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La sonde israélienne Bereshit n’a pas marché sur la Lune

Christophe Lafontaine
12 avril 2019
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L’Etat hébreu espérait devenir le quatrième pays à se poser sur la Lune. Mais son engin spatial, lancé par un acteur privé, s’est écrasé hier à l’alunissage. Pour Israël, cela semble n’être que partie remise.


La déception pouvait se lire sur les visages hier soir à la résidence du Président israélien à Jérusalem. Des dizaines d’enfants accompagnés de leurs parents avaient été conviés pour une soirée de projection pour assister en direct à l’alunissage, finalement raté, du vaisseau spatial israélien Bereshit qui s’est écrasé. Une déception partagée par beaucoup d’Israéliens qui ont suivi l’événement.

Pour marquer ce moment historique, même le tableau d’affichage des arrivées et départs de l’aéroport international David Ben Gourion à Tel Aviv avait annoncé les informations relatives à la sonde spatiale israélienne.

Près de 50 ans après les premiers pas de l’Homme sur la Lune, il s’agissait de la toute première tentative d’Israël d’aller sur l’unique satellite naturel de la Terre. Bereshit (le premier mot de la Bible en Hébreu « au commencement de ») avait été lancée via une fusée SpaceX Falcon 9, le 22 février depuis la Floride. Elle était entrée début avril dans l’orbite lunaire. Et c’est donc après un voyage de six semaines dans l’espace, après avoir parcouru quelque 6,5 millions de kilomètres, à une vitesse maximale de 10 kilomètres par seconde (36.000 km/h) que la sonde devait alunir dans la Mer de Sérénité(Mare Serenitatis), située sur la face visible de la Lune, dans son hémisphère nord.

La communication avec la sonde a finalement été brutalement coupée hier soir et Bereshit n’a pas réussi à se poser en douceur suite à une panne de moteur survenue à la dernière minute, a déclaré le centre de contrôle de la mission, à Yehud près de Tel Aviv. Mais le vaisseau qui ressemblait à une immense araignée à cinq pattes de 585 kilos ne rejoindra pour cette fois le club très fermé des Etats-Unis, de la Russie et de la Chine, en devenant le quatrième pays à faire se poser un appareil sur le satellite distant de 384 000 km de la Terre.

Israël est devenu le septième pays à s’insérer dans l’orbite lunaire

Pour Israël, l’alunissage de Bereshit était l’objectif premier. La sonde qui aurait eu une durée de vie de deux jours une fois alunie était équipée d’instruments scientifiques pour mesurer le champ magnétique lunaire. A son bord, se trouvait aussi une capsule-témoin destinée à laisser un témoignage sur la Lune pour les générations futures dont plusieurs disques composant la Lunar Library de l’Arch Mission Fondation contenant 30 millions de pages d’information sur la civilisation humaine, des dessins d’enfants, des chansons et des images de symboles israéliens, les souvenirs d’un rescapé de la Shoah et même une Bible nano gravée.

Si le pari de l’alunissage n’a pas été gagné, la sonde n’a toutefois pas démérité puisqu’elle a permis à Israël de devenir le septième pays à atteindre l’orbite de la Lune, et le quatrième à atteindre son sol quand même. En d’autres termes, Israël peut se targuer de faire partie des pionniers de l’espace. La veille du krach, la sonde spatiale avait transmis des photos de la face sombre de la Lune rarement observée. Là aussi, une belle performance.

La sonde a été développée non par un programme spatial national – c’est d’ailleurs une première mondiale – mais par une organisation privée israélienne à but non lucratif, la jeune start-up SpaceIL, qui a travaillé en partenariat avec la société aérospatiale Israeli Aerospace Industries (IAI), l’un des fleurons de la construction aéronautique israélienne. La Nasa n’a d’ailleurs pas manqué de saluer la première mise en orbite lunaire privée. Morris Khan, patron de SpaceIL, a largement contribué au budget de la mission, d’un montant de 100 millions de dollars. Comparé aux huit milliards de dollars investis chaque année par la Chine dans la conquête spatiale et aux 135 et 150 milliards de dollars (actuels) nécessaires au programme américain Apollo (1961-1975), l’investissement israélien « low cost » montre la possibilité d’une conquête spatiale qui se veut alternative et en ce sens l’Etat hébreu détient le record du plus petit et du moins cher engin spatial à avoir touché la Lune.

Netanyahou laisse entendre un programme spatial national

Le président Reuven Rivlin a insisté devant les enfants qu’il avait réuni à la résidence présidentielle sur le fait que, malgré l’échec, « c’est une nuit importante pour l’État d’Israël. » et qu’« il n’y a pas besoin d’être déçu. Nous devons louer ce que nous avons accompli. »

Depuis le centre de contrôle de SpaceIL à Yehud, où il assistait à la tentative d’alunissage, Benjamin Netanyahu a déclaré aux équipes : « Si vous ne réussissez pas la première fois, vous réessayez. » Juste avant l’échec, Benjamin Netanyahu, grand vainqueur des élections législatives, se sentant pousser des ailes, a indiqué qu’il réfléchissait à investir dans un programme spatial national. Assurant que, d’ici deux ou trois ans, « un engin spatial israélien atterrira en entier sur la Lune. » Comme pour honorer le message de la dernière photo prise par Bereshit juste avant le krach, sur fond de Lune avec le drapeau israélien et le panneau suivant : « small country, big dreams ».

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