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Vaccins : Israël mène la danse, la Palestine condamnée à attendre

Cécile Lemoine
7 janvier 2021
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À Rafah, ville du sud de la bande de Gaza, le 5 janvier 2020. Abed Rahim Khatib/Flash90

Alors que l’État juif a déjà vacciné 15% de sa population, les Palestiniens ne devraient pas recevoir leurs premières doses avant encore plusieurs semaines. 


Deux semaines et demi après avoir entamé sa campagne de vaccination, Israël peut se vanter d’avoir inoculé la première dose du vaccin à 1,37 million de personnes, soit plus de 15% de sa population. Un exploit, salué à l’international, et rendu possible par une population réduite (9 millions d’habitants contre 67 millions pour la France), et un pays où les distances à parcourir pour rejoindre un centre de santé restent courtes.

Organisé, l’État juif achemine même des lots du vaccin Pfizer/BioNTech au plus profond de la Cisjordanie. Mais les doses ne sont distribuées qu’aux colons juifs, et non aux quelque 2,7 millions de Palestiniens qui vivent autour d’eux et qui devront attendre encore plusieurs semaines avant l’arrivée de leur vaccin.

Relativement épargnés par la pandémie au printemps dernier, les territoires palestiniens font aujourd’hui face à une explosion de cas positifs au coronavirus. En Cisjordanie, 100.000 cas, dont 1.100 décès, ont été recensés tandis qu’à Gaza, un tiers des tests de dépistage réalisés sont désormais positifs. Le nombre de décès liés au coronavirus a doublé en trois semaines, pour atteindre plus de 300 morts, dimanche 27 décembre.

Alors que le monde se lance dans une course à la vaccination qui s’annonce d’ors et déjà inégale —les habitants des pays développés sont les premiers à être inoculés— la situation en Israël et dans les territoires palestiniens offre un exemple frappant des inégalités en cours.

Obligation internationale

Les organisations de défense des droits de l’homme estiment que l’État juif est dans l’obligation de pourvoir aux besoins sanitaires des populations occupées. L’ONG Amnesty International a ainsi appelé Israël, dans un communiqué publié le 6 janvier, à « agir immédiatement pour s’assurer que des vaccins anticoronavirus soient fournis de manière équitable aux Palestiniens vivant sous occupation en Cisjordanie et dans la bande de Gaza », sous blocus israélien depuis plus d’une décennie.

En réalité, c’est aux autorités palestiniennes que les accords de paix d’Oslo, signés dans les années 1990, attribuent la responsabilité de vacciner la population. Mais ces textes, transitoires, sont jugés dépassés : ils n’ont jamais été suivis par de véritables accords de paix.

« La crise de Covid expose les vérités insupportables de la Palestine occupée, commente l’avocat israélien Daniel Seidemann sur Twitter. Les accords d’Oslo prétendent exonérer Israël de la responsabilité de la santé des Palestiniens de Cisjordanie, tout en rendant impossible pour le gouvernement palestinien d’en assumer cette responsabilité. »

Dispositif Covax, une aide pour les pays les plus pauvres

L’Autorité palestinienne en Cisjordanie, territoire occupé depuis 1967, n’a pas publiquement demandé d’assistance à Israël pour la fourniture de vaccins. Et il est peu probable que les islamistes du Hamas, au pouvoir dans la bande de Gaza, se mettent officiellement en relation avec l’Etat hébreu sur le dossier. Les deux parties se sont livré trois guerres depuis 2008.

Le ministère de la Santé palestinien a déclaré lundi attendre une première livraison de vaccins destinés à la Cisjordanie et à Gaza en février grâce au dispositif Covax, mis en place par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour venir en aide aux pays les plus pauvres. « Nous ne savons pas exactement quand les vaccins seront disponibles pour être distribués, car de nombreux vaccins potentiels sont à l’étude et plusieurs essais cliniques sont en cours », a nuancé Gerald Rockenschaub, directeur de l’OMS dans les territoires palestiniens occupés, dans une interview à France24.

Le problème majeur reste celui de la logistique. Les doses du vaccin Pfizer-BioNtech nécessitent d’être conservées dans des conditions de réfrigération très strictes, impossibles à garantir dans la situation actuelle de la bande de Gaza. En Cisjordanie, par exemple, le vaccin ne pourrait être stocké que dans une seule installation, à Jéricho. Condamnées à attendre, Gaza comme la Cisjordanie jonglent avec les restrictions tout en essayant de maintenir leur fragile économie à flots.

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