Dans la ville de Jérusalem, il y a une oasis de paix, où l’on fait mémoire de la guérison du paralytique par Jésus et de la grotte où auraient vécu les parents de la Vierge Marie, et sur laquelle fut construite l’église Sainte-Anne. Que peut-on vivre avec un groupe de pèlerins dans ce lieu de respiration où la belle église romane est agrémentée d’un jardin ?
Sans doute, avant d’arriver à Sainte-Anne, faudrait-il s’arrêter quelques instants à la porte des Lions, située juste en face du mont des Oliviers, pour y lire le début du chapitre 5 de saint Jean : « Or, à Jérusalem, près de la porte des brebis, il existe une piscine qu’on appelle en hébreu Bethzatha. » À l’époque de Jésus, une grande quantité d’ovins était parquée près du Temple en vue des sacrifices si bien que la porte de la muraille voisine prit le nom de « porte du petit bétail ».
« Petit bétail » se dit probaton en grec. Aujourd’hui lorsque les chrétiens appellent le site « piscine probatique », ils font référence à la guérison du paralytique et, sans le savoir, aux sacrifices du Temple. Ironie de l’histoire, aujourd’hui la porte du petit bétail est rebaptisée « porte des Lions » à cause d’un sultan mamelouk qui avait le lion pour blason. Elle est aussi appelée « porte Saint-Étienne ».
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Quelques pas et nous voici arrivés dans le jardin du domaine des pères blancs, avec les ruines de la piscine probatique et l’église croisée Sainte-Anne. Territoire français depuis 1856, car offert à Napoléon III par le sultan en remerciement de son soutien lors de la guerre de Crimée. Nous allons poursuivre notre lecture de saint Jean, assis à l’ombre dans le jardin, après avoir reçu quelques explications sur ce lieu. D’abord l’importance de la réserve d’eau et du dispositif hydraulique ; une digue et deux bassins afin de capter l’eau de pluie qui s’écoule dans le vallon pour l’acheminer vers le Temple. L’eau venait purifier le Temple du sang des sacrifices d’animaux. Au fil du temps, la ville se développant, ces bassins furent abandonnés au profit de “la piscine d’Israël”. On y érigea alors un sanctuaire païen d’eaux guérisseuses. Le lieu était peut-être dédié aux dieux grecs, et à Sérapis, dieu du Proche-Orient gréco-romain. Un lieu d’espoir pour les aveugles, les boiteux et les paralysés, qui attendaient le bouillonnement de l’eau pour s’y précipiter et être guéris. Enfin nous ne pourrons pas faire l’impasse sur l’époque byzantine et les quelques vestiges qui demeurent.
Dans le récit de Jean, on retrouve les eaux et les portiques caractéristiques d’un sanctuaire de guérison. Nous nous figurons la scène. Jésus renouvelle la relation de l’homme malade au divin, telle qu’elle était pratiquée dans le sanctuaire païen. Le paralytique, juif au demeurant puisqu’on le retrouvera plus tard au Temple, ne parvient pas à entrer dans le bain. C’est Jésus lui-même qui se substitue au traitement thermal.
Sans doute faudra-t-il laisser chacun dans une déambulation méditative au milieu des ruines de la piscine avant de se retrouver et d’aborder la deuxième visite du site.
Nous voilà devant l’église Sainte-Anne. Lorsque les Croisés arrivent au XIIe siècle, la basilique byzantine est en ruines. Les Croisés construisent une petite chapelle à la mémoire du paralytique au cœur des ruines, puis à côté, ils élèvent une grande église dédiée à Marie, s’appuyant sur la tradition apocryphe qui situait ici la maison de Joachim et Anne et la naissance de Marie. À la fin du XIIe siècle, l’église fut transformée en école coranique par Saladin comme en témoigne l’inscription du tympan. Passé le seuil, on est saisi par la majesté et l’austère pureté de l’architecture intérieure et l’extraordinaire qualité acoustique.
Voici un lieu où peuvent être confiées les générations qui nous ont précédés. Rendre grâce pour la vie reçue… Qu’il y ait de bons chanteurs ou qu’il n’y en ait pas, aucun groupe ne résiste à la joie de venir dans le chœur faire résonner un hymne, hymne à la Vierge évidemment ! ♦
Dernière mise à jour: 06/05/2024 14:42