« Son dernier voyage avant la découverte de sa maladie fut pour Jérusalem » en décembre 2019, se souvient le père dominicain Jean Jacques Pérennès, directeur de l’Ecole biblique et archéologique française de Jérusalem (Ebaf). Jean Guéguinou s’est éteint le 21 juin à l’âge de 79 ans. Il était de fait très lié à l’institution et était président depuis 2009 de l’association Les Amis de l’École biblique et archéologique française. Dans son message, publié sur la page d’accueil du site de l’Ebaf, le père Pérennès n’a pas hésité à rendre hommage à celui qui fut « un soutien, une personnalité attachante, un ami ». Soulignant qu’« à côté d’une indéniable compétence professionnelle, il y avait l’homme, sensible, cultivé, attentif aux personnes (…). Un président efficace, dynamique, enthousiaste, toujours prêt à soutenir avec bienveillance les projets de l’École ».
Celui qui présida aussi l’association Les Amis de l’Abbaye d’Abu Gosh, et de L’association des œuvres du Saint Sépulcre de Jérusalem de France, a nourri en tant que diplomate et chrétien convaincu des liens indéfectibles avec la Terre Sainte et ceux qui l’habitent, depuis sa nomination en 1982 en tant que consul général de France à Jérusalem où il restera quatre ans. Un poste charnière au cœur d’une carrière diplomatique de haut vol, loin des frontières de sa Bretagne natale.
Homme de talent et de cœur
Né en 1941, Jean Guéguinou sera diplômé de Sciences Po, puis de l’ENA en 1967, et choisira de servir dans le corps diplomatique français. Ses premières années l’ont mené de l’administration centrale à l’ambassade de France à Londres (1969-1971) en tant que deuxième secrétaire, puis à différents cabinets ministériels, Affaires Etrangères, Défense nationale, Secrétariat d’État auprès du Premier ministre. Pendant cinq ans, de 1977 à 1982, il sera chargé de la sous-direction pour l’Afrique australe et l’océan indien
De ses années de consul général de France (1982-1986), le père Pérennès rappelle que « ce sera, de son propre aveu, un des plus beaux postes de sa carrière. Il y développe des contacts chaleureux avec plusieurs communautés religieuses, en particulier les bénédictins d’Abu Gosh et les dominicains du couvent Saint-Étienne ». Le journal La Croix convoque les propos d’André Chouraqui (1917-2007), traducteur de la Bible et qui fut vice-maire de Jérusalem, tenus à son égard : il fut « un des rares sinon le seul diplomate français à ce poste compliqué à avoir noué des relations de confiance tant avec les Palestiniens qu’avec les Israéliens ».
Diana Safieh, palestinienne de Jérusalem, dame de l’Ordre équestre du Saint-Sépulcre, et grande amie de Jean Guéguinou confirme qu’« il a su avoir des amitiés du côté palestinien autant que du côté israélien ». Et d’ajouter qu’il a aussi été « un homme qui a beaucoup aimé la Terre Sainte, les hommes mais aussi ce qu’elle représente dans le monde chrétien. Il a beaucoup aidé l’Eglise, les communautés religieuses ». Pour elle, « il représentait la France sous toutes ses formes : politiquement, intellectuellement et socialement. Il savait recevoir à la française, il aimait le contact des gens, il avait une profonde amabilité. Il était l’incarnation de la France avec sa philosophie, sa culture, et je crois que c’est un sentiment partagé par beaucoup de monde ».
Homme de culture
Jean Guéguinou sera, après un nouveau passage à l’administration centrale, nommé ambassadeur de France à Prague de 1990 à 1993, ambassadeur au Royaume-Uni de 1993 à 1998, et les deux années suivantes ambassadeur à Rome près le Saint-Siège. En 2000, il sera élevé à la dignité d’ambassadeur de France avant d’être nommé ambassadeur délégué permanent de la France auprès de l’Unesco (2002‐2006).
Ancien président du Conseil d’administration de l’Ecole du Louvre de 2004 à 2007, membre à partir de 2007 du conseil d’administration de l’agence France-Museums chargée de mettre à bien le projet du Louvre Abu Dhabi, inauguré en 2017, Jean Guéguinou fut aussi président de l’association Culturesfrance (2009-2010), œuvrant activement à la préfiguration de ce qui deviendra l’Institut français. A la tête depuis 2007 de la revue scientifique Versalia, publiée par l’association Les Amis de Versailles, Jean Guéguinou laisse incontestablement en plus de la foi, le témoignage d’un véritable homme de culture.
Il était Commandeur dans l’ordre de la Légion d’honneur, officier de l’ordre national du mérite et commandeur des Arts et Lettres et grand croix de l’ordre de Pie IX.
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