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L’accroissement numérique des haredim, un enjeu pour Israël

Cécile Lemoine
4 janvier 2023
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En moyenne, les femmes ultra orthodoxes ont 6,9 enfants, contre 2,3 pour les femmes juives non-orthodoxes ©David Cohen/Flash90     

Alors que les juifs ultra-orthodoxes vont représenter 16% de la population israélienne en 2030, la question de l'intégration des hommes, dont la vie est dédiée à l'étude de la Torah, à la vie économique du pays, est toujours un enjeu.


Avec 4% de croissance annuelle, la population juive ultra-orthodoxe d’Israël grandit plus vite que n’importe quel autre groupe de population des pays développés. Les femmes haredim (littéralement Craignant-Dieu), ont en moyenne 6,9 enfants.

Résultat, cette communauté devrait représenter 16% de la population israélienne en 2030, selon les chiffres du bureau israélien des statistiques, repris dans le rapport dédié à l’étude de ce segment de la société israélienne publié par l’Institut Israélien pour la Démocratie (IDI) le 2 janvier.

L’accroissement numérique des haredim est un véritable enjeu pour Israël. Alors qu’ils vont devenir l’une des forces démographiques majeures, ils sont peu intégrés à la vie économique et sociale du pays.

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De fait, leur mode de vie, tourné vers une application stricte des commandements de la Torah, les coupe de la société moderne et séculière : éducation uniquement religieuse, pas de service militaire… Une « culture d’enclave« , selon les termes du Dr. Gilad Malach, spécialiste de la communauté Haredi à l’IDI et co-auteur du rapport, qui touche aussi le monde économique : près d’un homme ultra-orthodoxe sur deux ne travaille pas.

« Une société de travailleurs et d’apprenants »

Sur les trois premiers trimestres 2022, ils étaient 53,3% à être employés, selon les données récoltées par l’IDI. « Après l’Holocauste, il y avait cette peur que le mode de vie Haredi disparaisse, expliquait Tzipora Gutman, directrice d’un centre pour filles en difficulté, lors d’une conférence en 2021. Les rabbins ont décidé que le moyen d’assurer la pérennité de la communauté était de faire en sorte que le plus d’hommes possible étudient la Torah. Résultat, dans les années 1990, les deux tiers des hommes Haredi ne travaillaient pas. »

Entre 2003 et 2015, la part des hommes ultra-orthodoxes actifs est passée de 36% à 50%. « La société ultra-orthodoxe est en train de passer d’une « société d’apprenants » à une « société de travailleurs et d’apprenants » », souligne Gilad Malach. Depuis 2015, ces chiffres sont cependant en stagnation.

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Lorsque les hommes étudient à plein temps dans une yeshiva kollel (une école religieuse), ils reçoivent une allocation d’environ 700 shekel (188€) par mois du gouvernement, mais elle n’est pas suffisante pour soutenir leur famille, nombreuse. Ce sont les femmes qui compensent : en 2022, elles sont 78% à avoir un travail, toujours selon l’IDI. Majoritairement employées dans le monde de l’éducation, et plutôt à temps partiel, les femmes haredi ont un salaire en moyenne 27% moins élevé que les homologues non-juives.

Une entreprise de haute technologie qui emploie des femmes ultra orthodoxes à Modiin Elit, 2009 ©Abir Sultan/Flash

A high tech company which employs ultra orthodox women in Modiin Elit. August 17, 2009. photo by Abir Sultan/Flash 90.

« Les hommes haredim qui décident travailler sont généralement mariés avec des enfants et ne peuvent pas se permettre d’être à l’école à plein temps, explique Nitsa Kaliner Kasir, vice-présidente de l’Institut Haredi pour les Affaires publiques. Actuellement, l’une des principales barrières à l’entrée sur le marché du travail pour les haredim est le manque de qualification académique. »

Entre intégration et isolement

En raison de leur faible taux d’emploi et niveaux de revenus, 44% des ménages ultra-orthodoxes vivent sous le seuil de pauvreté en 2022, selon l’IDI. « Étant donné la croissance continue de cette communauté, cette pauvreté a des effets macroéconomiques sur les recettes fiscales, le paiement des allocations, la consommation, et le PIB « , explique Gilad Malach.

L’intégration de la population haredi se joue à coups de politiques publiques. Le précédent gouvernement, où aucun parti ultra-orthodoxe n’était représenté, a tenté de mettre les ultra-orthodoxes au travail en supprimant les allocations versées à 20 000 foyers pour les frais de crèche de chaque enfant de moins de 3 ans.

Des hommes juifs ultra orthodoxes participent à un salon de l’emploi à Jérusalem, 2011 ©Lior Mizrahi / flash90

De retour en force dans la nouvelle coalition à droite-toute menée par Benyamin Netanyahou, les partis haredim ont déjà fait savoir qu’ils militeraient pour un doublement de l’allocation distribuée aux étudiants des yeshivot, la faisant passer de 700 à 1 300 shekels. Soit plus que celle versée aux soldats des unités non-combattantes. La mesure gênerait un coût de 1,5 milliard de shekels supplémentaires par an pour les contribuables israéliens.

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« L’augmentation de ces allocations encouragera davantage de jeunes à ne pas travailler, car il est plus pratique de rester à la yeshiva, a averti l’ancien Premier ministre Naftali Bennett dans une publication Facebook début novembre. Les ultra-orthodoxes sont nos frères, et ils sont la population qui croît le plus rapidement en Israël : leur responsabilité envers l’État doit augmenter en conséquence. »


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