Le couvent de la Flagellation, siège du Studium Biblicum Franciscanum,
se trouve dans un quartier de Jérusalem dont l’histoire est ancienne. À partir de témoignages archéologiques allant de la période hasmonéenne jusqu’au Moyen Âge, ce lieu nous aide à relire l’histoire de la ville et à en resituer les éléments dans le contexte évangélique.
À quoi le couvent de la Flagellation ressemblait-il dans les années 1920, c’est-à-dire au moment de la fondation du Studium Biblicum Franciscanum ? Les antiquités et vestiges du sanctuaire de la Flagellation et de la chapelle de la Condamnation nous permettent de mieux comprendre certaines périodes de l’Histoire.
Pour situer les témoignages archéologiques découverts au sein de la propriété franciscaine, on a recours à un plan du quartier établi par le père Bellarmino Bagatti (1). “Le quartier de la Flagellation, qui s’étend aujourd’hui sur 30 à 50 m de large sur 102 m de long, n’a été fouillé et étudié que partiellement, et par étapes, de 1838 à 1928… Je me suis efforcé de vérifier tous les détails minutieusement, là où c’était possible, de manière à me faire une idée relativement précise de l’évolution de la roche jusqu’à son stade actuel, tout comme des éléments architectoniques et des céramiques découverts lors des fouilles et conservés au musée lapidaire.”
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Dans les zones A-B, le dallage ou pavage romain a été identifié. On le trouve en d’autres secteurs de la ville et on le fait remonter à l’époque romaine de l’Aelia Capitolina, où la ville de Jérusalem fut profondément transformée par l’empereur Hadrien qui lui rendit visite en 130 ap. J.-C. Les pavés disposés étaient destinés à créer une grande place, comportant un arc de triomphe pour honorer l’empereur, comme cela peut se voir à la Porte de Damas, anciennement appelée Porte de la Colonne. La Flagellation comporte in situ de plus grandes portions de dallage, découvertes à différents moments entre la fin du XIXe et le début du XXe siècle. De nombreux chercheurs les ont étudiées. Le bassin voisin du Strouthion, avec ses marches, se trouve aussi dans la zone de la Flagellation, et dans le couvent de l’Ecce Homo.
La lettre B indique la bordure ou le stylobate d’un complexe de colonnade nord-sud. Bagatti écrit encore : “…le sol est délimité par une magnifique bordure de pierre, d’1 m de largeur, qui s’étend du nord au sud et s’achève par un piédestal… Il ne peut s’agir que d’un stylobate ou d’un soubassement de colonnade.” Mesurant 17 m de long, il traverse la majeure partie de la zone dallée.
L’une des caractéristiques topographiques de Jérusalem, ce sont les affleurements rocheux qui se trouvent en divers endroits de la ville et dans certains bâtiments anciens. Dans ce quartier, on en remarque au moins trois qui se caractérisent par : des entailles, des cavités pouvant servir de vasques et des emplacements polis et creux destinés à contenir des jarres d’eau. Les lettres C-E-F-H indiquent que la roche émerge des dalles – roche qui est d’ailleurs visible en d’autres endroits.
La lettre G indique que la roche est adjacente à certains ouvrages situés à proximité de la forteresse Antonia. C’est au printemps 1983 qu’ont débuté, sur notre site, les travaux de rénovation de l’Aula Magna, qui allait devenir ultérieurement l’Aula B. Bagatti et qui, une fois réalisée la nouvelle Aula Magna, allait permettre de disposer d’une place suffisante pour agrandir la bibliothèque. Les travaux ont été réalisés par les frères Stanislao Loffreda et Eugenio Alliata qui ont signalé de nombreuses entailles dans la roche et la présence de vestiges de cavités d’époques byzantine tardive et arabe.
L’une des caractéristiques topographiques de Jérusalem, ce sont les affleurements rocheux qui se trouvent en divers endroits de la ville et dans certains bâtiments anciens.
On trouve pas mal de traces de tabulae lusoriae sur le dallage romain du Lithostrotos, et les jeux représentés sur bon nombre de ces dalles renvoient à une partie du récit évangélique de Jn 19. Ces jeux sont variés, puisque certains remontent à la société gréco-romaine de l’époque. On doit attirer l’attention particulièrement sur l’inscription réalisée dans la pierre au moment de la visite impériale en 130 ap. J.-C. Une partie de cette inscription se trouve dans notre musée depuis 1903 ; l’autre a été découverte inopinément et de façon étonnante en 2014, et a rejoint, en 2016, une exposition sur la visite de Jérusalem par Hadrien, installée au Musée d’Israël. Les deux inscriptions ont été réunies à cette occasion.
Les étapes
On peut résumer brièvement ainsi les étapes ayant contribué à identifier le site du Studium Biblicum Franciscanum au lieu de la Flagellation :
a) La phase hasmonéenne-hérodienne (IIe-Ier siècles av. J.-C.) représentée par les escaliers du bassin du Strouthion, l’attestation numismatique et la proximité de la zone archéologique du couvent de l’Ecce Homo. Le père Stanislao Loffreda (1985) nous fait remarquer que : “Le vallum qui protégeait le flanc septentrional de la Tour Antonia correspond, même si ce n’est que partiellement, au tracé de la route actuelle entre le couvent de la Flagellation au nord et l’école musulmane au sud.”
b) La phase hérodienne
(Ier siècle av. J.-C.) avec la forteresse Antonia, dont témoignent certains éléments architectoniques présents au Terra Sancta Museum, mais sortis de leur contexte. Le musée contient aussi de nombreux éléments se rapportant à la première révolte juive de 66-70 ap. J.-C.
c) La phase romaine (IIe siècle ap. J.-C.) avec la construction de la route et de la place donnant accès à une arche d’entrée dans la ville, devenue par la suite arc de triomphe lors de la venue de l’empereur Adrien.
Les phases suivantes, qui s’étendent de l’époque romaine à l’époque médiévale (XIIe-XIIIe siècles), sont attestées par des fragments de chaussée, des marches, des vasques et des murets visibles dans la pierre nue, qui peuvent remonter à la période byzantine tardive.
Enfin, les deux espaces église-chapelle (lettres A-M-N) sont de l’époque médiévale (XIIe-XIIIe siècles) et rappellent, comme Lieux saints, les épisodes évangéliques de la condamnation de Jésus devant Pilate et de la flagellation qui la suivit. C’est au XIVe siècle précisément qu’est née ici la Via Dolorosa.
1. Vestiges romains du quartier de la Flagellation à Jérusalem, paru en 1958.
Dernière mise à jour: 27/05/2024 16:02