« C’est la première fois en 50 ans qu’une cache d’or de la période fatimide est découverte dans la vieille ville de Jérusalem », a déclaré Robert Kool, numismate au sein de l’Autorité des antiquités d’Israël (AAI). Dans un communiqué de ce jour, l’institution a en effet annoncé la mise au jour, près de l’esplanade du Mur Occidental, de deux pièces de cette époque et de deux autres frappées quelques années auparavant sous le califat abbasside qui a régné sur la Terre Sainte, il y a un peu plus de 1 000 ans.
La dernière fois qu’une telle trouvaille a eu lieu remonte à l’après-guerre des Six jours, et ce, dans les mêmes parages, un peu plus au sud. Cinq pièces de monnaie et des bijoux de l’époque fatimide avaient alors été déterrées, lors de recherches archéologiques réalisées à grande échelle et dirigées par le professeur Benjamin Mazar.
Cette fois-ci, les quatre pièces qui viennent d’être retrouvées dans un petit pot d’argile l’ont été à la faveur de fouilles effectuées le mois dernier par l’AAI en préliminaire à l’installation d’un ascenseur. Projet porté par la Jewish Quarter Development Corporation, société pour la reconstruction et le développement du quartier juif de la vieille ville, en vue de rendre l’esplanade du Mur Occidental plus accessible que les centaines de marches raides actuelles.
Des pièces témoins de changements politiques
Selon Robert Kool, « les pièces étaient en excellent état de conservation et ont été immédiatement identifiables même sans nettoyage ». Les pièces datent d’une période relativement courte, mais riche en changement politique entre deux dynasties arabes musulmanes, de la fin des années 940 aux années 970 ap. J.-C. De fait, c’est l’époque où le contrôle de la Terre Sainte passa du califat sunnite abbasside, dont la capitale était Bagdad, en Irak, aux mains de ses rivaux chiites – la dynastie fatimide d’Afrique du Nord, qui conquit l’Egypte, la Syrie et l’actuelle Terre Sainte à cette époque-là. « Le profil des pièces de monnaie trouvées dans le pot est un reflet presque parfait de ces événements historiques », s’enthousiasme l’expert en pièces de monnaie, dans le communiqué de l’AAI. Deux dinars d’or ont été frappés à Ramla (au centre de l’Israël moderne) pendant le règne du calife al-Muti (règne de 946 à 974 ap. J.-C.) et de son gouverneur régional, Abu ‛Ali al-Qasim ibn al-Ihshid Unujur (en fonction de 946 à 961 ap. J.-C.). Les deux autres pièces d’or ont été frappées au Caire (actuelle Egypte) par les dirigeants fatimides al-Mu’izz (règne de 953 à 975 ap. J.-C.) et son fils et successeur, al-‘Aziz (règne de 975 à 996 ap. J.-C.). Al-Mu’izz était un calife réputé comme « savant, magnifique, généreux, de belles mœurs, juste pour ses sujets et passionné d’astronomie » selon l’historien du XIVème siècle, Ahmad al-Maqrîzî. Il s’était par ailleurs entouré de deux juifs convertis à l’Islam. Son fils est connu pour être le fondateur au Caire, dans les murs de la mosquée al-Azhar, d’une université où étaient enseignés le droit et la théologie. Université qui jouit encore à ce jour d’une immense réputation.
A noter qu’au début de la période islamique, quatre dinars n’étaient pas sans valeur. Ils « représentaient une somme d’argent considérable pour la plupart de la population, qui vivait dans des conditions difficiles à l’époque », explique Robert Kool. En effet cela correspondait au salaire mensuel d’un petit fonctionnaire ou à quatre mois de salaire pour un ouvrier ordinaire.