C’est un peu vexant. Alors que la basilique de la Nativité à Bethléem, après cinq années de travaux, apparaît à nos yeux dans une splendeur que l’on ne soupçonnait plus, parmi toutes les scènes de la vie de Jésus qui y furent figurées pas une ne nous est parvenue qui représente son enfance. Quelle Une de Noël ça aurait fait !
La mosaïque représentant Jésus invitant Thomas à mettre le doigt dans sa plaie est si belle et si touchante (voir dans les pages du dossier) qu’on n’en regrette que davantage que le temps ait eu raison de la mosaïque de la Nativité qui a bel et bien existé.
Pourtant, on le tient notre épisode de Noël. En effet, sur le mur sud (à droite quand on entre dans l’église) est représentée une série de personnages. Leurs noms sont écrits en latin. Ils illustrent un des passages bibliques du temps de la Nativité, celui de la généalogie de Jésus selon le chapitre 1 de l’Évangile de saint Matthieu “Généalogie de Jésus, Christ, fils de David, fils d’Abraham. Abraham engendra Isaac, Isaac engendra Jacob, Jacob engendra Juda et ses frères, Juda, de son union avec Thamar, engendra Pharès et Zara, Pharès engendra Esrom, Esrom engendra Aram, Aram engendra Aminadab, Aminadab engendra Naassone, Naassone engendra Salmone, Salmone, de son union avec Rahab, engendra Booz, Booz, de son union avec Ruth, engendra Jobed, Jobed engendra Jessé” (Mt 1, 1-5).
Personnellement je ne me lasse pas de ce texte. Au verset 15 il se poursuit : “Élioud engendra Éléazar, Éléazar engendra Mattane, Mattane engendra Jacob, Jacob engendra Joseph, l’époux de Marie, de laquelle fut engendré Jésus, que l’on appelle Christ.” Et sur la photo de couverture ils sont là Elioud, Eléazar, Mattane et Jacob et même Akim avant Elioud. Pardonnez-moi mais quelle bande de bras cassés, tous, depuis le début ! Ah elle est belle la généalogie de Jésus ! À côté de quelques saints (ou saintes !), des assassins, des infidèles à Dieu, des adultères, des pécheurs, de sombres inconnus… Nous quoi !
Après Jacob on lit encore sur la mosaïque Ioseph virum Marie, Joseph époux de Marie, mais la mosaïque est ensuite détruite. C’est vexant, c’est dommage, c’est rageant. Mais pour être tout à fait honnête, autant la basilique telle qu’elle nous apparaît aujourd’hui avec des pans de mosaïques est splendide, autant si les mosaïques étaient complètes elle pourrait avoir un air surchargé voire indigeste. Les mosaïques restaurées ne sont-elles pas d’autant plus belles qu’elles se dégagent au milieu d’un mur blanc ? Ne sont-elles pas d’autant plus précieuses qu’elles ont seules résisté au temps, n’est-ce pas parce qu’elles ont traversé de tels dangers et tellement souffert qu’elles nous apparaissent plus belles ? Ce sont des rescapées, ce sont des survivantes d’un autre temps, de tant de blessures… En fin de compte, elles sont d’autant plus belles qu’elles sont cassées !
C’est un peu comme nous et comme la généalogie de Jésus, cassés par le péché, restaurés par la grâce, encore plus beaux !♦
Dernière mise à jour: 14/02/2024 14:35