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Mahmoud Abbas au Vatican: la politique américaine s’invite

Christophe Lafontaine
4 décembre 2018
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Le 3 décembre 2018, le Pape a reçu au Vatican le président palestinien. Au menu : le statut de Jérusalem, la relance du processus de paix israélo-palestinien et la réconciliation au sein du peuple palestinien.


C’était la quatrième audience privée accordée à Mahmoud Abbas par le pape François. Sans compter la fois où il avait participé dans les jardins du Vatican à la prière pour la paix en Terre Sainte, organisée le 8 juin 2014.

Mais, le 3 décembre, c’était la première audience entre les deux hommes depuis que les Etats-Unis ont inauguré en mai dernier à Jérusalem, leur ambassade en Israël, qui était jusqu’au 14 mai 2018 basée à Tel Aviv. A noter qu’il y a presque un an, le 6 décembre 2017, le président des Etats-Unis reconnaissait unilatéralement Jérusalem comme capitale de l’Etat d’Israël.

C’est à l’ombre de cet anniversaire que s’est tenue l’audience privée entre le président palestinien et le souverain pontife durant laquelle « une attention particulière a été accordée au statut de Jérusalem, soulignant l’importance de reconnaître et de préserver son identité et la valeur universelle de la Cité sainte pour les trois religions abrahamiques », a déclaré le Saint-Siège dans un communiqué. Un écho à la rencontre du 15 novembre dernier, entre le Pape et le président israélien Reuven Rivlin, où Jérusalem avait été évoquée « dans sa dimension religieuse et humaine pour les juifs, les chrétiens et les musulmans » en insistant sur la nécessité de préserver « son identité et sa vocation de Cité de la paix. »

Lundi, d’après l’agence de presse palestinienne, Wafa, Mahmoud Abbas a informé le Pape des « derniers développements en Palestine et des répercussions des décisions de l’administration américaine sur la question palestinienne. » Outre le transfert de l’ambassade américaine à Jérusalem et la fermeture de la mission diplomatique de l’OLP (Organisation pour la Palestine) à Washington, Donald Trump a également coupé les vivres à l’UNRWA (l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés palestiniens) et supprimé à la fin de l’été une enveloppe de 200 millions de dollars (environ 172 millions d’euros) d’aide, destinée aux habitants de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza. 
Le président Abbas a également évoqué « les violations israéliennes contre le peuple palestinien, sa terre et les lieux saints islamiques et chrétiens, en particulier dans la ville de Jérusalem. »
Alors qu’il quittait la bibliothèque du palais apostolique au Vatican, a rapporté Reuters, le président de l’Autorité palestinienne a confié au pape François : « Nous comptons sur vous. »

« Un cri de souffrance »

Le Saint-Siège, qui soutient une solution à deux Etats pour mettre un terme au conflit israélo-palestinien, avait plusieurs fois fait part de sa préoccupation après la décision de Donald Trump.

Lors de l’audience de lundi, le chef de l’Eglise catholique et le leader palestinien se sont penchés sur les « efforts pour réactiver le processus de paix entre Israéliens et Palestiniens et parvenir à la solution de deux Etats, dans l’espoir que la communauté internationale s’engage de nouveau à répondre aux aspirations légitimes des deux peuples. » Les négociations entre les deux peuples sont gelées depuis que l’Autorité palestinienne a rompu toute relation diplomatique avec l’administration américaine après l’annonce du 6 décembre 2017.  

Le Père Francesco Patton, Custode de Terre Sainte, a commenté pour l’édition italienne de Radio Vatican, la visite de Mahmoud Abbas au Vatican et l’a vue comme « un cri de souffrance » face au fait que « le prétendu projet des deux Etats risque de s’évaporer progressivement. » Un cri qui montre « la situation que vit la vaste majorité des Palestiniens, qui ont le sentiment que leur rêve, même de posséder une patrie, d’avoir un Etat n’est pas du tout à portée de main. »

« Une nouvelle mentalité » de chefs

Le Pape et le président palestinien ne sont pas restés uniquement tournés sur le conflit israélo-palestinien mais se sont aussi « concentrés sur le chemin de la réconciliation au sein du peuple palestinien. » Un peuple divisé sur le plan politique depuis que le mouvement islamiste du Hamas a pris le contrôle de la bande de Gaza en 2007, évinçant le Fatah, dirigé par Mahmoud Abbas. Jusqu’à aujourd’hui, les tentatives de rapprochement ont toujours fait chou blanc.

Une heure après cette audience, le Pape a reçu de jeunes Italiens appartenant au mouvement de paix « Rondine citadella della pace », où il parlé de la nécessité, sans nommer quiconque, de « leaders avec une nouvelle mentalité » pour parvenir à la paix. « Ces politiciens qui ne savent pas dialoguer et discuter ne sont pas des leaders de paix : un leader qui ne s’efforce pas d’aller vers ‘l’ennemi’, de s’asseoir à une table avec lui (…) ne peut pas conduire son propre peuple vers la paix », a conclu le pape François.

Le rôle des communautés religieuses au Moyen-Orient

Le pape François et Mahmoud Abbas ont aussi évoqué les « conflits qui affligent le Moyen-Orient », indique le communiqué du Bureau de presse du Saint-Siège. Les deux protagonistes ont souligné « l’urgence d’encourager des voies de paix et de dialogue, avec la contribution des communautés religieuses, pour lutter contre toutes les formes d’extrémisme et de fondamentalisme. »

Après son audience d’une vingtaine de minutes avec le Pape, Mahmoud Abbas a rencontré le secrétaire pour les Relations avec les Etats, Mgr Paul Richard Gallagher, a indiqué le communiqué du Saint-Siège. La note a par ailleurs rappelé qu’au cours de ces « entretiens cordiaux » avaient été saluées « les bonnes relations entre le Saint-Siège et la Palestine et le rôle positif des chrétiens et de l’activité de l’Eglise dans la société palestinienne, inscrits dans l’Accord global de 2015. » Pour mémoire, il s’agit d’un accord bilatéral entre le Saint-Siège et l’Etat de Palestine sur « des aspects essentiels de la vie et de l’activité de l’Eglise catholique dans l’État de Palestine, tout en réaffirmant le soutien pour une solution négociée et pacifique de la situation dans la région. » L’accord a aussi ouvert la voie à une représentation diplomatique palestinienne, au rang d’ambassade près le Saint-Siège.

 

Sur le même sujet :

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