Lorsque l’on se connecte au site de l’aéroport international Ben Gourion, une fenêtre s’affiche qui annonce avec assurance : « Chers passagers, veuillez noter que l’aéroport Ben Gourion fonctionne comme prévu, y compris les départs et les atterrissages. Pour plus d’informations, cliquez ici. »
On aura beau cliquer, aucune information n’est disponible. C’est que la réalité est moins catégorique. Le traffic d’avions a en effet diminué de 38% sur les neuf premiers mois de 2024 par rapport à 2023, selon un rapport mensuel de l’Aéroport Ben Gurion, ce qui correspond à une baisse de 42% du nombre de passagers.
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Seul point d’entrée international en Israël, l’aéroport habitué à un flux quotidien de 300 à 350 vols avant le début du conflit, venant d’Europe, d’Asie et des États-Unis, n’accueille quasiment plus aucune des grandes compagnies internationales laissant de facto EL AL, la compagnie nationale israélienne, et sa filiale low-cost Arkia, comme principaux transporteurs encore actifs.
C’est une des conséquences de la guerre en cours, alors que les alertes au missile rythment le quotidien israélien. Le 24 octobre dernier, le site israélien en hébreu Walla estimait que depuis le 7 octobre 2023, 33736 alertes avaient été émises en Israël. Les alertes concernent les tirs de roquettes et de missiles, les drones, les missiles balistiques, l’infiltration de terroristes, etc.
⇓ Animation – Un an d’alertes en Israël ⇓
365 days, 26093 alerts. pic.twitter.com/ItlNCyf1T3
— Rocket Alert (@rocketalertlive) October 13, 2024
Bien que le district de Tel Aviv voisin de l’aéroport, et le district Centre Israël où est situé l’aéroport ne soient pas les plus souvent visés, l’entrée en jeu des Houthis et de l’Iran ont rebattu les cartes spécialement depuis le mois de septembre dernier, forçant la majorité des compagnies aériennes internationales à suspendre leurs vols vers Tel Aviv pour des raisons de sécurité.
En dépit des batteries de missiles anti-missiles déployées autour de l’aéroport, les compagnies internationales — dont Air France, KLM, British Airways, Lufthansa, et Emirates ont suspendu leurs vols au moins jusqu’au 25 novembre, à moins que la situation sécuritaire ne se stabilise.
L’EASA (Agence européenne de la sécurité aérienne) a émis une recommandation générale d’éviter les vols vers Israël jusqu’au 30 novembre. La rareté des vols pénalise lourdement le secteur touristique israélien, empêchant l’accès de nombreux pèlerins et touristes aux sites israéliens et palestiniens, et provoquant des pertes de revenus importantes. Les entreprises locales subissent également cet isolement, certaines étant contraintes de délocaliser temporairement des services à l’étranger pour pallier les difficultés logistiques dues à l’interruption des vols commerciaux.
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Quelques micro-compagnies généralement locales ou opérant des vols charters, maintiennent encore des liaisons sporadiques vers Tel Aviv. Soumises à des contraintes financières et diplomatiques moindres, elles continuent en ajustant souvent leurs horaires pour limiter les risques.
Des compagnies américaines et asiatiques aussi maintiennent leurs vols pour Tel Aviv ne dépendant pas des mêmes règlementations que les compagnies européennes. Cependant, ces compagnies réduisent progressivement leurs opérations, souvent en raison de contraintes financières accrues et de risques sécuritaires pressants, ce qui accentue l’isolement d’Israël et la dépendance envers EL AL pour les déplacements internationaux. L’économie locale souffre des répercussions de cette raréfaction des vols, en particulier les secteurs hôteliers, de la restauration, et les services liés aux pèlerinages, qui ne pourront espérer un rebond qu’en cas de reprise des vols internationaux dans des conditions sécurisées.
L’avantage sécuritaire d’EL AL
En revanche, la compagnie EL AL peut se frotter les mains. En août dernier, le transporteur annonçait enregistrer un bénéfice de 147 millions de dollars, en hausse de 150% par rapport à la même période en 2023.
C’est qu’EL AL détient un avantage particulier pour assurer ses trajets en période de tension. Elle est la seule compagnie commerciale au monde équipant ses vols de systèmes anti-missiles dernier cri développés par l’industrie de l’armement israélienne. Une technologie habituellement réservée aux avions présidentiels. Cette singularité technologique, combinée à des protocoles de sécurité rigoureux, permet à El Al et Arkia de maintenir leurs liaisons malgré un contexte hostile.
La compagnie est toutefois dans le collimateur des usagers qui l’accuse – à raison – de pratiquer des hausses de prix inadmissibles et injustifiées en pleine guerre.
Les autorités israéliennes s’efforcent de rassurer les compagnies et les voyageurs sur la sécurité de l’espace aérien national. Toutefois, un tir en provenance du Liban a frôlé l’aéroport le 6 novembre, témoignant des risques qui pèsent sur les itinéraires aériens vers Israël.