Mc Jesus, la sculpture de Ronald McDonald crucifié, exposée dans le cadre d’une exposition à Haïfa (Israël) a suscité un vif émoi parmi les chrétiens de Terre Sainte. La ministre de la culture a même demandé son retrait.
Le célèbre clown jaune et rouge de la restauration rapide McDonald’s cloué sur une croix en bois ne fait absolument pas rire les chrétiens de Terre Sainte. Les patriarches et responsables des Eglises chrétiennes de Jérusalem ont de fait « fermement » condamné dans un communiqué publié le 13 janvier sur le site chrétien d’informations arabes abouna.org, « les images irresponsables et provocatrices exposées au Musée d’Art de Haïfa sous les auspices de la municipalité de Haïfa. » Deux jours auparavant, visant notamment le musée en question, l’Assemblée des Ordinaires catholiques de Terre Sainte (AOCTS), avait déjà déploré dans une déclaration similaire « un tel comportement vis-à-vis du plus grand symbole du christianisme de la part d’une institution qui vise à servir tous les citoyens ! »
Mc Jesus de l’artiste finlandais Jani Leinonen est une sculpture qui présente Ronald McDonald crucifié. La pièce est exposée depuis août dernier dans le cadre de l’exposition « Sacred Goods » (Marchandises sacrées) destinée à critiquer le consumérisme et à repenser la culture de consommation moderne. Le but des œuvres présentées étant de dénoncer, on l’a compris, la transformation de la consommation en religion.
L’AOCTS qui réunit tous les évêques et vicaires épiscopaux catholiques de rites latin et orientaux en Terre Sainte a dénoncé le caractère « offensant » de cette œuvre vis-à-vis du Christ, affectant les sentiments de nombreux chrétiens et non chrétiens.
Ne remettant pas en cause le principe de la liberté d’expression qu’ils disent respecter en affirmant même souscrire aux critiques contre la société de consommation, les Ordinaires catholiques considèrent surtout comme « inacceptable », indique le communiqué, « l’utilisation abusive des plus grands faits de [la] religion chrétienne. »
Les Ordinaires catholiques de Terre Sainte ont dit attendre de la municipalité de Haïfa, dont ils soulignent qu’elle est responsable de l’exposition, une action visant « de manière responsable et avec sagesse » à trouver une solution au problème au nom de « la coexistence entre toutes les composantes nationales, ethniques et religieuses de la ville. » Haïfa est en effet une ville dite mixte abritant en son sein juifs, musulmans, chrétiens et druzes.
Dans leur communiqué, les chefs des Eglises catholiques demandent que soient donc retirés McJesus ainsi que d’autres œuvres présentées dans l’exposition qui détournent, elles aussi, des symboles ou figures religieuses. C’est le cas, par exemple, d’une pièce représentant encore Jésus, cette fois sous les traits de la poupée-Barbie masculine « Ken ». Ou encore Jésus crucifié avec les deux mains chargées d’emplettes.
Ce que n’ont pas manqué naturellement de réclamer également les patriarches et responsables des Eglises chrétiennes de Jérusalem qui attendent d’une part que « le respect des symboles et des figures religieuses, qu’ils soient juifs, chrétiens ou islamiques, soit maintenu indépendament de tout », et d’autre part des excuses officielles. Soulignant amèrement qu’« un tel comportement odieux n’aide pas les trois religions dans leur mission de promotion de la tolérance, de l’amitié et de la coexistence entre les habitants de Terre Sainte et au-delà. »
Manifestations
L’exposition en question a soulevé un vent de colère et « des centaines de manifestants arabes chrétiens » ont tenté de s’introduire de force dans le musée vendredi 11 janvier, a rapporté le Times of Israel. Le journal en ligne indique que trois officiers de police ont été blessés par des jets de pierres. La police a, quant à elle, utilisé des gaz lacrymogènes et des grenades assourdissantes pour disperser les manifestants. L’événement a eu lieu après qu’un engin incendiaire a été lancé contre le musée pendant la nuit de jeudi à vendredi, a fait savoir Haaretz.
La veille de la manifestation, la ministre de la Culture, Miri Regev, avait envoyé une lettre au directeur général du musée de Haïfa, Nissim Tal, demandant le retrait de la sculpture. Dans sa lettre, indique Haaretz, elle affirme qu’elle a reçu « de nombreuses plaintes » pour « offense grave aux sentiments de la communauté chrétienne. » Et d’insister : « le mépris des symboles sacrés pour les religions et de nombreux croyants du monde entier en tant qu’acte de protestation artistique est illégitime et ne peut être affiché dans une institution culturelle soutenue par des fonds publics », écrit-elle. Ajoutant que le soutien officiel apporté au musée pourrait en souffrir. Néanmoins, cela devrait rester lettre morte. Comme l’a rapporté Haaretz, l’Association pour les droits civils en Israël a appelé dans une lettre, vendredi, la Procureure générale adjointe, Dina Zilber, à préciser à la ministre qu’elle n’était pas autorisée, selon la loi, à s’immiscer dans le contenu artistique du musée…
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