Le président américain s'est dit favorable le 21 mars à la reconnaissance de la souveraineté d'Israël sur la partie du Golan annexée en 1981. Le vicaire patriarcal latin de Jérusalem dénonce une décision unilatérale.
« Après 52 ans, il est temps pour les Etats-Unis de pleinement reconnaître la Souveraineté d’Israël sur le plateau du Golan, qui est d’une importance stratégique et sécuritaire critique pour l’Etat d’Israël et la Stabilité Régionale ! », a estimé le président américain dans sur son fil Twitter. Ce qui n’a jamais été reconnu par la communauté internationale et vient violer notamment les résolutions 242 et 497 du Conseil de Sécurité des Nations unies, suivies pendant des décennies par les Etats-Unis.
On ignore à ce stade quand la décision de Donald Trump sera officiellement confirmée et sous quelle forme. Mais le calendrier choisi est loin d’être « une coïncidence », analyse le quotidien Haaretz. De fait, l’annonce de Donald Trump intervient en prévision de la visite à la Maison Blanche, dans quatre jours, du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, en difficulté dans les sondages pour sa réélection à l’approche des législatives du 9 avril…
A 70 kilomètres de Damas, Israël a conquis sur la Syrie une grande partie du Golan (territoire de 1 200 km2, frontalier également du Liban au nord et de la Jordanie au sud) lors de la guerre des Six Jours en 1967. Occupé puis administré par Israël depuis cette époque, le territoire stratégique (militairement parlant dans une région en proie aux conflits et riche en eau), a été annexé unilatéralement en 1981.
Lors de ces deux guerres, précihommese l’AFP, « près de 150 000 personnes, soit la majorité des habitants syriens du Golan, ont fui. Seuls restent aujourd’hui quelque 18 000 Druzes (ndlr : installés depuis le XVème siècle), autorisés à rester sur place. La quasi-totalité a refusé la carte d’identité israélienne. » Concrètement, ils possèdent le statut de résidents permanents en Israël. Une situation très différente des 110 000 Druzes qui viventen Galilée où la plupart sont de nationalité israélienne et font leur service militaire. A noter que depuis 1967, près de 2 000 colons israéliens se sont installés sur les hauteurs du Golan, répartis aujourd’hui dans 33 implantations, essentiellement agricoles, précise l’Agence France Presse.
Signes avant-coureurs
Déjà, dans son rapport annuel sur les droits de l’Homme dans le monde, publié le 13 mars, Washington n’évoquait plus le Golan syrien comme un territoire « occupé par Israël » mais « sous contrôle israélien. » Mi-novembre, les Etats-Unis avaient aussi pour la première fois et seuls aux côtés d’Israël, voté contre une résolution de l’Onu considérant l’annexion israélienne du Golan « nulle et non avenue ». Sans parler de la reconnaissance de Jérusalem comme capitale d’Israël en décembre 2017.
Au tweet de Donald Trump, la réponse du Premier ministre israélien ne s’est pas fait attendre : « Merci président Trump ! », a-t-il immédiatement écrit avant de lui téléphoner en direct. Benjamin Netanyahu a par ailleurs souligné que sa décision était d’autant plus importante qu’elle intervient au moment où « l’Iran cherche à utiliser la Syrie comme une plateforme pour détruire Israël. »
« Le président Trump vient d’écrire une page d’histoire », a encore insisté le Premier ministre israélien lors d’un dîner avec Mike Pompeo, le chef de la diplomatie américaine, actuellement à Jérusalem. Ce dernier a d’ailleurs marqué les esprits le jour même en ayant été le tout premier haut responsable américain à se rendre au Mur Occidental (Jérusalem-Est) au côté d’un chef de gouvernement israélien.
Du côté de Damas (encore officiellement en guerre avec Israël), le ton est tout autre. Dans un communiqué publié par l’agence de presse officielle Sana, le gouvernement syrien a condamné les propos « irresponsables » de Donald Trump. Damas a aussi annoncé être déterminé à récupérer le plateau du Golan par « tous les moyens possibles. »
La Coalition nationale syrienne (CNS), la principale organisation d’opposition au régime de Bachar al-Assad, a également publié un communiqué qui « condamne avec la plus grande fermeté » la reconnaissance américaine, « contraire au droit international ». Elle affirme que ce geste « compromettra toutes les possibilités de stabilité et de paix et incitera à plus de guerres et de destructions dans notre région. »
Un haut responsable palestinien, Saëb Erakat, a dénoncé « le soutien américain » à l’occupation israélienne. « La politique (de Trump) ne changera pas le droit international selon lequel le Golan et tous les territoires palestiniens sont des territoires arabes occupés », a-t-il déclaré à l’AFP.
La définition reste celle de « territoires occupés » (Mgr Marcuzzo)
Levée de boucliers également de la part de l’Iran, de la Russie, de la Turquie, de l’Onu (bien sûr) en passant par l’Union européenne et la Ligue arabe dont le prochain sommet prévu le 31 mars à Tunis traitera sans aucun doute de la nouvelle position américaine.
S’adressant à AsiaNews, Mgr Giacinto-Boulos Marcuzzo, vicaire patriarcal latin de Jérusalem, évoque une « question purement politique », à propos de laquelle « nous respectons » la position établie par « des statuts et organismes internationaux tels que l’Onu et l’Union européenne. »
La définition, ajoute le prélat, reste celle de « territoires occupés » et il ne peut y avoir de changements unilatéraux « sans un accord plus large. » Cette affaire, a-t-il poursuivi, « aura peut-être des répercussions sur le Golan, mais il n’y aura pas de conséquences majeures pour le reste du pays. Il peut y avoir des réactions, mais pas démesurées, notamment parce que nous savons depuis des années que la position de l’Etat d’Israël sur les hauteurs est celle que reconnaît Trump dans son message. »
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