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Rosh Hashana : ce soir les Juifs célèbreront l’année 5784 !

Olivia Jeanjean
15 septembre 2023
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Ils sont des milliers réunis chaque soir au mur des lamentations pour les prières de Selichot. Ici le 15 Septembre 2023. ©Arie Leib Abrams/Flash90

Dans quelques heures, les Juifs du monde entier s’apprêteront à tourner une nouvelle page de leur calendrier. Rosh Hashana donne le coup d’envoi des célébrations juives de l’année. Elle est aussi l’occasion pour approfondir et repenser sa relation avec Dieu. Terre Sainte Magazine retrace pour vous les us et coutumes de cette fête.


Le calendrier grégorien nous indique que nous en sommes en l’an 2023, mais pour le calendrier luni-solaire hébraïque nous sommes à la fin de l’an 5783. Pour trouver une réponse à cette divergence chronologique, il faut remonter à l’origine de l’histoire juive, qui débute selon le livre de la Genèse (« Beréshit » en hébreux, qui signifie commencement) en l’an -3761 du calendrier grégorien. Qui a dit que l’histoire et les mathématiques étaient inconciliables ?

Cette datation, établie par le patriarche Hillel II, remonterait au IVe siècle, époque où les autorités rabbiniques fixaient les dates du calendrier juif sur la base d’observations météorologiques, agricoles et astronomiques. De ces analyses cosmiques découle la nature lunaire du calendrier juif, contrairement au calendrier grégorien qui suit le cycle solaire. Ainsi, chaque mois débute avec la nouvelle lune, et la journée commence à la nuit tombée.

Les bougies jouent aussi un rôle important dans les rituels de Rosh Hashana. Elles accompagnent les fidèles dans leurs prières. Ici des Juifs récitent les prières du Selichot (prières du pardon) dans une synagogue du village de Kadita, situé dans le Nord-Est de la Galilée, le 22 Septembre 2019. ©David Cohen/Flash90

Rosh Hashana débute le premier jour de Tishri, premier mois de l’année civile et septième de l’année religieuse.

Pour comprendre la signification de Rosh Hashana, il faut aussi revenir sur le sens de sa dénomination. En hébreux, Rosh signifie « tête » ou « chef » (rosh étant le titre donné au rabbin d’une yeshiva), ainsi Rosh Hashana symbolise « la tête de l’année », et tout comme la tête contrôle le corps, les jours qui suivent la nouvelle année doivent nous orienter sur le droit chemin. Alors en ce premier jour de l’an, les Juifs célèbrent Dieu, créateur de l’Univers, père d’Adam et Eve, et le prient de leur accorder la prospérité et la bénédiction.

Une mise à l’épreuve du peuple juif

Les dix jours qui séparent Rosh Hashana de Yom Kippour, la fête du Grand Pardon, sont appelés Jours de pénitence (en hébreux « Yamin Noraïm », littéralement les jours de la crainte). Comme leur nom le suppose, durant ces dix premiers jours de l’année, Dieu évalue le comportement et la piété de chacun, dont les actes influenceront son jugement et le sort qu’il lui réserve pour la période à venir. L’année juive ne débute donc pas dans la joie des festivités mais plonge les fidèles dans la crainte de Dieu par cette semaine de repentance, qui culmine le 10 de Tishri, jour de Yom Kippour, moment de l’expiation des péchés considéré comme jour le plus saint de l’année.

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L’appel du shofar : invitation à la prière

La Torah se réfère au premier jour de l’an sous le nom de Yom Terouah, le jour de la Sonnerie du Shofar : « Au septième mois, le premier jour du mois, il y aura pour vous une convocation sainte : vous ne ferez aucun travail. Ce sera pour vous le jour de la sonnerie » (Livre des Nombres, psaume 29, versets 1 à 6).

