Au cœur de la guerre, la France augmente son aide aux écoles chrétiennes palestiniennes
Les ballons de basket volent dans la cour de récré. Marianne, mère d’un élève en classe de seconde au Collège des Frères de Bethléem, regarde les enfants s’ébattre. « La rentrée a été calme par rapport à l’année dernière, mais on attend la prochaine grève et les cours en ligne », glisse-t-elle dans un rire jaune qui cache mal son inquiétude : « Les écoles sont très touchées par la guerre, beaucoup de familles, à Bethléem, sont incapables de payer les frais de scolarité de leurs enfants. »
Dans la ville de la naissance du Christ, la majorité de la population vit des revenus du tourisme ou d’un emploi en Israël. L’arrêt des pèlerinages et la révocation des 148 000 permis de travail émis par l’État hébreu ont vu le chômage dépasser les 32 % à l’échelle des Territoires palestiniens au quatrième trimestre 2023, contre 12,9 % avant-guerre, selon un rapport de la Banque mondiale publié fin mai.
« L’essentiel c’est que les enfants reçoivent une éducation »
Les Palestiniens s’appauvrissent : « Près de 25% de nos familles n’ont pas pu payer les 2000 euros de la scolarité de leurs enfants », affirme frère Daoud Kassabry, directeur du Collège des Frères De La Salle de Bethléem. À l’école Terra Sancta pour les filles de Bethléem, ce taux monte à 70 %.
Impossible de mettre les élèves dehors, ni de forcer les familles à payer. « Certaines familles ont cinq ans de dettes… On s’adapte, l’essentiel c’est que les enfants reçoivent une éducation », souligne sœur Silouane, qui enseigne le français à l’école des Frères.
Lire aussi >> La France crée un fonds pour les écoles chrétiennes d’Orient
Après une année chaotique, marquée par l’instabilité éducative, et des trous de trésorerie, les écoles chrétiennes de Jérusalem-Est et des territoires palestiniens occupés qui enseignent le français ont pu bénéficier de l’aide du Fonds pour les écoles d’Orient, dont l’enveloppe a été élargie pour éponger ces difficultés financières.
Créé en 2020 par Emmanuel Macron, ce fonds soutient l’action éducative des 400 écoles chrétiennes francophones au Moyen-Orient (Liban, Irak, Egypte, Jordanie, Israël et territoires palestiniens) afin de « contribuer au rayonnement de la langue française et de la culture francophone au Moyen-Orient », selon le site du Ministère des Affaires étrangères. Établi en partenariat avec l’Œuvre d’Orient, qui assure la moitié des financements, le Fonds est géré par un comité d’orientation qui décide chaque année des allocations pour chaque établissement.
Protection des communautés chrétiennes
À Bethléem, le Collège des Frères a ainsi reçu une enveloppe de 34 000 euros pour l’année 2023-2024, soir 10 000 euros de plus que l’année précédente en vu d’aider les familles en difficultés. Au total, c’est près de 500 000 euros qui ont été versés à 20 écoles de Jérusalem-Est et des territoires palestiniens occupés, un montant là aussi en hausse.
« On s’est battu pour cette augmentation, elle était importante, se félicite Nicolas Kassianides, le Consul Général de France à Jérusalem, accueilli en grande pompe par les élèves du Collège des Frères de Bethléem, le 22 octobre dernier. Ce soutien est comme une ligne de vie, et il s’inscrit dans l’histoire française de protection des communautés chrétiennes en Terre sainte. »
Lire aussi (2022) >> La France double son soutien aux écoles chrétiennes d’Orient
Le diplomate poursuit : « Les écoles chrétiennes sont ouvertes à toutes les confessions et l’esprit de leur travail correspond à nos valeurs, d’où l’importance d’être présents à leurs côtés en leur assurant notre soutien surtout en cette période de guerre particulièrement difficile pour les Palestiniens ».
Même avec cet apport, les besoins restent importants, indique sœur Silouane : « Ça va permettre de couvrir une partie du budget, mais pas tout. »