Le Cardinal Pizzaballa célèbre Noël à Gaza : « Nous reconstruirons tout ! »
Le pape François avait vendu la mèche la veille en présentant ses vœux à la Curie romaine : « Ils (l’armée israélienne) l’ont (le cardinal Pizzaballa) empêché d’entrer hier dans Gaza malgré le permis qui lui avait été donné. »
“Yesterday they prevented the cardinal of Jerusalem from entering Gaza as they promised. Yesterday children were bombed this is cruelty not war.” Pope Francis pic.twitter.com/RR8AjSrBiA
— Khalil Sayegh خليل الصايغ (@KhalilJeries) December 22, 2024
Quiconque connaît le patriarche latin de Jérusalem, Pierbattista Pizzaballa, se doutait qu’il devait remuer ciel et terre pour aller, comme chaque année, célébrer Noël auprès de la communauté catholique de Gaza.
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En 2023, trois mois après les massacres du 7-octobre perpétrés par le Hamas, et tandis que la ville de Gaza-City, dans le nord de la bande de Gaza, où se trouvent les paroisses chrétiennes, était soumise à d’intenses bombardements, l’entrée du prélat avait été impossible. Il ne réussit à briser l’isolement de la communauté qu’en mai pour la fête de la Pentecôte.
C’est donc la seconde fois que l’évêque de cette petite communauté chrétienne se rend dans une ville de Gaza, ravagée par la guerre et soumise au plus intense et long blocus que la bande côtière n’ait jamais connu.
A 10h10 heure locale (9h10 à Paris) le service de communication du patriarcat latin répandait la nouvelle : « Ville de Gaza, 22 décembre 2024. Le cardinal Pizzaballa est entré dans la bande de Gaza ce matin et a atteint le complexe de la Sainte-Famille pour une visite de solidarité et la célébration de la Nativité du Seigneur. »
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Quelques minutes après, c’est le partage d’un lien YouTube qui permettait de suivre la messe en direct de la paroisse de la Sainte-Famille. Ornements blancs, le Nouveau-né de la crèche devant l’autel, texte de la messe du jour : c’était bel et bien déjà Noël à Gaza.
« Je veux vous dire combien je suis heureux de pouvoir une nouvelle fois être parmi vous tous », commençait le Cardinal en introduction à son homélie, expliquant vouloir leur présenter ses vœux mais aussi ceux de toute la communauté chrétienne de Terre Sainte.
« Vous êtes devenus une lumière pour notre Eglise » poursuivait-il. Un thème, celui de la lumière et du témoignage, autour duquel était centrée sa prédication (voir texte complet ci-dessous).
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Lumière et espoir : « Je ne sais pas quand et comment cette guerre va finir. À chaque fois que nous approchons de la conclusion (d’un accord), il faut tout recommencer encore. Mais elle finira, tôt ou tard. Nous ne devons pas perdre espoir. Quand la guerre sera finie, nous bâtirons et reconstruirons tout : nos écoles, nos hôpitaux, nos maisons. Mais nous devons tenir et rester forts. »
Une des conditions de cette force est de « ne pas laisser nos cœurs pollués par la haine ».
On ignore encore si une livraison a accompagné cette visite du Patriarche. Depuis l’été, quatre livraisons de nourriture ont été envoyées par le patriarcat latin de Jérusalem à Gaza, avec l’aide de l’Ordre de Malte et de son ONG Maltese International.
Il y a dix jours, le patriarcat dans un effort de transparence novateur, expliquant avoir utilisé la totalité des dons reçus après son appel à l’aide – 10 millions – pour Gaza et la Cisjordanie.
Sur place à Gaza, l’aide ne bénéficie pas aux seuls chrétiens, mais d’après les informations du patriarcat à « près de 40 000 personnes, soit 10 % de la population restant dans le nord de Gaza après le déplacement massif de près de deux millions d’habitants. »
Un nouvel appel à la solidarité pourrait être lancé prochainement par le Cardinal Pizzaballa. Une idée de cadeau pour les chrétiens de Gaza et de Cisjordanie.
Homélie du Patriarche latin de Jérusalem, Cardinal Pizzaballa prononcée à la paroisse de la Sainte-Famille à Gaza
[Texte traduit par TSM d’après ce qui est audible en ligne]
Tout d’abord je veux vous dire combien je suis heureux de pouvoir une nouvelle fois être parmi vous tous. Je suis venu vous présenter mes vœux mais pas seulement les miens, ceux aussi de tous les fidèles de notre Église.
Tout le monde m’a demandé de vous témoigner de leur affection, solidarité, prière, et de l’amour qu’ils ont pour vous tous. Tous auraient voulu pouvoir venir et vous apporter tout ce que nous pourrions apporter. Vous êtes devenus en quelque sorte la lumière de notre Eglise.