Élément indispensable de la tradition juive, le shofar est un instrument fabriqué à partir de la corne d’un animal cacher, souvent le bélier. Il retentit de 100 manières différentes durant les deux jours de Rosh Hashana. Ses tonalités sont encadrées par une halakha (loi) très précise, qui détermine trois types de son : le tekiah (un son qui fait penser à un long gémissement), les shevarim (série de trois petits sons gémissants) et la terouah (neuf sons saccadés comme des sanglots). Ces cris plaintifs font écho à la Ligature d’Isaac, passage biblique où Abraham offrit un bélier à la place de son fils en sacrifice à Dieu.

L’observance de Rosh Hashana est donc principalement guidée par la sonnerie du shofar: à chaque fois qu’il retentit, le son de sa corne rappelle aux fidèles la nécessité de chercher le pardon de Dieu.

Un Juif orthodoxe souffle dans un shofar, au mur des Lamentations le 10 Septembre 2023. ©Yonatan Sindel

Comme le rappelle le psaume du livre des Nombres, durant Rosh Hashana les Juifs sont exemptés de travail, ils se consacrent uniquement à la prière. Toutefois, en parallèle des offices à la synagogue, ils se retrouvent aussi pour partager des repas festifs. Plusieurs aliments spécifiques rentrent en ligne de compte dans la préparation des plats à Rosh Hashana. Dans certains cas, il arrive même que le repas soit précédé d’un seder, cérémonie au cours de laquelle les aliments symboliques sont bénis avant d’être consommés.

Tout d’abord, la hallah (ou challah), miche de pain ronde dont la circularité symbolise le cycle de l’année et des saisons, est trempée dans du miel et non dans du sel comme le veut la coutume du shabbat. Cette pratique culinaire est reproduite lors du Chabbat Chouva (le samedi qui précède Kippour) et pendant Soukkot. Le repas commence ensuite avec des tranches de pommes également imbibées de miel. Le miel exprime le souhait d’une bonne année, raison pour laquelle son utilisation est omniprésente lors des rituels culinaires qui inaugurent le nouvel an. Les pommes symbolisent quant à elles le souhait d’une année douce.
Parmi les plats traditionnellement mangés figure aussi la tête d’un poisson ou d’un bélier, exprimant cette fois le souhait de garder sa tête, soit son esprit, en cohésion avec Dieu.

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Au dessert, la grenade occupe une place centrale sur la table de Rosh Hashana, les Juifs voyant dans ses nombreuses graines autant de mérites à recevoir de Dieu. Un autre aliment important, davantage présent dans la culture ashkénaze, est le tzimmes, un plat sucré à base de carotte dégusté à cette occasion au regard de sa signification en yiddish, merren, qui correspond au verbe « augmenter », renvoyant au souhait de vivre une année placée sous le signe de l’abondance.

Les trois ingrédients traditionnels de Rosh Hashana réunis : la grenade, le miel et la pomme. Le 14 Septembre 2023. ©Miriam Alster/ Flash90

Le souhait apparaît donc comme un leitmotiv dans lequel chacun des rituels prend sens, qu’il soit culinaire ou religieux. Afin de les exaucer, les multiples offices organisés sont autant d’occasion pour adresser ses prières à Dieu, l’office le plus important étant celui au mur des Lamentions le vendredi soir. Cette année, des dizaines de milliers de fidèles sont attendus au Kotel : « Des dizaines de milliers de personnes sont arrivées au cours du mois d’Eloul (dernier mois du calendrier hébraïque) pour les prières traditionnelles Selichot sur la place du Mur Occidental, avec le thème de prière Accordez la paix parmi nous ». Les prières du Selihot sont récitées 40 jours avant le début du nouvel an juif, ce sont des offices liturgiques au cours desquels est implorée la clémence divine, permettant ainsi de se préparer aux dix jours de pénitences qui suivent Rosh Hashana.

Afin d’anticiper cette venue en masse, les autorités ont vidé le mur des papiers glissés au cours de l’année pour laisser la place aux prochaines doléances. Le grand nettoyage du mur occidental a lieu deux fois par an, avant Pessah (Pâques juive) et Rosh Hashana. Les morceaux de papiers sont ensuite enterrés au Mont des Oliviers.

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