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Violences dans le quartier chrétien de Jérusalem

Cécile Lemoine
27 janvier 2023
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Capture d'écran d'une des vidéos de l'attaque du restaurant Taboon and Wine, sur la rue de la porte Neuve, dans le quartier chrétien de Jérusalem, le 26 janvier

Un groupe de jeunes juifs radicaux s'est attaqué à un restaurant du quartier chrétien de Jérusalem dans la soirée du 26 janvier. S'il n'était pas explicitement dirigé contre les chrétiens, l'épisode s'inscrit dans un contexte de violences accumulées.


Des chaises et des tables qui volent avec violence à travers la rue de la porte Neuve. Jeudi 26 janvier vers 22h30, un groupe de juifs radicaux s’est attaqué à un restaurant de cette rue habituellement tranquille du quartier chrétien de la vieille ville de Jérusalem, chassant la douzaine de clients attablés là, avant de renverser tables et chaises, puis de les utiliser comme projectiles.

L’épisode, dont des extraits ont largement été partagés sur les réseaux sociaux, a duré un peu moins de dix minutes. « La police a fini par arriver, mais elle n’a rien fait », relate la propriétaire du Taboon and Wine, le restaurant pris à partie.

Sur les vidéos, la jeunesse des membres du petit groupe frappe. Des adolescents pour la plupart, venus participer à la manifestation hebdomadaire organisée par Baruch Marzel, le fondateur d’Otzma Yehudit, un parti de droite radicale et religieuse aujourd’hui dirigé par le sulfureux ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben-Gvir.

Alors que le cortège traverse habituellement la porte de Damas, cette fois-ci, la police l’a refoulé. Par peur d’une escalade de violence : le même jour, un raid de l’armée israélienne dans le camp de réfugiés de Jénine, en Cisjordanie occupée, a provoqué la mort de neuf palestiniens. « Cela fait deux mois que nous faisons cela tous les jeudis, mais hier le gouvernement a plié devant le Hamas et l’a empêché », s’est insurgé Baruch Marzel, cité dans le Jerusalem Post.

Drapeaux à la main, les manifestants sont donc entrés dans la vieille ville par la porte Neuve, avant de prendre le restaurant pour cible. « Nous étions le seul de la rue encore ouvert. C’est tombé sur nous, raconte la gérante, qui décrit des scènes d’une grande violence. Ils étaient 40 contre 5, hurlaient « Mort aux arabes », « Retournez en Syrie »… »

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La rue étant une des artères principale du quartier chrétien, l’Assemblée des Ordinaires Catholiques de Terre Sainte a réagi dans la matinée du vendredi 27 janvier avec un communiqué condamnant l’attaque : « Ce n’est que le dernier épisode d’une série de violences religieuses qui touche les symboles de la communauté chrétienne et au-delà. Nous exprimons notre préoccupation face à l’escalade de la violence dans la Ville Sainte. (…) Nous demandons à la police d’appliquer les sanctions adéquates aux auteurs de ces actes afin d’éviter la répétition de tels actes insensés. Jérusalem doit rester la patrie des croyants de toutes les confessions et non l’otage de groupes radicaux. »

« Les chrétiens sont isolés »

Sur les réseaux sociaux, nombreux sont ceux qui se sont empressés de dénoncer une énième « attaque contre la présence chrétienne » à Jérusalem, certains allant même jusqu’à parler de « pogrom ». Dans ce cas précis, ce n’est pas tant les chrétiens qui ont été pris pour cible, que la présence non-juive. Le parti Otzma Yehudit (Force juive en hébreu), est le successeur idéologique du kahanisme, un courant ultra-nationaliste qui promeut la suprémacie juive sur le pays. Ses partisans sont les mêmes que ceux qui défilent à Jérusalem le jour de la fête des drapeaux, et qui s’en prennent aux commerçants du quartier musulman.

L’arrivée de son dirigeant, Itamar Ben-Gvir au poste de ministre de la Sécurité nationale dans le nouveau gouvernement de Benyamin Netayahou, pose question quant à la récurrence de ces violences. « Le premier mois de l’année 2023 n’est pas encore terminé qu’on a déjà recensé quatre attaques : la vandalisation d’un cimetière à Jérusalem, des graffitis « Mort aux chrétiens » au couvent arménien, le sacage d’une salle paroissiale maronite en Galilée, et cet épisode de violence à la porte Neuve », contextualise le père Nikodemus Schnabel, vicaire auprès du patriarche Latin de Jérusalem.

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« Il est trop tôt pour dire ce qui va se passer avec le nouveau gouvernement, nuançait ce même 26 janvier au soir Mgr Pizzaballa, le patriarche latin de Jérusalem, lors d’une conférence organisée par le Rossing Center pour l’éducation et le dialogue et l’Institut de Jérusalem pour la recherche politique. Les chrétiens sont le cadet de leur soucis, tandis que les juifs les plus radicaux se sentent certainement protégés ou soutenus. Cela génère un manque de confiance dans nos communautés. Les chrétiens sont isolés. Pas seuls, mais isolés. »

Organisation israélienne investie dans le dialogue interreligieux, le Rossing Center a prévu de documenter les gestes antichrétiens et de publier régulièrement un décompte, chose qui n’a été faite que partiellement auparavant et qui permettra de prendre la mesure d’une montée ou non des violences à l’égard des communautés chrétiennes à Jérusalem.

Un rassemblement pour dénoncer ces violences est prévu le 28 janvier à 18h devant le restaurant Taboon and Wine. Un représentant du patriarcat Latin de Jérusalem devrait y participer.

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