Un masque datant du Néolithique dans le sud des collines de Hébron renforce la théorie selon laquelle la région était un centre de fabrication de masques en pierre probablement destinés à des activités rituelles.
La découverte n’annonce pas en avance Pourim, fête juive traditionnellement célébrée par des déguisements au début du printemps. C’eût été pourtant de bon aloi. Un masque intact, soigneusement façonné en calcaire jaune rosacé, avec des cavités oculaires, des pommettes, un nez légèrement prononcé et des dents finement ciselées qui le feraient presque ressembler à un visage humain, a été retrouvé dans des circonstances encore inconnues, il y a déjà quelques mois. Non loin de Pnei Hever dans le sud des collines de Hébron.
L’artéfact de pierre, datant de la révolution agricole (il y a 9 000 ans), a depuis été récupéré par l’unité de prévention du vol d’antiquités, de l’Autorité des antiquités d’Israël (AAI). Elle est actuellement étudiée par des experts de l’AAI et le Geological Survey of Israel (Service géologique d’Israël).
Des trous percés aux quatre extrémités de l’ovale laissent penser qu’ils servaient à enfiler une ficelle afin de l’attacher « éventuellement au visage d’une personne vivante, ou peut-être à un mât » (ou autres…), indique un communiqué de l’AAI en date du 28 novembre. En tout état de cause, il s’agissait de le montrer.
Selon Ronit Lupu de l’Unité de prévention du vol des antiquités de l’AAI, « découvrir un masque en pierre, avec un tel niveau de finition, est très passionnant. La pierre a été complètement lissée et les caractéristiques sont parfaites et symétriques », ajoute-t-elle. Mais outre les qualités artistiques de l’artefact, c’est bien le lieu où il a été retrouvé qui peut nous en apprendre un peu plus sur son usage. « Une enquête a révélé le site archéologique probable dans lequel le masque a été initialement découvert », indique le communiqué de l’AAI. « Le fait que nous ayons des informations sur l’endroit spécifique dans lequel il a été découvert rend ce masque plus important que la plupart des autres masques de cette période que nous connaissons actuellement », confie alors Ronit Lupu.
Ainsi, d’après l’aspect du masque et d’autres découvertes d’outils en silex faites sur le même site archéologique les chercheurs estiment que la face de pierre daterait de la période du Nouvel âge de pierre, il y a 9000 ans. Il n’y a donc aucun témoignage scriptural de son usage puisque le masque précède d’au moins 3500 ans l’apparition de l’écriture.
A noter qu’il existe actuellement dans le monde une quinzaine de masques connus datant de cette période découverts dans le sud des collines de Judée. Deux seulement ont été découverts dans un contexte archéologique connu. Les autres pièces font partie de collections privées à travers le monde, ce qui rend leur étude plus compliquée. C’est pourquoi, selon Ronit Lupu, le masque découvert à Pnei Hever « est une découverte unique dans le monde archéologique. »
Le culte des ancêtres
Le masque de Pnei Hever rejoignant d’autres masques attribués à la période néolithique B (phase du néolithique précédant l’invention de la céramique au Moyen-Orient) renforce l’hypothèse selon laquelle cette zone – la région du désert de Judée – constituait un centre de fabrication de masques en pierre probablement destinés à des activités rituelles.
La période du néolithique pré-céramique B qui s’étend sur environ 2000 ans entre le début du IXème millénaire et le début du VIIème millénaire av. J.-C. se distingue par l’apparition de villages sédentaires, dont la population commençait à maîtriser l’agriculture et l’élevage.
Les masques de pierre de cette période sont donc liés à la révolution agricole qui a marqué un changement de caractéristiques sociales, dans lequel les archéologues ont noté une augmentation de l’activité religieuse et rituelle.
Le culte des ancêtres est un exemple d’activités rituelles pratiquées à cette époque, comme en témoigne de nombreux masques, figurines humaines, ou crânes en plâtre ou pierre, trouvés dans les maisons domestiques de cette époque, selon Ronit Lupu et Omry Barzilai, chef du département de recherche archéologique de l’AAI. « Cela faisait partie du rituel et de la conservation du patrimoine familial », explique Ronit Lupu. Le masque de Pnei Hever a probablement été confectionné dans le cadre d’un rituel visant à conserver l’apparence d’ancêtres de la famille. Cela a conduit à plâtrer des crânes, à modeler les traits du visage et même à insérer des coquilles pour les yeux. A l’instar du crâne de Jéricho (en plâtre) datant de 9 500 ans (découvert en 1953) dont les yeux étant représentés par des coquillages taillés. « Les masques de pierre, comme celui de Pnei Hever, ont une taille similaire à celle du visage humain, ce qui explique pourquoi les experts ont tendance à les associer à un tel culte », conclut Ronit Lupu.
—