Le pape s’est dit « spirituellement uni » avec Jérusalem alors que s’y est tenue le 19 mai une veillée pour la paix. Le Saint-Siège avait rappelé deux jours auparavant, à l’Onu, « l’identité unique » de la ville sainte.
« Beaucoup a déjà été dit, et, face à ces tragédies, il vaut mieux faire silence devant le Seigneur et demander le don de la confiance et de la paix ». C’est la substance de la brève homélie de Mgr Pizzaballa, prononcée samedi soir, veille de la Pentecôte, rapportée sur le site de l’Ecole biblique et archéologique française de Jérusalem (Ebaf).
L’administrateur apostolique du Patriarcat latin s’adressait, suite à son appel lancé le 15 mai, à « une foule de fidèles », « de religieux », « de religieuses » et devant des « évêques de différents rites » réunis dans la basilique Saint-Etienne de Jérusalem pour prier pour la Terre Sainte. Tous voyant « s’éloigner la perspective d’une paix dans la justice ». Cinq jours après l’inauguration controversée de l’ambassade américaine en Israël dans la ville de Jérusalem, qui a causé la mort de 61 Palestiniens dans la bande de Gaza. Depuis le Guatemala et le Paraguay ont emboîté le pas à leurs alliés américains, respectivement les 16 et 21 mai 2018.
Au cours de la célébration de samedi soir qui s’est voulu sobre, l’Ebaf a, par ailleurs, souligné qu’ « un geste de paix et une onction de parfum furent proposés à chacun comme viatique pour une route qui reste longue. »
« La Pentecôte nous porte à Jérusalem par le cœur » (Pape François)
Une route que n’hésite pas à rejoindre le pape François. En témoigne ses déclarations hier à Rome, en la solennité de la Pentecôte, qui célèbre la venue de l’Esprit Saint. « La Pentecôte nous porte à Jérusalem par le cœur », a-t-il déclaré à l’issue de la prière du Regina Caeli devant des milliers de fidèles réunis place Saint-Pierre. Avant de confier qu’il s’était la veille au soir « spirituellement uni à la veillée de prière pour la paix qui a eu lieu [à Jérusalem], sainte pour les juifs, les chrétiens et les musulmans. » Le souverain pontife n’a pas manqué ensuite d’exhorter les fidèles à continuer « d’invoquer l’Esprit Saint pour inspirer des volontés et des gestes de dialogue et de réconciliation en Terre Sainte et dans tout le Moyen-Orient. »
Auparavant, au cours de la messe de Pentecôte célébrée dans la basilique Saint-Pierre, le pape Français avait dans son homélie expliqué que « l’Esprit, après les cœurs, change les événements. » Précisant : « Comme le vent souffle partout, de même il atteint également les situations les plus impensables. » Et le pape de citer à ce titre les Actes des Apôtres : « Quand les disciples ne s’y attendent pas, l’Esprit les envoie vers les païens. Il ouvre des chemins nouveaux, comme dans l’épisode du diacre Philippe. L’Esprit le pousse sur une route déserte, conduisant de Jérusalem à Gaza ». Marquant alors une pause : « comme ce nom sonne douloureusement aujourd’hui ! » Avant d’espérer « que l’Esprit change les cœurs ainsi que les événements et apporte la paix en Terre sainte ! »
La vocation de Jérusalem
Le 16 mai dernier, le pape argentin n’avait pas caché sa grande préoccupation pour la paix en Terre Sainte invitant « toutes les parties concernées et la communauté internationale à renouveler leur engagement afin que le dialogue, la justice et la paix prévalent. » Une inquiétude qu’a relayée Mgr Ivan Jurkovic, représentant du Saint-Siège auprès des Nations unies à Genève deux jours après, le 18 mai lors d’une session sur la détérioration des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés. Comme le rapporte l’agence Zenit, Mgr Ivan Jurkovic a réaffirmé que « le Saint-Siège plaide une nouvelle fois pour le courage de dire ‘oui à la rencontre et non au conflit, oui au dialogue et non à la violence, oui aux négociations et non aux hostilités, oui au respect des accords et non aux actes de provocation, oui à la sincérité et non à la duplicité. Tout cela demande du courage, de la force et de la ténacité’», a déclaré le diplomate.
Jérusalem a une vocation pour la paix « bien au-delà des frontières », a encore déclaré Mgr Ivan Jurkovic. Pour lui, tous ceux impliqués dans les récents et « déplorables » événements doivent se rappeler « l’identité unique de Jérusalem, sacrée pour les juifs, les chrétiens et les musulmans, dans laquelle les lieux saints sont vénérés par les religions respectives, et qui a une vocation spéciale pour la paix ». Invitant ainsi à respecter « l’identité unique de Jérusalem », le représentant du Saint-Siège faisait directement référence à l’ouverture de l’ambassade des Etats-Unis en Israël dans la Ville sainte. Le diplomate a conclu son intervention avec les mots du pape François pour faire appel à « la sagesse et la prudence, afin d’éviter de nouveaux éléments de tension dans un panorama global déjà bouleversé et marqué par de nombreux conflits cruels. »
Un début de ramadan calme
Après les événements de la semaine passée, la journée du premier vendredi du ramadan était placée sous haute tension par la police israélienne. Elle se serait finalement déroulée sans heurts. Le contexte rendait pourtant très imprévisible cette journée de grande prière alors que l’Esplanade des mosquées aura vu affluer des dizaines de milliers de Palestiniens musulmans. 40 000 Palestiniens de Cisjordanie ont pu se rendre dans la vieille ville pour prier aux côtés des habitants de Jérusalem-Est, a indiqué le Times of Israel. Israël n’a toutefois pas ouvert les portes aux habitants de Gaza pour éviter tout risque de violence. Pour autant, le président égyptien Abdel Fattah al Sissi a demandé que le point de passage de Rafah, entre la bande de Gaza et l’Egypte, soit exceptionnellement ouvert durant le ramadan. C’est-à-dire un mois durant. Le président Sissi a indiqué jeudi soir sur sa page Facebook que cette décision avait été prise « pour alléger les souffrances » des habitants dans la bande de Gaza.