Israël a décidé de s’appuyer sur les réseaux sociaux pour lutter contre l’antisémitisme. Et estime qu’il en a toute légitimité. « Il est vital qu’Israël joue un rôle de leader dans les efforts mondiaux de lutte contre la désinformation et la haine en ligne, l’antisémitisme n’étant qu’une manifestation de ce phénomène », a déclaré Michal Cotler-Wunsh à l’agence de presse JNS (Jewish News Syndicate).
La députée centriste de Kakhol lavan / Bleu et Blanc a de fait dirigé le 10 février dernier, une réunion, à laquelle ont participé aussi bien en présentiel à la Knesset (le parlement israélien) qu’en distanciel, des représentants du gouvernement israélien ainsi que des représentants des principaux médias sociaux tels Facebook, Google, TikTok, et Twitter.
La discussion s’est attachée à amener – sinon convaincre – les entreprises de médias sociaux à investir davantage d’efforts dans la réduction de l’antisémitisme en ligne. La séance s’est tenue au lendemain de la « Journée mondiale pour un Internet plus sûr », et a été organisée par la commission parlementaire israélienne de l’immigration, de l’intégration et des affaires de la diaspora.
Un rapport de 85 pages
Pour l’occasion, les ministères israéliens des Affaires stratégiques et des Affaires de la diaspora, qui sont chargés de lutter contre l’antisémitisme et la délégitimation d’Israël ont publié un rapport de 85 pages, intitulé « hate factor » (facteur de haine) qui présente des recommandations devant aider les réseaux sociaux à « poursuivre une politique plus claire et plus agressive contre l’antisémitisme ». « Face à la propagation rapide du discours de haine », sont ciblées toutes les manifestations d’incitation à la haine, les fausses nouvelles et les théories du complot diffusées sur les plateformes de médias sociaux.
« L’antisémitisme sous toutes ses formes est omniprésent sur les réseaux sociaux non réglementés », a alerté la ministre israélienne de la diaspora Omer Yankelevich. Le ministre israélien des Affaires stratégiques, Michael Biton, a quant à lui déclaré : « La liberté d’expression est un [principe] central de toute démocratie. Malheureusement, des éléments hostiles et antisémites exploitent l’incapacité des plateformes de médias sociaux à diffuser leur discours de haine, sapant cette pierre angulaire ». « Le peuple juif et l’État d’Israël sont constamment attaqués par l’incitation, la diffusion de fausses informations et de purs mensonges », a-t-il encore dit. « Nous avons un intérêt particulier à prendre l’initiative sur cette question et nous demandons aux entreprises de médias sociaux de commencer à prendre leurs responsabilités et d’agir pour mettre en œuvre des politiques plus claires, plus efficaces et plus transparentes », a-t-il ajouté.
Des recommandations concrètes
Parmi les mesures recommandées, le rapport ministériel appelle au signalement systématique des contenus antisémites comme il en a été de la désinformation entourant l’élection présidentielle américaine ou encore la pandémie de Covid-19. Le rapport souligne ainsi la nécessité de former des contrôleurs/modérateurs de contenu et de mettre fin à la vente d’accessoires antisémites.
Le document exhorte également les réseaux sociaux à adopter des définitions claires du discours de haine, notamment celle de l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA) sur l’antisémitisme. L’IHRA définit l’antisémistime comme « une certaine perception des Juifs qui peut se manifester par une haine à leur égard » et « visant des individus juifs, des institutions communautaires et des lieux de culte ».
Le plan du gouvernement israélien demande aussi concrètement de supprimer les comptes de personnalités reconnues coupables pour discours antisémites. « Si un tribunal a statué qu’une personne était antisémite, il n’y a aucune raison pour que les réseaux sociaux lui fournissent une plateforme pour répandre sa haine », a affirmé la députée Omer Yankelevich.
Par ailleurs, précise le rapport, « il ne s’agit pas de limiter les critiques légitimes contre Israël », mais de « ne pas permettre les discours haineux contre les Juifs ni la diabolisation de l’Etat d’Israël ». Les auteurs du rapport s’inquiètent nommément de certains tweets de l’ayatollah Ali Khamenei, dont le pays, l’Iran, est l’ennemi numéro 1 d’Israël.
Le rapport est le fruit de mois de discussions interministérielles avec des entreprises de médias sociaux et de consultations avec les organismes gouvernementaux, civils et universitaires concernés.