« La voix du peuple de Terre Sainte ne peut être ignorée » : c’est par cet appel que les évêques de la Coordination Terre Sainte ont conclu leur voyage dans la région. La visite annuelle de la délégation des prélats européens et nord-américains a eu lieu cette année du 11 au 16 janvier, et a porté sur la situation des chrétiens à Gaza, Ramallah et Jérusalem-Est. L’initiative est née il y a 20 ans. L’impulsion donnée par le Saint-Siège à cette Coordination Terre Sainte doit permettre à l’Eglise de visiter et de soutenir d’avantage les communautés chrétiennes locales.
Un appel aux gouvernement
A la fin du voyage de cette année, la déclaration finale, publiée le 16 janvier, comporte beaucoup de points forts : « Nous implorons nos gouvernements de contribuer à élaborer une nouvelle solution politique enracinée dans la dignité humaine pour tous ». Invitant leurs pays d’origine (Etats membres de l’Union européenne, Etats-Unis et Canada) à prendre certaines mesures, telles qu’ : « Insister sur l’application du droit international ; suivre l’exemple du Saint-Siège en reconnaissant l’Etat de Palestine ; garder à l’esprit les besoins de sécurité d’Israël et le droit de tous à vivre en sécurité ; refuser tout soutien politique ou économique aux colonies et s’opposer résolument aux actes de violence ou aux violations des droits de l’Homme par l’une ou l’autre des parties ».
Ce sont ces mots qui ont clôturé près d’une semaine de rencontres avec les communautés locales, les jeunes et les institutions religieuses : de la paroisse latine de Gaza le 12 janvier, au jardin d’enfants des sœurs comboniennes de Béthanie le 14 janvier, jusqu’à l’école du Patriarcat latin à Ramallah (en Cisjordanie) le 15 janvier.
A Gaza et à Jérusalem-Est
« Pour la petite communauté de Gaza, je pense qu’il est très important de savoir que les chrétiens du monde pensent à eux – a expliqué le père Mark Madden, secrétaire général de la Coordination Terre Sainte -. Notre visite montre aux habitants de Gaza qu’ils n’ont pas été oubliés. Nous pensons à eux tous les jours et cherchons des moyens de les soutenir ». Et pour le secrétaire général de la Coordination Terre Sainte, la rencontre avec les jeunes de Gaza a été le moment le plus émouvant du voyage : « Chacun souhaite une vie plus digne pour améliorer la communauté dans laquelle il vit. L’espoir les maintient, a-t-il dit. Nous les avons entendus dire qu’ils veulent devenir enseignants ou médecins, tous professionnels d’un certain niveau. Ils disent qu’ils veulent faire la différence dans la société dans laquelle ils vivent et c’est incroyable parce que nous ne rencontrons pas souvent des gens comme ça dans nos pays. Telle est la leçon que le peuple de Gaza nous a donnée : entre le désespoir, la persécution et la souffrance, ce sont de merveilleuses lumières dans le monde, elles sont un exemple pour nous afin que nous puissions toujours garder la flamme de l’espoir allumée ».
Le père Madden a également été frappé par la situation des chrétiens à Jérusalem-Est et les problèmes créés par le mur de séparation entre Israël et les Territoires palestiniens. Le couvent des religieuses comboniennes à Béthanie est à cet égard un exemple éloquent. Lors de la visite du 14 janvier, les religieuses ont fait part aux évêques de leurs difficultés quotidiennes, apparues après la construction de la barrière. Le mur s’est glissé dans le couvent et l’école, laissant de nombreux enfants qui fréquentaient l’institut à l’extérieur. Si pendant un certain temps une entrée avait été ouverte dans le mur pour permettre aux enfants de passer et que des négociations fructueuses semblaient en cours, la situation ne s’est pas améliorée aujourd’hui. Le passage dans le mur a été fermé et juste à côté de la cour où jouent les enfants de la maternelle, des cocktails Molotov et des explosifs arrivent constamment au pied du mur. De nombreux Palestiniens tentent de grimper et la tension avec l’armée israélienne reste élevée. Une situation aussi dramatique n’empêche pas les sœurs de faire leur service et de témoigner à l’école qui compte aujourd’hui une quarantaine d’enfants.
La situation empire
Dix ans après la première visite aux sœurs comboniennes de Béthanie, les évêques de la Coordination Terre Sainte ont pu constater l’aggravation progressive de la situation. C’est ce qu’a déclaré Mgr William Kenney, évêque auxiliaire de Birmingham qui, excepté en 2003, a participé à toutes les visites au cours de ces vingt dernières années. « Chaque fois que je descends ici, je rentre chez moi moins optimiste. La situation semble s’aggraver d’année en année. L’Eglise peut faire en Terre Sainte ce qu’elle fait dans le monde entier – observe Mgr Kenney -. J’ai remarqué cette différence en Angleterre : les gens qui viennent de l’extérieur et qui sont catholiques ont au moins un soutien de plus. Et cela arrive partout dans le monde ». L’Eglise peut aussi assurer l’éducation, comme elle le fait déjà. Pour sa part, le pasteur anglais explique que les pèlerinages ont considérablement augmenté pour soutenir la Terre Sainte depuis l’Angleterre. « Nous voulons également apporter notre soutien par la prière – a-t-il conclu -. A notre retour à Londres, nous parlerons avec l’ambassadeur d’Israël. »
Soif d’espoir
Monseigneur Rodolfo Cetoloni, évêque de Grosseto (Italie), a participé pour la troisième année consécutive à la visite de la Coordination Terre Sainte afin de représenter la Conférence épiscopale italienne. « Cette année, nous approfondissons l’aspect de l’éducation avec des visites à Gaza, Béthanie, Ramallah et cela me semble très intéressant – dit-il -. Il faut semer l’espoir avec réalisme et courage, et les adultes doivent transmettre aux jeunes un message pour le dialogue et la solidarité. Le travail de la Custodie de Terre Sainte et du Patriarcat latin de Jérusalem dans ce domaine est important, car dans cette torpeur de méfiance il faut semer l’espoir chez les jeunes. »
« Les chrétiens de Terre Sainte sont nos frères et sœurs, a conclu le père Mark Madden. Ce qui les concerne nous concerne aussi et il est de notre responsabilité de les soutenir ».