Les responsables de l'Eglise catholique de Terre Sainte demandent aux autorités israéliennes de faire preuve de moins de dureté envers les migrants érythréens et soudanais, qui ont désormais deux alternatives : l'expulsion ou la prison.
(g.s.) – Au début de 2018, le gouvernement israélien a annoncé une répression drastique contre les migrants irréguliers érythréens et soudanais encore présents dans le pays. Dans quelques mois, ils devront retourner « volontairement » d’où ils viennent ou subir des conséquences graves. Une décision qui contentent les Israéliens – surtout à Tel Aviv, où beaucoup d’Africains affluent, vivant dans de mauvaises conditions – mais qui provoque aussi des protestations, des remords et des perplexités. Aujourd’hui, les dirigeants de l’Eglise catholique de Terre Sainte ont publié une déclaration dans laquelle ils demandent aux autorités politiques d’adoucir leur position et de trouver des solutions moins douloureuses pour les réfugiés africains.
Dans leur déclaration, les ecclésiastiques écrivent : « Tout en reconnaissant la nécessité de contrôler le flux des demandeurs d’asile dans notre pays, comme partout ailleurs, nous ne pouvons pas rester indifférents au sort de tant de réfugiés fuyant la dictature, la guerre et d’autres situations horribles. Le bien-être de la société israélienne ne peut être atteint au détriment de tant de personnes rejetées ensemble et de nombreuses vies exposées au danger et à un avenir très incertain. » L’étranger qui réside avec vous sera traité comme quelqu’un né parmi vous, et vous l’aimerez comme vous-même, car vous-mêmes avez été étrangers dans le pays d’Égypte. Je suis le Seigneur votre Dieu. « (Livre de Lévitique 19, 34) ».
« Nous espérons – conclut le texte – que l’Administration prendra en considération la détresse des demandeurs d’asile présents en Israël et trouvera des solutions plus humaines à offrir ».
La déclaration est signée de l’administrateur apostolique du Patriarcat latin de Jérusalem, Mgr Pierbattista Pizzaballa; de l’archevêque grec-melkite de Saint-Jean-d’Acre, Mgr Georges Bacouni; de l’archevêque maronite de Haïfa et de la Terre sainte, Mgr Moussa el-Hage; de l’évêque auxiliaire Mgr Giacinto-Boulos Marcuzzo, vicaire pour Jérusalem et la Palestine; le Custode de Terre Sainte Francesco Patton et des pères Hanna Kaldani, vicaire pour Israël du Patriarcat latin et le Père Rafic Nahra, vicaire pour le vicariat Saint Jacques pour les catholiques hébréophones en Israël (également coordinateur de la pastorale des migrants pour le Patriarcat latin de Jérusalem).
Au début de leur déclaration, les mêmes signataires ont résumé la problématique en ces termes : « Le 1er Janvier 2018, l’autorité israélienne pour la population et l’immigration a rendu public une déclaration proposant aux demandeurs d’asile du Soudan et de l’Erythrée de choisir entre deux options : le départ ou la prison. Selon les informations publiées, ceux qui optent pour le départ d’ici le 31 mars 2018 recevront 3 500 $ en plus du remboursement du billet d’avion. Ceux qui restent après cette date subiront des sanctions après une période de temps spécifiée ».
« Un autre document – note la déclaration – précise que les demandeurs d’asile et les réfugiés du Soudan et de l’Erythrée (excluant les femmes, les enfants, les parents des enfants à charge et les victimes de l’esclavage / travail forcé / commerce sexuel ), qui se présenteront pour renouveler leur permis de séjour temporaire, à compter du 2 février 2018, seront informés qu’ils disposent de 60 jours pour quitter Israël, pour retourner soit dans leur pays d’origine soit s’installer dans l’un des deux « pays tiers » africains. Le document indique que les personnes concernées peuvent faire appel à cette décision, mais précise également que la procédure de recours ne permettra pas de retarder le départ des demandeurs d’asile au-delà de la période de 60 jours établie, à moins que le recours ne soit accepté. Ceux qui resteront en Israël après 60 jours seront emprisonnés ».
La catégorie des personnes prises en considération concerne les demandeurs d’asile érythréens et soudanais qui n’ont pas déposé de demande d’asile formelle avant le 1er janvier 2018. Les médias israéliens parlent de 42 000 personnes. Toutefois, les autorités compétentes se réservent le droit d’élargir le nombre de candidats à l’expulsion vers des pays tiers, incluant ceux pour lesquels la procédure d’asile est toujours en cours.
Les pays d’Afrique subsaharienne qui, en vertu d’accords bilatéraux avec l’Etat hébreu, s’engagent à accueillir un certain nombre d’Africains contraints de quitter Israël sont le Rwanda et l’Ouganda. Depuis trois ans, le Rwanda accueille les Africains déportés d’Israël, mais diverses organisations humanitaires israéliennes ne considèrent pas le pays comme une destination sûre. Le 3 janvier dernier, des organisations comme la branche israélienne d’Amnesty International et d’autres à l’avant-garde de la défense des droits des immigrés, des réfugiés et des travailleurs étrangers (Hotline pour les réfugiés et les migrants, Kav LaOved, etc.) ont rapporté qu’une fois arrivé au Rwanda ceux qui sont expulsés d’Israël se retrouvent sans droits et exposés aux enlèvements, à la torture et à la traite des êtres humains. En d’autres termes, leur odyssée n’a pas de fin.
Comme si ça n’était pas suffisant : les mêmes organisations israéliennes signalent qu’au moins 7 000 réfugiés érythréens et soudanais en Israël au cours de l’année 2017 ne pouvaient pas demander l’asile parce que l’Autorité pour la population et l’immigration les empêchait de le faire, mettant des obstacles physiques et obligeant des files d’attente interminables dans le seul bureau à travers le pays habilité pour recueillir les demandes.