Benjamin Netanyahu, qui a pris la parole après Donald Trump hier à Washington, a vivement salué le plan de paix américain pour le Proche-Orient annoncé hier. Le Premier ministre israélien a même estimé que cette journée lui rappelait le 14 mai 1948, lorsque le président américain Harry Truman avait reconnu l’Etat d’Israël.
« Je crois, a-t-il ainsi annoncé devant l’hôte de la Maison Blanche, qu’au cours des décennies et peut-être au cours des siècles, nous nous souviendrons également du 28 janvier 2020, car ce jour-là, vous êtes devenu le premier leader mondial à reconnaître la souveraineté d’Israël sur les zones de Judée et de Samarie [ndlr : le nom donné à la Cisjordanie par les autorités israéliennes] qui sont vitales pour notre sécurité et centrales pour notre patrimoine. »
Fort des annonces de Donald Trump, Benjamin Netanyahu a déclaré qu’il soumettrait au vote l’annexion de la vallée du Jourdain et de toutes les colonies de Cisjordanie, lors de la réunion du cabinet ministériel prévue dimanche.
Benny Gantz, le leader centre-droit de « Bleu et Blanc » et premier adversaire de Benjamin Netanyahu pour les nouvelles élections législatives qui auront lieu le 2 mars en Israël, a dit qu’il soutenait le nouveau plan de paix américain. Il a cependant précisé que pour l’appliquer, Israël avait besoin « d’un gouvernement fort et stable, dirigé par un individu qui peut consacrer la totalité de son temps et de son énergie à assurer la sécurité du pays et son avenir ». Visant directement « Bibi »aux prises avec une inculpation pour corruption.
Abbas : « Nous enverrons le plan américain à la poubelle de l’histoire »
Sans surprise, le côté palestinien a adressé une fin de non-recevoir catégorique au plan américain. Critiquant les nombreuses concessions faites aux Israéliens. « Non, non et non au ‘‘Deal du siècle’’ a réagi hier soir le président de l’Autorité palestinienne, en parlant plutôt de ‘‘gifle du siècle’’ ». « Nous enverrons le plan américain à la poubelle de l’histoire, nos droits ne sont pas à vendre », a-t-il encore déclaré.
Le président palestinien, qui a refusé ces derniers mois les offres de dialogue de Donald Trump, a par ailleurs affirmé qu’il était« impossible pour n’importe quel enfant, arabe ou palestinien, d’accepter de ne pas avoir Jérusalem » comme capitale d’un Etat palestinien.
Les factions palestiniennes s’unissent contre le plan de paix de Trump
Mahmoud Abbas a tenu ses déclarations à Ramallah au terme d’une réunion d’urgence des factions palestiniennes, incluant des membres de l’Organisation de libération de la Palestine, du Hamas (qui contrôle la bande de Gaza) et du Jihad islamique. Fait plutôt rare à souligner.
Dans cet élan d’unité palestinienne, le Hamas a affirmé que les Palestiniens de Cisjordanie et de la bande de Gaza devaient « s’unir pour combattre l’occupation », à la fois sur le terrain, légalement et diplomatiquement. Le chef du Hamas, Ismaïl Haniyeh, a par ailleurs mis en garde contre une « nouvelle phase » de la lutte palestinienne contre l’occupation israélienne.
A noter que d’après le journal israélien Haaretz, « des responsables à Ramallah ont déclaré que la réaction palestinienne immédiate au plan de Trump n’inclurait aucune étape décisive, comme la révocation des accords d’Oslo ou la cessation de la coopération en matière de sécurité avec Israël, des mesures qui dissoudraient l’Autorité palestinienne. »
Sur la scène régionale et arabe, les émirats se distinguent
Pour les Palestiniens le prochain grand rendez-vous est fixé à samedi. Mahmoud Abbas a en effet sollicité une « réunion extraordinaire » de la Ligue arabe. Le chef de cette dernière, Ahmed Abuel-Gheit, a d’ores et déjà déclaré que la réaction palestinienne au plan de paix américain définirait la réponse arabe.
Pourtant les réactions du monde arabes sont contrastées. Hier, aux côtés de Donald Trump, Benjamin Netanyahu s’est félicité de la présence lors de la conférence de presse, d’envoyés de trois monarchies du Golfe, qui n’ont pas de relations avec Israël (Bahreïn, Oman et les Emirats arabes unis). Les Emirats ont déclaré que la proposition de paix américaine offrait « un point de départ important pour un retour aux négociations dans un cadre international dirigé par les Etats-Unis ». L’Arabie saoudite a aussi exprimé son soutien à un retour aux négociations sous l’égide des Etats-Unis.
L’Egypte, prudente, a appelé les Israéliens et les Palestiniens « à entreprendre un examen minutieux et approfondi de la vision américaine pour parvenir à la paix et ouvrir des voies de dialogue », a déclaré le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué.
En revanche, la Jordanie voisine, par la voix de son ministre des Affaires étrangères, a mis en garde contre « les conséquences dangereuses des mesures unilatérales prises par Israël, qui menacent de créer une nouvelle réalité sur le terrain ». Le ministre a également dit qu’un Etat palestinien avec Jérusalem-Est comme capitale, basé sur la solution à deux Etats, est « la seule voie vers une paix durable et globale. »
La Turquie a jugé que le plan proposé mardi par Donald Trump était « mort-né » et l’Iran, l’ennemi juré d’Israël, l’a qualifié de « trahison du siècle » et a estimé qu’il était « voué à l’échec ».
Le Royaume-Uni se dit ouvert, les autres pays occidentaux prônent les négociations
Les réactions sont apparues contrastées dans les pays occidentaux dont certains ont dit qu’ils prendraient le temps d’étudier le plan de paix américain. Le porte-parole de l’Onu a rappelé que « la position des Nations unies sur la solution à deux Etats a été définie, au fil des ans, par les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale». Ces résolutions qualifient toutes les colonies israéliennes de Cisjordanie d’illégales et appellent à une solution basée sur les frontières avant la guerre israélo-arabe de 1967, avec des échanges de terres convenus. Une position partagée par la plupart desétats dont la France et le Saint-Siège.
Le chef de la politique étrangère de l’UE, dans une déclaration faite au nom des 28 pays membres, a affirmé que la proposition de paix américaine était « une occasion de relancer les efforts urgents nécessaires pour une solution négociée et viable au conflit israélo-palestinien ». Mais a bien formellement précisé que le plan serait étudié sur la base d’« une solution à deux Etats négociée et viable qui tienne compte des aspirations légitimes des Palestiniens et des Israéliens.»
Le gouvernement britannique a estimé mardi que le plan présenté par le président américain Donald Trump pour résoudre le conflit israélo-palestinien « pourrait constituer une avancée », a indiqué un porte-parole du Premier ministre Boris Johnson qui a parlé à Donald Trump avant son annonce.
La Russie a quant à elle appelé Israéliens et Palestiniens à entamer des « négociations directes » pour trouver un « compromis mutuellement acceptable ».
Le grand imam de la mosquée d’al-Azhar, grande institution de l’islam sunnite, a fustigé le plan américain lors d’une conférence internationale pour la réforme du discours religieux au Caire. « Notre identité en tant qu’arabes et musulmans est terminée… J’avais honte de regarder Trump avec le dirigeant israélien », a déclaré le cheikh Ahmed al-Tayeb. « Ce sont eux qui planifient, parlent, contrôlent et résolvent les problèmes pour nous et il n’y a ni arabe ni musulman », a-t-il ajouté.