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Liban : l’Eglise maronite appelle à un vote massif le 15 mai

Christophe Lafontaine
5 mai 2022
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Le patriarche maronite Bechara Rai prononce un discours sur le Liban devant un large public réuni à la résidence patriarcale de Bkerké, dans la banlieue de Beyrouth, le 27 février 2021 (photo Bkerki Media).

Le 15 mai, les Libanais devraient élire leurs députés. Le patriarche maronite a pressé le 1er mai les citoyens à voter en nombre pour induire les mutations qu’ils espèrent. Un appel inlassablement répété ce dernier mois.


Les prochaines élections législatives libanaises sont prévues le 15 mai 2022. Selon le patriarche maronite, Bechara Raï, c’est assurément un rendez-vous à ne pas manquer pour le pays du Cèdre qui traverse une crise pluridimensionnelle chronique et où la classe politique doit faire face à des manifestations de grande envergure.

Dans son homélie dominicale du 1er mai, prononcée au sanctuaire de Notre-Dame de Harissa, et dont les propos ont été entre autres rapportés par Vatican News, le patriarche Bechara Rai a expliqué que la majorité des Libanais souhaitaient vivre dans « un Liban libre, démocratique et neutre, un Liban avec une identité historique, fondé sur la justice et l’égalité avec une armée et des institutions constitutionnelles ».

Et pour ne pas se faire voler ces élections, ou – comme le détaille Fides – pour « protéger leur droit à l’autodétermination et soustraire l’avenir du pays aux groupes qui visent à provoquer l’effondrement du Liban et à effacer son identité historique », le prélat maronite a enjoint les Libanais à se rendre en nombre aux urnes « pour dire au monde quel Liban ils veulent », et – précise l’agence de presse – « pour faire comprendre aux puissances mondiales et régionales que le peuple libanais rejette tout projet géopolitique visant à exproprier ou à hypothéquer l’indépendance de la nation libanaise ».

Vote, sanction et responsabilité

Le 10 avril, il avait déjà appelé les Libanais à faire de ce scrutin « un outil démocratique pour sanctionner ceux qui ont fauté et échoué » sans toutefois nommer ceux qu’il ciblait. « Même si ces derniers mois, il avait pointé le camp politique du président de la République Michel Aoun et son allié chiite, le Hezbollah », soulignait alors L’Orient-Le Jour. Six jours plus tard, à la veille de Pâques, la plus haute autorité spirituelle de la principale communauté chrétienne au Liban avait insisté sur la responsabilité qui incombait au peuple libanais à l’occasion du rendez-vous électoral du 15 mai.

« Si le peuple (…) ne choisit pas les forces capables de défendre l’entité du pays et son identité tout en restant fidèles aux martyrs de la cause libanaise, il sera tenu responsable du grand effondrement, et non pas la classe politique », avait-il alors lancé avant d’affirmer que « l’avenir du Liban dépend[ait] de la qualité de la majorité dans le nouveau Parlement ». 

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Pour le Patriarche, les Libanais en exerçant leur droit de vote doivent saisir leur chance de voir se renouveler les membres de la Chambre des députés du Liban. Le taux de participation sera déterminant car le prochain Parlement devra élire le nouveau président pour succéder à Michel Aoun, dont le mandat de six ans prendra fin en octobre 2022.

Pour autant, selon les observateurs, les partis du système dont la gestion du pays a été de plus en plus contestée ne devraient pourtant pas perdent trop de sièges : les factions alternatives, nées des mouvements populaires de contestation, n’ont pas réussi à former un front uni…

Confessionnalisme politique

Les élections législatives du 15 mai sont les premières après celles de mai 2018. Elles interviennent deux ans et demi après le début de l’effondrement économique du Liban en octobre 2019 et quand des centaines de milliers de Libanais sont descendus dans la rue pour protester contre la hausse des prix, la corruption endémique et la mauvaise gouvernance du pays. Depuis, le pays a plongé dans la pauvreté, sans électricité, sans médicaments, sans ramassage des ordures…

Le Liban est doté d’un parlement unicaméral, élu pour un mandat de quatre ans. Lors de l’élection du 15 mai, un total de plus d’une centaine de listes avec un millier de candidats – dont environ un quart serait issu de la société civile sans relation avec les partis traditionnels – sont en lice pour la législature de 128 sièges (64 chrétiens, 64 musulmans) conformément à la pratique libanaise du confessionnalisme politique. Les communautés religieuses libanaises répartissent les sièges réservés dans les différentes circonscriptions en fonction de leur poids démographique. La répartition des voix est proportionnelle. 

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A noter que depuis le début de la crise, les chrétiens du Liban – particulièrement les jeunes  émigrent en masse. Par voie de conséquence, leur affaiblissement démographique entame leur poids politique. Pour avoir une idée, un sondage du 26 avril effectué par Arab Barometer, indique que 48% des Libanais – sans distinction religieuse – encore présents envisagent d’émigrer rapidement. Un chiffre encore plus important chez les jeunes, puisque 63% d’entre eux affirment y songer.

Lever les obstacles qui ruineraient les élections

Le Patriarche maronite, dimanche dernier, a également appelé à ce que la campagne se déroule de manière pacifique et ordonnée. Le pays est depuis quelques semaines secoué après le naufrage d’une embarcation avec plus de 80 migrants clandestins au large de Tripoli. Une vague d’indignation s’est levée un peu partout. Le pays est aussi affecté par les tensions internationales et régionales. Le patriarche Bechara Raï n’a pas caché dimanche dernier son inquiétude en faisant référence à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, aux affrontements sur l’Esplanade des Mosquées à Jérusalem, aux incursions israéliennes en Syrie et au regain de tensions le long de la frontière libano-israélienne.

Dans le sillage des déclarations de leur patriarche, les évêques maronites qui ont tenu le 4 mai leur réunion mensuelle au siège patriarcal de Bkerké, présidée par le cardinal Béchara Raï, ont appelé à une participation active aux élections et demandé aux responsables politiques d’ôter tout obstacle du chemin des électeurs libanais, pour leur permettre de pratiquer leur droit constitutionnel librement.

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Le 4 mai, le chef de l’Onu, António Guterres, a également appelé à ce que les élections législatives libanaises du 15 mai soient « libres, équitables, transparentes et inclusives » dans un rapport au Conseil de sécurité de l’Onu, et a mis en garde contre la présence déstabilisatrice dans le pays du Hezbollah qui cristallise la vindicte des Libanais contre la classe politique…

António Guterres a déclaré que le maintien par le groupe terroriste du Hezbollah « de capacités militaires importantes et sophistiquées échappant au contrôle du gouvernement libanais reste un sujet de grave préoccupation ». Le chef de l’Onu a déclaré que l’implication continue du Hezbollah dans la guerre en Syrie voisine risquait également d’entraîner le Liban dans des conflits régionaux.

Il a appelé les pays de la région comme la Syrie et l’Iran ayant des liens étroits avec le Hezbollah à encourager son désarmement et sa transformation en « un parti politique uniquement civil ».

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