Selon Fides, 62 édifices chrétiens dépourvus de statut juridique ont été tout récemment reconnus par les autorités égyptiennes. Faisant ainsi monter à 1171, le nombre de lieux de culte chrétiens répondant aux critères nécessaires à leur légalisation rétroactive, faute d’avoir eu dans le passé les permis de construire.
Si « une partie importante de la population – y compris la composante chrétienne – se félicite du travail d’al-Sissi [le président égyptien] qui ces dernières années a accordé plus d’espace aux minorités en désignant la première femme chrétienne copte au poste de gouverneur et en légalisant des dizaines d’églises » comme l’a souligné hier dans une dépêche l’agence AsiaNews, les récentes régularisations d’églises s’inscrivent dans un processus administrativo-législatif dont le calendrier est totalement décorrélé des manifestations qui agitent le pays depuis le 20 septembre dernier remettant en cause le régime d’Abdel Fattah al-Sissi.
En réalité, l’annonce qui a été relayée par l’agence Fides, s’inscrit dans le cadre de la « Loi sur la construction unifiée », votée à la majorité des deux tiers par le Parlement égyptien le 30 août 2016. Le texte réglemente la construction, la rénovation et la régularisation des lieux de culte, et offre notamment une procédure administrative simplifiée pour la construction des lieux de cultes chrétiens et permet également de régulariser – après vérification de conditions – les églises construites avant 2016 sans les autorisations requises.
Des conditions plus souples que les 10 règles (très restrictives) introduites en 1934 dans la législation ottomane par le Ministère de l’intérieur qui imposaient pour la construction des églises une distance à respecter par rapport aux écoles, édifices publics, voies ferrées ou encore zones résidentielles. Les permis devaient être demandés non seulement auprès de la sécurité nationale, mais aussi auprès de nombreuses administrations publiques. Inutile de dire que les chrétiens – qui représentent environ 10% de la population égyptienne – buttaient souvent longtemps (parfois des années) contre ces obstacles administratifs après quoi, souvent, très peu d’autorisations étaient délivrées.
Ainsi, « dans de nombreux cas, l’application stricte de ces règles avait empêché de construire des églises dans des villes et des villages habités par les chrétiens surtout dans les zones rurales de la Haute Egypte », explique Fides. Au cours des dernières décennies, de nombreuses églises et chapelles avaient été construites spontanément, sans les licences nécessaires. Et c’est ainsi que certains édifices construits illégalement par les communautés chrétiennes locales ont parfois servi de prétextes à des groupes islamistes pour fomenter des violences contre des chrétiens, précise l’agence de presse vaticane.Selon la nouvelle loi, la construction d’une nouvelle église est toujours soumise à autorisation préalable, mais la décision appartient désormais au gouverneur local seul, qui dispose de quatre mois pour répondre aux demandes de construction de nouvelles églises présentées par les communautés chrétiennes. En cas de rejet, il doit motiver sa décision et les fidèles ont le droit de faire appel devant les tribunaux administratifs. La loi établit par ailleurs que « la superficie de l’église doit être adaptée au nombre des citoyens appartenant à la communauté chrétienne et prendre en considération la croissance de la population », de la localité concernée.
Quant aux lieux de culte existants, leur statut ne peut être légalisé qu’à condition qu’ils aient été construits dans le respect des normes de construction et du droit de propriété.
C’est à l’aune de ces critères qu’un Comité gouvernemental ad hoc a alors été institué pour vérifier si les centaines d’églises ou lieux de prière chrétiens (ou leurs annexes) bâtis avant la loi de 2016, y répondent et peuvent donc auquel cas être régularisés rétroactivement.
L’Egypte compte environ 5 000 églises sans licence, dont la plupart sont coptes orthodoxes. Plus de 3 700 églises ont demandé une légalisation. Le comité a commencé à travailler sur ces requêtes en octobre 2017. L’agence de presse affirmait le 7 mars dernier que « des sources gouvernementales et ecclésiastiques, reprises par les moyens de communication égyptiens, prévoyaient qu’à la fin de 2020 ser[aient] achevées l’ensemble de vérifications. »
A noter qu’en janvier 2018, le ministère égyptien du Logement a autorisé les chrétiens à pratiquer des rites religieux dans des églises non autorisées, dans l’attente de leur reconnaissance officielle.