“Les bombardements sont proches et il n’y a plus de farine, plus de farine de blé.” C’est par ce bref message que le père Youssouf Asad, vicaire de la paroisse latine de la Sainte-Famille de Gaza a donné des nouvelles le 19 février. Les photos publiées régulièrement sur Facebook le montre le visage fondu et fatigué. “L’armée mène des opérations en ce moment dans le quartier Zeitoun, où sont situées les églises », complète le père Gabriel Romanelli, curé de Gaza coincé à Jérusalem depuis le 7 octobre en contact quotidien avec sa paroisse, en mode survie ces dernières semaines. On arrive à fabriquer du pain tous les deux ou trois jours, mais c’est du pain noir, parce que la farine n’est pas raffinée.«
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Si les Églises ont reçu un peu d’aide humanitaire fin décembre par l’entremise de la Jordanie, la situation s’est depuis détériorée : 600 personnes sont toujours réfugiées dans l’enceinte de la paroisse latine, et quelque 300 autres dans les locaux de la paroisse grecque-orthodoxe, alors qu’aucun convoi humanitaire n’a atteint le nord de Gaza depuis le 23 janvier. Leur acheminement depuis les terminaux du sud de l’enclave est compliqué par les combats, les bombardements, et le pillage. La famine rampe. L’UNRWA estime qu’un enfant sur six souffrirait de malnutrition dans le nord.
Dans les paroisses, les provisions s’amenuisent. “La nourriture est rationnée depuis longtemps et on a supprimé la messe de l’après-midi pour économiser les hosties, fabriquées maison, et le vin”, poursuit le père Gabriel. « On manque de tout. Le marché est vide, souffle sœur Nabila, directrice de l’école du Rosaire de Gaza réfugiée à la paroisse latine. Parmi le peu de choses qu’il reste, tout est plus cher : un kilo de tomate coutait 1 euro avant la guerre et maintenant c’est presque 10 euros. » Le 25 février, un don des associations baptistes a permis la préparation d’un repas chaud : riz, pois-chiche et quelques légumes.
Cas d’hépatite
Le manque de nourriture est propice au développement de maladies. « On nous a rapporté des centaines de cas d’hépatite, dont au moins trois, deux enfants et un adulte, chez les gens réfugiés dans les églises. Or c’est une maladie contagieuse qu’on traite très bien avec des médicaments », alerte Bassim Khoury, PDG de Pharmacare, entreprise palestinienne qui fabrique et distribue des produits pharmaceutiques. Gaza représentait 20% de son activité et il verse toujours le salaire de ses 21 employés gaziotes.
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À Noël, cet industriel chrétien à succès qui s’est toujours soucié des gens dans le besoin, a coordonné et financé la livraison de repas chauds aux trois Eglises de Gaza (anglicane, latine et orthodoxe) : des barquettes de riz accompagné de kebab. « C’était la première fois qu’ils mangeaient de la viande depuis le 7 octobre, raconte l’entrepreneur qui a depuis fait de ces repas un rendez-vous hebdomadaire : « Des hommes d’affaires chrétiens se sont d’abord relayés pour financer 885 repas chauds une fois par semaine, avant que des ONG ne prennent le relai. »
Au total, près de 15 000 repas ont été distribués, incluant l’hôpital anglican al-Alhi, et un centre de l’UNRWA. Diverses institutions chrétiennes tentent d’apporter de l’aide à la communauté en autarcie. Le Patriarcat latin de Jérusalem continue de payer le salaire de ses employés. La Mission Pontificale pour la Palestine fournit une aide financière à la paroisse grecque-orthodoxe. L’ONG Caritas coordonne la distribution de kits de soin et d’hygiène.
« Il y a beaucoup de donations, mais le problème, c’est le manque de produits sur place. Aujourd’hui on ne trouve plus de riz dans le nord de Gaza », souligne Bassim Khoury dont l’inquiétude perce à travers la voix grave :« Pour l’instant la communauté chrétienne ne meurt pas de faim, mais ça ne sera plus le cas si rien n’est fait d’ici une semaine. »
« Rester près de l’autel »
L’attente d’un cessez-le-feu ne s’est jamais faite aussi pressante :« Aujourd’hui, la priorité, c’est l’arrêt de la guerre, un cessez-le-feu, une trêve, l’échange des otages et des détenus, appelle Mgr William Shomali, vicaire patriarcal latin pour Jérusalem et la Palestine dans une interview à Vatican News. C’est le moyen le plus sûr de faire entrer des camions de nourriture en plus grand nombre. »
Malgré les difficultés, les gens restent à la paroisse.« La situation est difficile partout, il n’y aucun endroit sûr à Gaza : plus de 90% des chrétiens ont perdu leur maison, explique sœur Nabila, dont l’école située au sud du quartier Zeitoun a subi de gros dégâts à cause des bombardements israéliens. « C’est mieux de rester ici, près de l’autel », ajoute la religieuse.
Rosaire et messe matinaux, préparation du pain pour les enfants, tâches quotidiennes… La vie continue, dans un semblant de normalité. Le père Youssouf organise la vie spirituelle : un baptême et huit premières communions ont été célébrés en ce début d’année… « Ce sont des personnes de grande foi, confie le père Gabriel dans une interview à l’agence Fides à l’occasion de la fête de saint Porphyre, évêque de Gaza et patron de la paroisse grecque-orthodoxe. Elles attendent et supplient que ce chemin de croix, ce calvaire de tous les citoyens se termine, avec la libération de tous ceux qui sont privés de liberté, d’un côté et de l’autre, et que les blessés, des dizaines de milliers, plus de 69.000, soient guéris, et que les morts soient enterrés et que l’on puisse pleurer sur leurs tombes. »
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