En 2050, Israël sera un pays plus dense et plus pollué, avec beaucoup moins d’espaces ouverts. Si le taux de natalité se maintient, la population d’Israël qui connaît la plus forte croissance démographique du monde développé, avec une augmentation de 2% par an devrait presque doubler. Dans 30 ans, elle atteindrait 17,6 millions d’habitants contre un peu plus de 9 millions actuellement, selon le Bureau central des statistiques en Israël. En raison de la petite superficie d’Israël, cela signifie une forte augmentation de la densité.
Une nouvelle étude présentée hier dans le cadre d’une conférence à l’Université de Tel Aviv, et relayée dans divers médias israéliens, a identifié les nombreux défis qui se posent aux dirigeants israéliens d’aujourd’hui. L’étude se base pour chaque thématiques sur trois scénarios. Un scénario « faible », qui reflète une baisse significative de la fécondité ; un scénario « intermédiaire » qui traduit une baisse modérée de la fécondité ; et un scénario « élevé » qui exprime la poursuite de la tendance démographique actuelle.
Un rapport complet qui se veut être un signal
Le journal économique israélien Calcalist indique que selon le rapport, le nombre de foyers en Israël va doubler et augmenter au cours des 45 prochaines années, et ce selon le scénario « intermédiaire ». Le taux de ménages ultra-orthodoxes passerait de 8% aujourd’hui à 21% en 2065, et la part des autres ménages juifs passerait de 77 à 60%. Le taux de ménages arabes augmenterait de 15 à 19%.
L’étude préparée par Tzafuf, le Forum israélien pour la population, l’environnement et la société, a été compilée par le professeur Alon Tal de l’Université de Tel Aviv et Yaara Tsairi de l’Institut de technologie Technion Israel de Haïfa. Tzafuf, qui signifie « surpeuplé » en hébreu, est une ONG de plaidoyer fondée par un certain nombre de chercheurs universitaires et de militants écologistes. Pour Calcalist, « il s’agit probablement du rapport le plus complet et le plus complet de ce type publié ces dernières années en Israël ». Le quotidien estime qu’il est aussi « un signal d’avertissement important pour les décideurs du pays ».
Alon Tal a jugé les données et prévisions démographiques « très inquiétantes », a fait savoir le quotidien israélien Maariv, et pour lui « une image inquiétante émerge selon laquelle ses effets sur la société israélienne pourraient être graves » à l’aune de la baisse des précipitations, de la hausse des températures, des événements extrêmes dus à la crise climatique, mais aussi de l’apparition d’épidémie telle que celle du coronavirus aujourd’hui…
L’ampleur des défis
Selon le rapport, si la tendance démographique se maintient, le rythme de construction de logements en 2040-2050 devra doubler. Autrement dit, l’Etat d’Israël devra ajouter dans les années 2040-2050, deux fois plus d’appartements que ceux construits durant la dernière décennie (2010-2019). « Israël devrait perdre ainsi environ 10% de ses espaces ouverts d’ici le milieu du siècle si le taux de natalité actuel se maintient, car des terres seront nécessaires pour le logement, les infrastructures et les projets d’énergie solaire à grande échelle », rapporte Haaretz.
La production de 95% de l’électricité d’Israël avec des énergies renouvelables d’ici 2050 nécessitera une production d’énergie solaire allant de 56 à 134 gigawatts, 5 à 10 fois la consommation électrique de pointe actuelle. Une zone représentant huit fois la taille du lac de Tibériade devra être consacrée aux panneaux solaires. Ainsi dans de nombreuses régions, la perte d’espaces ouverts se traduira par une mise à l’épreuve des capacités de reproduction de nombreux animaux et plantes.
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Dans le domaine des transports, une augmentation de 178% du nombre de véhicules sur les routes est attendue, au cours des trois prochaines décennies. Cela signifie que dans 30 ans, le nombre de véhicules sur les routes devrait passer à environ 10 millions de véhicules, soit près de trois fois plus que le nombre actuel. La densité sur les routes sera similaire, si rien n’est fait, à la densité sur les routes de Bombay en Inde.
Pour le système de santé, l’étude signale que l’Etat devra anticiper d’ici 2050 l’offre d’environ 5 000 lits d’hôpitaux supplémentaires tous les dix ans. Il sera aussi nécessaire de recruter environ 7 000 médecins supplémentaires et pas moins de 13 000 infirmières supplémentaires chaque décennie également.
Le système éducatif devra quant à lui s’adapter d’ici 30 ans à une augmentation d’au moins 30% du nombre d’enfants en âge d’être scolarisés. Ce qui nécessitera d’ajouter 2,7 fois plus de salles de classe d’ici 2050. Impliquant parallèlement des investissements importants en ressources humaines (heures d’enseignements et nombre d’enseignants).
Des mesures à prendre des aujourd’hui
Par ailleurs, l’augmentation attendue de la population devrait également accroître la dépendance d’Israël vis-à-vis des importations alimentaires notamment en céréales mais aussi en légumes.
Autre enjeu et non des moindres, la consommation d’eau. Elle devrait passer de 2 200 millions de mètres cubes par an à plus de 3 500 millions mètres cubes dans la prévision basse, 4 000 millions de mètres cubes dans la prévision intermédiaire et 4 500 dans la prévision haute. Dans le même temps, l’approvisionnement en eau naturelle devrait être considérablement réduit en raison du changement climatique.
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Pour anticiper au mieux ces mutations et afin que le pays se prépare pour y parer, l’étude suggère certaines actions que le gouvernement israélien pourrait prendre dès maintenant. Comme notamment offrir des incitations financières aux petites familles plutôt que de payer des allocations familiales qui encouragent les naissances au sein des familles nombreuses, construire des logements plus denses « de bas en haut »dans les zones urbaines, arrêter la construction de maisons unifamiliales, encourager l’autonomisation des femmes et sensibiliser les Israéliens sur les enjeux de l’avenir de leurs enfants et celui de la société israélienne.Les chercheurs suggèrent aussi d’ajouter des bus, des voies prioritaires et des chauffeurs, ainsi que d’améliorer la fréquence des transports en commun en Israël. En plus de préconiser le recours au vélo comme aux Pays-Bas.