La journée promettait. Ce matin-là, le vent chargé de sable empêchait les rayons du soleil de darder sur la ville ses rayons incendiaires. Il faisait doux et tout le monde profitait de ce répit. Sur ma table de travail, le café embaumait. Par les fenêtres ouvertes, des oiseaux égayaient le silence. Tout aurait pu être parfait. Pourtant de bon matin il fallait éteindre l’incendie qui couvait sur mon mur Facebook. Deux de mes amis israéliens avaient réagi au quart de tour à une de mes publications. En message privé une amie suisse qui vit en Galilée m’écrivait : “Tu démarres fort avec les commentaires sur FB !”. A Laure je présentais rapidement les deux amis en question. Israël (c’est son prénom) est un juif, athée, super sioniste. Gabriel est un génie du judaïsme moderne orthodoxe et fier d’être israélien. Nous nous connaissons dans la vraie vie. Et Laure de m’interroger : “Et quand vous vous rencontrez de quoi parlez-vous ?”. Un peu de tout et de rien, comme des amis qui sans être intimes ont plaisir à se retrouver pour échanger, préciser, rêver, rire… En y réfléchissant, je m’aperçus et disais à Laure que nous ne nous sommes jamais disputés. Et Dieu sait que des raisons de disputes, nous en avons. Laure notait que ce n’est pas commun. Comment avions-nous réussi ce qui effectivement relève, dans cette partie du monde, d’un petit miracle ?
Il se trouve que nous avons deux points communs.
Le premier c’est que nous sommes tous trois nés en France. Le second c’est que tous les trois nous sommes prêts à faire bouger nos lignes. Nous sommes prêts à entendre les arguments des autres pour les laisser nous interroger, et qui sait, changer. Et je crois que nous l’avons appris de notre éducation, dans notre pays d’origine. Je ne peux pas juger des autres pays. Je n’y ai pas grandi. Mais je crois que nous avons ceci en commun que la devise de notre république Liberté, Égalité, Fraternité s’est inscrite quelque part dans notre ADN. Comme la laïcité d’ailleurs. Oserai-je dire que ces valeurs nous permettent une certaine distanciation ? Une capacité en tous les cas à se rencontrer en dehors des cadres dans lesquels la région où nous vivons veut nous confiner.
En fait nous avons sans aucun doute disputé des points de la politique d’ici, avec vivacité, avec conviction, avec pugnacité. Mais nous l’avons fait de façon franchouillarde. Cautérisant d’humour une parole plus blessante. Ponctuant de silence un cycle plus violent. Évitant en tous les cas d’asséner de ces coups définitifs. J’aime bien l’idée que la France nous a enseigné ça. J’espère qu’elle sait l’enseigner encore.
Une fois n’est pas coutume et en l’honneur du 14 juillet :
Vive la France ! ♦