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Repenser le dialogue avec le judaïsme et Israël après la guerre – TSM 691

Marie-Armelle Beaulieu
1 mai 2024
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Cette guerre entraîne l’Etat d’Israël et une partie du judaïsme sur des voies où on ne les attendait pas. Il faudra en prendre acte.


Les mots manquent pour décrire avec justesse ce nous vivons. Les informations que vous entendez, celles que vous retenez, sont en deçà de la réalité. Personne n’est en mesure d’embrasser la somme des souffrances. La déflagration se fait sentir bien au-delà du territoire. Preuve en est, la hausse vertigineuse des actes d’antisémitisme dans le monde.
Les émotions sont trop à fleur de peau pour réussir à expliquer raisonnablement comment, victimes de terrorisme le 7 octobre, les juifs d’Israël se voient accusés de devenir des bourreaux. Dans le même effet de souffle, les relations entre croyants – juifs, chrétiens et musulmans – sont bouleversées dans le monde entier.
Une nouvelle fois on n’entend trop peu de voix musulmanes se désolidariser de la barbarie du Hamas. Une nouvelle fois, ceux qui défendent le droit à la résistance palestinienne feignent d’ignorer la haine des juifs parce que juifs.
Ce qui est facile de dire s’agissant de l’islam et des musulmans ne l’est pas des juifs et du judaïsme. Pourtant cette guerre entraîne l’Etat d’Israël et une partie du judaïsme sur des voies où on ne les attendait pas.
Que la relation avec les USA soit mise à l’épreuve, qu’Israël puisse être accusé de génocide, que le pape François soit accusé de jeter aux orties 60 ans de dialogue, parce que le même jour il a reçu des familles d’otages israéliens et des familles ayant des proches à Gaza, sont autant de signes d’un bouleversement à l’aune duquel il faudra probablement repenser le dialogue.
Probablement son renouvellement et son approfondissement devront-ils être conduits non en diaspora mais en Israël. Non en Europe où les juifs sont minoritaires et où nous pensons nos relations à l’ombre de l’holocauste, mais en Israël où le judaïsme tend à se vivre comme exclusif.
Si des millions de juifs aux États-Unis questionnent le judaïsme en Israël, si, à l’intérieur de la société israélienne, avant la guerre, la contestation du gouvernement le plus à droite de l’histoire du pays a duré 39 semaines, alors il faut refuser que nos questionnements sur ce que devient Israël ne se soldent par un procès en antisémitisme ou en antisionisme. L’antisémitisme est trop grave pour devenir la tarte à la crème qui nous réduit au silence et laisse Israël sombrer.
La bonne nouvelle, c’est que des voix juives et israéliennes sont prêtes à franchir ce nouveau cap qui nous grandira tous. Je pense à Karma Ben Johanan, signataire d’un article (en anglais) dont le titre à lui seul entrebâille la porte et nous lance un défi : « Il y a une bonne et une mauvaise façon pour les catholiques de critiquer Israël ». Cherchons la bonne.

Dernière mise à jour: 01/05/2024 12:16

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