L’image de couverture montre la « barrière de sécurité ». Il aurait été bien difficile de mettre un visage de colon pour illustrer les pages qui traitent du sujet. En montrant le mur qui serpente littéralement, nous voulions illustrer qu’il n’y a pas de contours qui soient simples dans ce pays, pas même ceux de la colonisation.
Mais afin d’être précis dans la description de la photo, il a fallu se pencher sur les cartes de Jérusalem et ses limites. Deux heures de consultation plus tard, il apparaît que tout de nouveau est très compliqué et qu’il n’y a pas de consensus sur la question. Le site de la municipalité de Jérusalem se garde (au moins en anglais) d’éclaircir sa position. En croisant et recroisant les cartes et les données : nous sommes bien dans Jérusalem et ce mur entoure le camp de réfugiés de Shuafat. Ainsi au cœur de la Ville Sainte il y a un camp de réfugiés ! En fait il y a en a deux, le second étant le camp d’Anata tout proche. Leurs histoires sont différentes mais ils partagent d’être tout ou partie cernés par le mur.
Des réfugiés d’où ? Ceux du camp de Shuafat, actuellement 20 000 à 25 000 habitants, sont les descendants des 1 500 Palestiniens « évacués » en 1967 du quartier juif de la Vieille Ville annexée et dont les maisons ont été détruites pour agrandir le quartier et permettre la construction de la grande place devant le Mur occidental (Kotel). Leur situation administrative est incroyablement compliquée comme le rapporte Ir Amim, une organisation israélienne qui concentre son action d’observation sur la ville de Jérusalem.
Les uns sont détenteurs de l’identité de Jérusalem (10 à 15 mille), les autres non. Certains sont enregistrés comme réfugiés (10 000). «À l’intérieur du camp, l’ONU fournit des services de base aux réfugiés, alors que la municipalité de Jérusalem et l’État d’Israël sont obligés de subvenir aux besoins de tous les autres résidants de Jérusalem à l’intérieur du camp. Les résidants du camp ne payent pas de taxes municipales puisque l’ONU s’occupe de l’infrastructure de base telle que la collecte des ordures et l’entretien des routes à l’intérieur du camp ; il est également responsable de la fourniture de l’éducation et des services sociaux de base aux réfugiés. Les résidants du camp qui ne sont pas des réfugiés ont droit aux mêmes services d’éducation et d’aide sociale que les autres résidants de la ville.»
Plus on entre dans le détail, plus la question de Jérusalem apparaît dans sa complexité. Les maisons que l’on voit à l’horizon sont celles de Pisgat Zeev, au regard du Droit International : une colonie israélienne sur le territoire dévolu à la Palestine. Mais peut-on envisager de démanteler ce type de colonie, banlieue immédiate du tissu urbain ? Il serait juste de ne pas le faire comme il serait juste de donner la liberté aux habitants de Shuafat plutôt que de les parquer dans leur camp de réfugiés. En Terre Sainte des Palestiniens et parmi eux des chrétiens sont prêts à d’importantes concessions pour vivre en paix à côté des Israéliens mais ils attendent qu’elles puissent être faites dans un esprit de justice et non dans un rapport de forces permanent.
En attendant que les politiques cessent leur bras de fer, Jérusalem n’envie rien à Berlin.