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Au Caire, une grotte ayant abrité la ste Famille, rouverte

Christophe Lafontaine
5 juin 2018
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Après deux ans de travaux, une des grottes qui aurait abrité la Sainte Famille a été inaugurée par le primat de l’Eglise catholique copte le 1er juin 2018 au Caire. Un écho à la promotion du tourisme religieux en Egypte.


Le 1er juin n’est pas une date anodine dans le calendrier des Coptes (orthodoxes comme catholiques). Ces derniers commémorent en effet, ce jour-là, non pas « la fuite » mais « l’entrée du Christ en Egypte » avec ses saints parents. Selon une tradition attestée dès le IIe  siècle, ils y auraient séjourné quasiment quatre ans. Pour l’Eglise copte, il s’agit d’un épisode fondateur auquel elle est très attachée, faisant de l’Egypte une Terre Sainte.

Le choix de cette fête, le 24 du mois de Pachon, pour inaugurer la réouverture l’une des grottes dans laquelle aurait habité la Sainte Famille quelques mois durant son séjour au pays des pyramides sur son chemin de retour vers la Palestine, était alors tout indiqué. Comme le relate le site officiel de l’Eglise copte catholique. 

Le sanctuaire, placé sous la juridiction des coptes catholiques, se trouve à 10 km au nord du Grand Caire. C’est là que leur patriarche Ibrahim Isaac Sidrak a présidé la célébration aux côtés du nonce apostolique en Egypte, Mgr Bruno Musarò. « La grotte de la vierge Marie » est aménagée en chapelle pouvant accueillir jusqu’à vingt personnes. La « kabila » (de l’italien capella, petite chapelle) a fait l’objet ces deux dernières années de travaux de restauration concernant notamment l’étanchéité.

Le quartier où elle se situe porte le nom d’el-Matariya à proximité de « l’arbre de Marie » qui aurait protégé  la Sainte Famille du soleil. Jésus y aurait fait jaillir une source à laquelle il but. La Sainte Vierge y aurait lavé les vêtements de son enfant et ayant versé de l’eau par terre y fit pousser une plante aromatique, connue sous le nom de Balsam (Baumier) que l’on peut utiliser pour préparer le Saint Chrême. « L’arbre de Marie » n’est pas l’original mais le fruit de quatre générations de greffe. L’arbre actuel date de 1672.

Etymologiquement, le nom d’el-Matariya proviendrait du latin « mater » signifiant « mère » et indiquant la présence de la Vierge Marie dans les environs. L’évocation la plus ancienne du quartier comme refuge de la sainte famille provient de l’évangile gnostique dit « de Thomas » au IIe siècle. Proche d’Ain Chams (l’antique Héliopolis/Oun), el-Materiya abritait une importante colonie juive à l’époque de Jésus.

Initialement, une structure simple a été construite à côté ce cet arbre à la fin du IVe siècle ap. J-C. et a bientôt attiré un grand nombre de pèlerins de différentes régions d’Egypte et de l’étranger. Après moult vicissitudes de l’Histoire, les pères jésuites, arrivés sur place en 1883, ont également reconstruit une église dès 1891. La grotte inaugurée le 1er juin se trouve au-dessous de cette plus grande église dédiée à la Sainte Famille (en arabe la Kanīsat al-al-‘Ā’ila muqaddasa) consacrée le 6 décembre 1904.

Booster les pèlerinages

Cette rénovation s’inscrit dans le cadre de la promotion du tourisme religieux lancé par l’Egypte autour du projet du « Chemin de la Sainte Famille » qui selon la tradition aurait été parcouru par la Vierge Marie, Joseph et l’Enfant Jésus au cours de leur exil en Egypte pour fuir le roi Hérode.

C’est pourquoi, l’événement de la réouverture de la grotte aura été couvert par de nombreux médias égyptiens et réuni personnalités civiles et religieuses. Parmi lesquels, on pouvait compter non seulement des représentants de l’Eglise copte orthodoxe et évangélique, mais aussi des membres de la Chambre des représentants. Selon le site égyptien Akhbarak (actualités en arabe), étaient également présents le Gouverneur du Caire et un délégué du ministre des Antiquités et celui du Tourisme.

Il y a plus de 20 ans que le ministère du Tourisme s’emploie à faire revivre le chemin parcouru par la Sainte Famille. Les responsables politiques du pays sont conscients des enjeux économiques qu’offre à leur pays la perspective de devenir un lieu de pèlerinage pour les chrétiens du monde entier.

Au cours de son voyage en Egypte, la Sainte Famille aurait résidé dans plus de 25 endroits. Dans le cadre du programme du pèlerinage officiel, les pèlerins chrétiens qui viennent en Egypte peuvent actuellement visiter huit sites : l’arbre de la Vierge à el- Materiya, l’église suspendue et celle de Saint-Serge au vieux Caire, le monastère de la Vierge à Maadi, le monastère de Saint-Bishoï à Wadi Al-Natroune, les lieux saints de Bahnassa et de Gabal Al-Teir dans le gouvernorat de Minya et, enfin, le monastère Al-Moharraq dans le gouvernorat d’Assiout.

Soutien de l’Eglise catholique

Quelques mois après son voyage en Egypte, le Pape François avait salué, le 4 octobre 2017, une délégation égyptienne conduite par le ministre égyptien du Tourisme alors présente à Rome pour promouvoir les pèlerinages intitulés « Sur les traces de la Sainte Famille ».  A cette occasion, il avait a béni une icône de la Sainte-Famille en Egypte. Accréditant par ce geste la reconnaissance du trajet par le monde catholique et son inclusion dans les programmes de pèlerinage du Vatican.

Le ministre avait rencontré, il y a un an l’Œuvre romaine des Pèlerinages, organe du Saint-Siège, en vue de la valorisation de l’Egypte comme destination d’itinéraires spirituels à proposer aux chrétiens du monde entier. Cela a porté ses fruits puisque l’institution rattachée au vicariat de Rome à l’issue de 20ème congrès à l’Université pontificale du Latran, le 23 janvier dernier, a annoncé des itinéraires nouveaux ou renouvelés, intégrant l’Egypte. Sur son site officiel, deux pèlerinages sur « les traces de la Sainte Famille » sont proposés du 23 au 29 juillet 2018 et du 24 au 30 septembre 2018

Pour gagner en visibilité, le chemin de la Sainte Famille a été présenté à l’Unesco, afin de le faire reconnaître comme patrimoine mondial de l’humanité. A l’instar des chemins de St Jacques de Compostelle. Un dossier a également été déposé auprès de l’Organisation Mondiale du Tourisme (OMT), comme ce fut le cas pour la route de la soie, subventionnée de cette dernière.

Les efforts du pays en matière de sécurisation des sites touristiques semblent  payer puisqu’en 2017 le pays a reçu 8,3 millions de touristes contre 5,3 millions en 2016 (9,3 millions de touristes en 2015). Le pays est encore loin des 14,7 millions d’avant la révolution de 2011.

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