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Ahed Tamimi et guerre contre le terrorisme en Palestine

Fulvio Scaglione
18 février 2018
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Le procès pénal contre Ahed Tamimi, l'adolescente palestinienne arrêtée il y a quelques semaines lors d'une manifestation anti-israélienne, reflète de nombreuses contradictions de la « guerre contre le terrorisme ».


(Article du blog Babylone de la version italienne)- Il n’est pas difficile de prévoir que le procès d’Ahed Tamimi, 17 ans depuis quelques jours – l’adolescente palestinienne arrêtée lors d’une manifestation contre l’occupation israélienne et contre les décisions du président américain Donald Trump sur Jérusalem – nourrira pendant longtemps les chroniques et pas seulement. C’est ce à quoi contribuera la décision du juge du tribunal militaire d’Ofer – où comparaît la jeune fille – qui a décidé de procéder à des audiences à huis clos, en expulsant de la salle non seulement les journalistes et les militants des organisations humanitaires, mais aussi des diplomates présents en tant qu’observateurs. Mais ce sont les conditions de départ qui font du bruit autour du procès : Ahed est une activiste bien connue depuis des années ; l’arrestation et le procès (avec douze chefs d’accusations, qui pourraient conduire à une longue peine de prison) font beaucoup réagir, et sont certainement conçus pour donner un exemple public ; la vidéo dans laquelle elle attaque verbalement les deux soldats israéliens avant de les gifler a fait le tour du monde, la colère palestinienne (justifiée, parce que Trump a donné une couverture politique à la stratégie de colonisation israélienne, que pourtant la communauté internationale condamne sur la base des frontières de 1967) a transformé Ahed en une héroïne de la cause. Le bilan des manifestations, de décembre dernier à aujourd’hui a été comme toujours tragique, avec la mort de deux Israéliens et de vingt-trois Palestiniens. Je crois que l’apparence d’Ahed a joué aussi : elle est blonde, ne porte pas de voile et pourrait être une jeune fille européenne ou américaine.

La personnalisation et l’inévitable spectacularisation du procès risquent toutefois d’éclipser deux autres aspects, pourtant décisifs dans la stratégie défensive-répressive d’Israël en ce qui concerne la réaction palestinienne face à l’occupation. Le premier aspect est l’implication des mineurs. D’après les données publiées par l’armée et l’Administration pénitentiaire d’Israël, fin novembre 2017 (donc avant les manifestations provoquées par les décisions de Trump, avec d’autres affrontements et arrestations) 313 mineurs palestiniens ont été détenus à plus d’un titre (avec le pic de l’année au mois de mai : 331). Fin décembre 2016, ils étaient 319 (pic en mars, 438), alors que fin 2015, on en comptait 422. Entre septembre 2000 et avril 2012, d’après les données de l’Institute for Middle East Understanding (Imeu), environ 7 000 mineurs sont passés par les prisons israéliennes.

Dans la vidéo devenue virale, on voit Ahed furieuse contre les deux soldats d’Israël. Lesquels sont cependant armés, protégés par un casque et un gilet pare-balles. Quant à elle, c’est une jeune fille, faisant la moitié de leur taille, non armée. Ce n’est pas toujours le cas, bien sûr, et même les adolescents peuvent commettre des actes de violence ou des attaques. Mais ce qui se passe en réalité est que le bras de fer contre les Palestiniens est accentué par la politique des mains libres accordée aux colons (les rapports des Nations unies sur le sujet sont nombreux), des condamnations limitées infligées aux terroristes (israéliens) des Tag mehir (ndlr : prix à payer) et de la bienveillance générale qui entoure les actions des soldats. Le dernier cas est celui d’Elor Azaria, le sous-officier qui a tué en 2016 un terroriste palestinien, désarmé et inoffensif et qui, pour cette raison même, est devenu une sorte de héros pour beaucoup d’Israéliens : le tribunal l’a condamné à une peine totalement symbolique, 18 mois de prison. Des ministres et des hommes politiques éminents l’ont félicité. La chaîne de télévision Channel 10 l’a proposé pour recevoir le titre d’Homme de l’Année.

C’est la situation en Palestine, depuis de nombreuses années maintenant. Bien sûr, la Palestine vit un drame particulier, avec l’idée d’un « foyer juif » soulevé en 1917 par le Royaume-Uni avec une opération coloniale et à partir de 1967 défendu et élargi par Israël avec une stratégie néo-coloniale.

Cependant, un aspect apparaît avec une évidence particulière dans cette situation, mais qui nous touche tous d’une manière ou d’une autre, parce qu’il entre dans l’éternel débat sur le terrorisme et les moyens de le combattre.

Nos pays ont déclaré la guerre contre le terrorisme en 2001. Mais la guerre, celle qui a eu lieu juste après avoir été déclarée, était tout autre chose. On savait quand elle commençait et quand elle finissait avec la défaite militaire de l’ennemi. Le terrorisme ne se termine pas par une défaite militaire, comme le démontrent les événements en Syrie. Il continue même après la défaite sur le terrain. De plus, on ne peut pas déclarer une guerre au terrorisme (même si, dans la cause palestinienne, il n’y a pas que le terrorisme, bien sûr) qui apparaît comme une réponse à l’occupation militaire et à la suppression de l’espace vital. En appliquant ensuite les lois sur les crimes de guerre (tribunaux militaires, détention administrative, procès comme celui d’Ahed Tamim, et avant encore, et ailleurs, à Guantanamo) sur ce que, en fait, la guerre n’est pas. Ce qui s’ensuit est un monstre juridique et humanitaire qui ne peut avoir que deux résultats : soit plus de terrorisme, soit un régime si cruel qu’il conduira à une oppression de masse.

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