Les 29 et 30 octobre, partout dans le monde, de nombreuses commémorations ont été organisées par la communauté bahaïe pour marquer le bicentenaire de la naissance d’un de leurs prophètes, Sayyed Ali Mohammed Chirazi, né le 20 octobre 1819 à Chiraz en Perse (actuel Iran). Ils étaient 1300 hier rassemblés sur le mont Carmel à Haïfa où se trouve son mausolée ainsi que le Centre mondial des bahaïs. En clair leur centre spirituel. Le programme a débuté par une lecture du message de la Maison universelle de la justice (le conseil administratif international de la foi bahaïe constitué d’un corps élu, les dirigeants, et d’un corps nommé, les savants) marquant l’événement du bicentenaire, suivi d’une sélection de lectures tirées des Ecrits saints du bahaïsme. Les fidèles ont marché en procession autour du mausolée au dôme doré du « Bab ».
Les cérémonies du bicentenaire ont en réalité commencé dès les 16 et 17 octobre derniers quand le Centre mondial des Bahaïs a ouvert – fait exceptionnel – pour deux nuits successives ses luxuriants jardins en terrasseà flanc de montagne, dominant Haïfa et la mer. Le site aura vu au cours de ces nocturnes plus de 16 000 visiteurs, juifs, chrétiens, musulmans et druzes, a fait savoir le Bahá’í World News Service.
Le sanctuaire a aussi accueilli la maire de Haïfa, EinatKalisch-Rotem, le 25 octobre, en compagnie de 200 personnes. Dimanche dernier, c’était au tour du président d’Israël, ReuvenRivlin, de s’y rendre. « L’Etat d’Israël est fier et ravi d’accueillir les fidèles bahaïs et le Centre mondial de la foi bahaïe, qui promeut les valeurs de paix et d’unité entre les différentes religions », a-t-il déclaré lors de sa visite dans le cadre du bicentenaire de la naissance du « Bab ».
Sayyed Ali Mohammed Chiraz était à l’origine un marchand érudit qui en 1844 déclara être une manifestation nouvelle de Dieu. Il prit dès lors le titre de « Bab (« porte » en arabe) ayant pour mission de préparer le chemin à la venue d’un second messager de Dieu qui ouvrirait un âge de paix et de justice prédit par toutes les grandes religions.
Le « Bab » affirme que les prophètes sont des manifestations de la divinité et que lui-même n’est pas seulement un prophète mais aussi l’égal de Mahomet. Se détachant alors de l’islam chiite dont il est issu, il fonde le babisme. L’islam chiite et le gouvernement persan finiront par le faire fusiller le 9 juillet 1850 à Tabriz, en Iran.
Du babisme au bahaïsme
Les bahaïs revendiquent le « Bab » comme le prédécesseur de leur propre religion dans la mesure où Mirza Ḥusayn-ʿAli Nuri (1817-1892), l’un de ses disciples (appelés les « Babi »), prétend en avril 1863 être le prophète, « celui que Dieu manifestera », annoncé par le « Bab » et se proclame Bahá’u’lláh(« la splendeur de Dieu ») devenant le fondateur de la foi bahaïe qui tire son nom de lui. C’est en ce sens que le « Bab » est considéré comme le précurseur de la foi bahaïe avec l’intention de donner le jour à une religion mondiale.
En réalité à la mort du « Bab », c’est Subh i Azal qui devait prendre sa suite. Mais après des querelles de succession, c’est son frère Baha qui prit la tête de la communauté. Ayant quitté la Perse, puis Bagdad, et arrivés dans l’empire ottoman, le gouvernement turc décida alors d’envoyer les deux frères l’un à Chypre (Subh i Azal, héritier du babisme), l’autre à Saint-Jean-d’Acre en Palestine ottomane (Baha). C’est dans cette ville, puis à Haïfa, queBaha créera le bahaïsme, une nouvelle religion « révélée » qui s’inscrit dans la continuité des religions monothéistes abrahamiques, issue mais indépendante de l’islam chiite. Pour les bahaïs, Dieu est une entité transcendante et inconnaissable. Les prophètes sont des manifestations divines successives et les prophètes du judaïsme, le Christ et Mahomet sont reconnus ainsi que Zoroastre.
Refusant tout prosélytisme, le bahaïsme prône le rapprochement des religions et des peuples, l’égalité des sexes, l’élimination de toutes formes de préjugés, la justice sociale, l’éducation pour tous et la tolérance religieuse.Sans culte public ni clergé, le bahaïsme – plaçant la famille comme base de la société- a pour seules obligations des réunions communautaires, un jeûne de type islamique, l’abstention d’alcool, des prières et des ablutions.
Après 170 ans d’existence, la communauté internationale bahaïe revendique aujourd’hui plus de six millions de fidèles dans le monde (moins de 1% de la population mondiale) qui s’organisent autour de plus de 100 000 centres (répertoriés par le centre mondial de Haïfa) à travers le monde.
Si le siège mondial du bahaïsme est établi à Haïfa, « pour autant, souligne Carmel Irandoust à l’AFP, il n’existe pas de communauté bahaïe à proprement parler en Israël. C’est seulement le centre spirituel et administratif de la foi bahaïe », explique-t-elle à l’agence de presse. La Terre Sainte compte, outre le mausolée du « Bab », celui du Bahá’u’lláh situéprès de la ville de Saint-Jean-d’Acre à côté du Manoir de Bahji(où il vécut les dernières années de sa vie et qui est devenu le point de la qibla pour les bahaïs, la direction vers laquelle ils se tournent pour accomplir le rite de la prière obligatoire. Tous deux sont inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco en reconnaissance de leur « valeur universelle exceptionnelle » en tant que lieux saints et lieux de pèlerinage pour les fidèles de la foi bahaïe. L’AFP rapporte que « ces sanctuaires accueillent les 3 000 à 4 000 pèlerins et le 1,2 à 1,3 million de visiteurs qui visitent chaque année les sites bahaïs. »