirmant l’identité juive de l’individu concerné. En 2016, les attestations émises par les 160 rabbins inscrits sur la liste du Grand rabbinat d’Israël ont été refusées, révèle le JTA.

C’est là que le trouble est semé. Mardi dernier, Moshe Dagan, le directeur général du Grand rabbinat a tenu à déclarer que la description de « liste noire » retrouvée dans la presse prêtait à confusion. Dans une lettre adressée au Conseil rabbinique orthodoxe d’Amérique que JTA s’est procurée, Moshe Dagan écrit que les lettres écrites par ces rabbins comme preuve de judaïté ont été rejetées pour différentes raisons, et que la liste remettait en cause les documents, et non les rabbins. Et Moshe Dagan de rajouter que ces rejets pouvaient être temporaires. En fin de compte, selon lui, cette liste (ou son ambition) aurait été mal présentée ou mal comprise.

Le Grand rabbin, choqué de découvrir cette liste qui a été élaborée sans qu’il en ait pris connaissance ni donné son accord, a ordonné une enquête minutieuse sur le sujet fait savoir le Times of Israel. Le média rapporte aussi que le grand rabbin ashkénaze a ordonné que l’employé du rabbinat auteur de la faute soit réprimandé et interrogé.

Contexte d’affrontement

Cette révélation intervient dans un contexte d’affrontement entre les leaders juifs américains et le Grand rabbinat sur la détermination de l’identité juive. « Cette affaire apparaît comme un nouveau scandale qui pourrait bien provoquer une scission profonde », annonce  la chaîne télévisée i24news. Ce point de crispation s’ajoute à un dernier exemple, en date du mois dernier, avec la décision du gouvernement israélien de suspendre la création d’un espace de prière mixte au Mur des Lamentations à Jérusalem. Ce qui a provoqué la colère d’une grande partie de la communauté juive mondiale, et des grandes organisations juives.

« Ces dernières ont d’ailleurs déclaré reconsidérer leur relation avec le gouvernement de l’Etat hébreu, voire de mettre un terme à leurs donations », souligne la chaîne de télévision israélienne. D’autant plus que l’Etat a avancé en juin un projet de loi qui aurait accordé au Grand rabbinat l’autorité pleine et entière au sujet de toutes les conversions juives effectuées sur le territoire israélien. A la suite d’une levée de boucliers de la part des chefs religieux juifs aux Etats-Unis, le projet de loi a été mis en quarantaine pour six mois. « La communauté juive américaine a le sentiment d’avoir été giflée par le gouvernement israélien », avait alors admis, devant la presse, le ministre israélien de l’Education et de la Diaspora, Naftali Bennett.

Lors d’une conférence menée par le quotidien ultra-orthodoxe Hamodia, le Grand rabbin David Lau a affirmé que le plus grand problème auquel les Juifs américains avaient à faire face n’était pas le mur Occidental, ni le projet de loi sur les conversions, mais les mariages mixtes et l’indifférence au sujet de l’Etat juif. « Ces deux dernières semaines, on nous a présenté des mensonges selon lesquels les Juifs américains seraient en train de se séparer d’Israël, a déclaré le Grand rabbin. 85 % des Juifs américains n’ont jamais mis les pieds en Israël. » a-t-il confié au Times of Israel, le 10 juillet dernier. Le lendemain, l’ancien ambassadeur israélien aux Etats-Unis, Michael Oren, a vivement critiqué cette assertion dans les pages du Times of Israel : « Les commentaires du rabbin Lau sont symptomatiques des attitudes condescendantes et dédaigneuses que certains Israéliens adoptent envers les Juifs américains ».

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