Le 12 mars, des responsables des trois religions monothéistes se sont confrontés à la question écologique. Une initiative de la Custodie de Terre Sainte dans le sillage de l'encyclique du pape François.
« Face à la détérioration globale de l’environnement, je veux m’adresser à toutes les personnes qui vivent sur cette planète », écrit le pape François en 2013 dans l’encyclique Laudato Si’. Avec le recul du temps, le texte du Saint Père reste une référence pour les chrétiens et les non chrétiens. Ce fut le point de départ des réflexions de la conférence Laudato Si’ – L’“écologie intégrale” du pape François pour la préservation de la “maison commune”, tenue à Jérusalem le 12 mars au Notre Dame Center. Les représentants des trois religions monothéistes ont donné leur point de vue sur le thème de l’écologie. Le Custode de Terre Sainte a été accueilli par Fr. Francesco Patton et Fr. Giorgio Vigna, responsables au sein de la Custodie de la Commission Justice, Paix et Intégrité de la Création.
Le cardinal Peter Turkson, Préfet du Département du Service Intégral de Développement Humain, est venu du Vatican et a parlé des défis d’une écologie intégrale : « Il s’agit de l’exclusion, de l’indifférence, de l’“injustice”, du manque de solidarité et des conflits qui touchent de nombreux pays et populations ». Dans le sillage de ce qu’a affirmé le pape François dans Laudato Si’, le cardinal Turkson a souligné que nous devions travailler à une « conversion écologique » qui implique non seulement les individus, mais la communauté dans son ensemble. Le Cardinal a alors entamé un dialogue avec le public, et diverses questions ont été posées par des membres de la communauté juive.
Dans l’après-midi, le débat s’est élargi pour inclure les visions des deux autres religions abrahamiques.
Dans son intervention, le professeur Mohammed S. Dajani Daoudi, directeur et fondateur du Wasatia Academic Graduate Institute, a fait remarquer que « le Saint Coran déclare que Dieu a créé l’homme à partir de la terre et que la terre elle-même est la création de Dieu conférée par la grâce de son créateur à l’humanité afin qu’elle puisse l’apprécier. Le droit et la responsabilité d’utiliser et d’exploiter la nature que Dieu nous a confiée implique l’exigence de la protéger et de la préserver ».
Le rabbin David Rosen, directeur international des affaires interreligieuses à l’American Jewish Committee, a expliqué que « la tâche écologique assignée à l’humanité est exprimée dans le Midrash au livre de l’Ecclésiaste (Kohelet Rabbah 7 Section 28) ». De ce midrash on peut tirer trois leçons fondamentales : la création appartient à Dieu qui l’a créée, l’humanité est en réalité partenaire de Dieu dans la Création, l’homme a la responsabilité de préserver la création. C’est pourquoi, pour restaurer la relation avec le divin et l’environnement, les juifs observent les préceptes du repos du Sabbat et le respect de l’année sabbatique, laissant la terre en friche de manière cyclique pendant un certain temps.
Pour la construction d’une écologie intégrale, le professeur Stefano Zamagni, professeur d’économie à l’Université de Bologne et membre de l’Académie pontificale des sciences sociales, s’est ensuite concentré sur la mission propre de la miséricorde dans l’environnement économique. « La tâche de la miséricorde est de “façonner” le marché, en l’humanisant – a déclaré le professeur -. Une société ne peut progresser sur la voie du développement humain intégral en gardant dissociés le code de l’efficacité et celui de la fraternité ».
Les conclusions ont été confiées au cardinal Turkson qui est revenu pour parler de Laudato Si’, en l’expliquant avec sept mots clés (les sept C en anglais) : continuité, collégialité, conversation, soin, conversion, citoyenneté, contemplation. L’encyclique est en effet en continuité avec le précédent Magistère de l’Église ; collégial parce que certaines conférences épiscopales y sont mentionnées ; c’est une conversation en ce sens qu’elle veut pousser le dialogue sur le thème du soin porté à la création, pour aboutir à une « conversion écologique » qui mène à une «citoyenneté écologique» et à une contemplation des merveilles de la création.
Le modèle à suivre dans ce processus reste saint François d’Assise, qui en vivant « dans la simplicité et en merveilleuse harmonie avec Dieu, avec les autres, avec la nature et avec lui-même » (LS, 10), est devenu un « champion de l’écologie intégrale », a remarqué le cardinal Turkson. Comme l’a dit le pape dans Laudato Si’, saint François nous a montré « combien sont inséparables la préoccupation pour la nature, la justice envers les pauvres, l’engagement pour la société et la paix intérieure » (LS, 10).