A Noël, nous célébrons la lumière et nous nous demandons où est la lumière ?… La lumière est aussi ici.
Tout d’abord, la vraie lumière c’est Jésus le Christ. Il est la source de notre lumière, si nous en rayonnons c’est seulement grâce à lui
Actuellement, ce que nous demandons à Jésus pour Noël c’est d’apporter cette lumière dont nous avons besoin. Nous vivons des temps difficiles, je n’ai pas besoin de vous expliquer ce que cela signifie. Précisément à ce moment nous devons regarder vers Jésus. Il n’y a que de lui que nous pouvons prendre la force pour vivre la situation actuelle.
Cette année, nous avons expérimenté que nous ne pouvons pas toujours faire confiance aux êtres humains. Combien de promesses ont failli. Combien de violences à cause de la haine entre tous les êtres humains.
Si nous voulons pouvoir garder espoir, nous devons nous enraciner dans l’espoir. Si vous êtes enracinés dans le Christ, vous êtes capables de vous regarder vous-mêmes d’une autre façon.
Je ne sais pas quand et comment cette guerre va finir. À chaque fois que nous nous approchons de la conclusion [d’un accord], nous devons recommencer encore… Mais elle finira. Tôt ou tard. Nous ne devons pas perdre espoir
Quand la guerre sera finie, nous bâtirons et reconstruirons tout : nos écoles, nos hôpitaux, nos maisons.
Nous devons tenir bon et rester forts. Je vous le répète, je l’ai déjà dit et je vous le redis à vous, nous ne vous abandonnerons jamais, nous ferons tout notre possible pour vous venir en aide.
Mais il y a un autre chose qui est importante : ne pas laisser la haine polluer nos cœurs. Si vous voulez être lumière, et nous sommes lumières, nous devons garder nos cœurs libres pour Jésus.
Cette année, il m’arrive de penser que notre foi – et je pense spécialement à vous – est mise à l’épreuve. Nous nous demandons : mais jusqu’à quand Jésus ?
Maintenant nous sommes ici pour dire que nous voulons que cela finisse bientôt mais aussi pour affirmer que nous restons avec toi Jésus. Et Jésus aujourd’hui nous dit : « Je suis Emmanuel, je suis Dieu avec vous. »
Alors nous devons rester forts dans notre foi, prier jusqu’à la fin de cette guerre et en même temps croire qu’avec lui rien ne peut nous submerger.
L’année dernière j’ai été témoin de beaucoup de violences mais aussi de beaucoup de miracles. Dans cette noirceur, dans cette destruction j’ai vu beaucoup d’entraide de la part des gens, de soutien, j’ai vu des gens recréer des relations, et ne pas se laisser submerger.
Ce que nous avons fait pour vous venir en aide, nous avons pu le faire parce que des gens à travers le monde nous aide. Tout le monde, et pas seulement le monde chrétien, est avec vous.
La guerre va finir et nous allons reconstruire
Encore une fois, nous vous aimons. N’ayez pas peur, n’ayez jamais peur, ne lâchez rien !
Ensemble, et nous devons restés unis, nous devons rester, ici à Gaza et dans notre Église et dans le monde entier, la lumière de Jésus.
Nous avons une mission. Vous n’avez pas seulement à recevoir vous avez aussi à donner. Tout le monde qui vous regarde devrait voir qui vous êtes, à qui vous appartenez. On appartient soit à la lumière soit aux ténèbres, on appartient à Jésus – et Jésus donne toujours la vie – ou à l’autre… Ils devraient voir combien nous sommes différents
Je me souviens, un d’entre vous qui est ici m’a dit une fois : « Nous chrétiens, n’avons de haine et de violence dans notre ADN. »
Nous voulons rester chrétiens, nous voulons témoigner de la lumière ici même.
Et quand tout le monde et tous les gens nous regardent, ils peuvent voir ici un autre monde
Merci pour tout ce que vous faites. Peut-être que vous ne le voyez pas vous-mêmes parce que vous avez des soucis quotidiens, mais tout le monde voit ce que vous faites. Et je dois dire qu’ils sont fiers de vous, pas parce que vous faites je ne sais quoi mais parce que vous restez qui vous êtes : des chrétiens qui consacrent leur vie entière à Jésus et qui regardent vers lui.
Tous les êtres humains sont frère et nos vies sont données pour la vie des autres.
Merci.
Que ce Noël nous apporte à tous la lumière dont nous avons besoin et encore une fois n’ayez pas peur ! Personne ne peut nous enlever la lumière qu’est Jésus. Et continuez à donner le beau témoignage de la foi chrétienne.
Bonne fête.