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Enfants et réfugiés, la voix de frère Luc depuis la mer Egée

Terrasanta.net
21 juin 2018
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20 juin: lors de la journée mondiale consacrée aux réfugiés, le frère qui continue d'aider de nombreux boat-people dans les îles du Dodécanèse nous rappelle la valeur de chaque personne.


Le dernier naufrage est survenu le dimanche 3 juin, lorsqu’un bateau à moteur parti de la ville de Demre, au sud-ouest de la Turquie, a coulé entraînant la mort de neuf personnes, parmi lesquelles six enfants. On pense qu’il se dirigeait vers la côte européenne la plus proche, la petite île grecque de Castelrosso, mais le bateau n’est jamais arrivé.

Même si après les accords entre Bruxelles et Ankara en mars 2016, le nombre de personnes tentant de rejoindre la route maritime depuis la Turquie a considérablement diminué, les débarquements dans les îles du sud-est de la Grèce n’ont jamais été totalement annulés et les routes de la mer Égée et des Balkans n’ont pas disparu.

« Nous n’entendons plus parler des réfugiés qui continuent à affronter la traversée dangereuse de la mer vers les îles du Dodécanèse – dénonce fr. John Luke Gregory, frère de la Custodie de Terre Sainte chargé des paroisses latines de Rhodes et de Kos. Le phénomène a presque été oublié, mais Syriens, Irakiens, Iraniens, Afghans, Kurdes et autres continuent d’arriver et beaucoup sont des enfants ».

Comme chaque année, le 20 juin est la journée dédiée aux réfugiés et à la mémoire de leurs conditions. Le nombre de personnes déplacées et de réfugiés a tragiquement augmenté ces dernières années, surtout à cause des conflits du Moyen-Orient, tandis que les demandeurs d’asile arrivant d’Afrique – faits relatés ces derniers jours – sont de plus en plus l’objet d’exploitation politique.

Fr. Luke a fait face à l’arrivée massive des boat-people en 2015 et 2016. Entre Rhodes et les îles voisines, il n’a pas cessé de travailler pour aider les familles et les mineurs qui sont toujours bloqués et à qui la Grèce ne peut répondre de manière adéquate. A Kos, par exemple, un lieu d’accueil a été mis en place pour 600 personnes, mais qui en réalité en héberge jusqu’à 3 000. A Rhodes, la structure principale est l’ancien abattoir, raconte frère Luke, un endroit sinistre où les gens sont logés entre les crochets autrefois utilisés pour suspendre les animaux abattus.

Cet Anglais mince aux yeux clairs et portant l’habit, toujours disponible pour un sourire, a l’expérience d’un dialogue à tous les niveaux dans la recherche de solutions aux problèmes toujours nouveaux : tout d’abord avec les Grecs, principalement orthodoxes ; avec les nombreux touristes de la riche Europe qui, en été, se baladent sur les rives du Dodécanèse ; avec les réfugiés, essentiellement musulmans. De Terre Sainte, il a fait envoyer des manuels scolaires en arabe pour les enfants qui ne sont pas inscrits dans des écoles grecques. Il implique les fidèles catholiques de ses paroisses, dont beaucoup sont des immigrés philippins, dans l’action quotidienne de distribution d’aide, de colis alimentaires, de médicaments et de vêtements.

Un engagement parfois silencieux mais constant, dans lequel les frères de la Custodie de Terre Sainte ne veulent pas le laisser seul. Les commissaires italophones se sont rendus à Rhodes en octobre 2017. Parmi les différentes initiatives, ils ont souhaité la publication d’un livre illustré pour les enfants, Réfugiée (ETS 2018) afin de ne pas oublier les enfants réfugiés, dont beaucoup ne sont pas accompagnés. Les recettes des ventes sont destinées aux projets sociaux.

Au mois de mai, frère Luke a apporté son témoignage à l’occasion de trois réunions publiques à Naples, Rome et Milan. Il y a raconté les conditions dans lesquelles vivent encore les demandeurs d’asile qui ont débarqué sur les îles où ils sont toujours bloqués, les difficultés que la Grèce a à faire face aux demandes d’aide ; il a partagé son déchirement pour les enfants morts en mer.

A Leros, la générosité de ceux qui n’ont rien

Dans son dernier communiqué, frère Luke a des mots d’espoir. Fin mai, à Leros, une petite île de 8 000 habitants qui fait partie de sa mission, l’ambassadeur d’Italie en Grèce, Luigi Marras, a inauguré un jardin, un mémorial des soldats italiens tombés à la guerre et un centre culturel animé par un couple d’Italiens qui vivent dans cette bande de Grèce entre ciel et mer. Frère Luke était présent à la cérémonie et a raconté ses rencontres : « J’étais assis dans le jardin quand deux enfants se sont approchés et m’ont demandé en arabe si j’étais l’imam. J’ai souri et j’ai répondu que j’étais le prêtre catholique. Ils voulaient en savoir plus, ils étaient intrigués par les perles de mon chapelet, de la croix qui y est suspendue. En un instant, j’ai été entouré d’enfants, heureux de partager leurs histoires et de me présenter leurs familles ».

Avec les pièces qu’un papa leur a données, ils ont acheté des biscuits et les ont partagés avec le frère Luke. « Pour moi, ce n’était pas une surprise de les voir ouvrir leurs précieux biscuits et les offrir à tous ceux qui étaient là, connaissant l’importance de l’hospitalité du Moyen-Orient et leur besoin naturel de partager. J’ai été très ému par ce geste généreux et spontané : ils ont si peu, et pourtant ce peu ils l’offrent aux autres, automatiquement.

Frère Luc remarque que les enfants restent des enfants et que les horreurs dont ils ont été témoins peuvent aussi être oubliées dans un moment joyeux. « Je remercie Dieu si nous sommes en mesure d’aider les réfugiés et les pauvres de ces îles en suivant l’exemple de Saint François. Ces enfants ont beaucoup à apprendre aux riches de ce monde ». (F.P.)

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