
Dans la ville de Gaza, de nouveau sous les bombes, la communauté chrétienne vit entre anxiété et prière, choquée par une reprise aussi violente de la guerre. Le père Romanelli, curé de la communauté catholique qui accueille des centaines de déplacés, lance un appel pour une véritable paix.
La pluie de bombes qui a recommencé à s’abattre sur Gaza dans la nuit du 17 au 18 mars a mis fin à deux mois de cessez-le-feu, durant lesquels la trêve instaurée le 19 janvier avait globalement tenu. Six zones de la bande de Gaza ont été touchées, y compris le centre de la ville de Gaza, où se trouve la seule église catholique du territoire, la paroisse de la Sainte-Famille.
Le curé, le père Gabriel Romanelli, un religieux argentin de la congrégation du Verbe incarné, raconte par téléphone comment la communauté a vécu avec stupeur la reprise de la guerre.
« La situation dans la bande de Gaza est très grave », explique-t-il. « Nous nous sommes réveillés au son des bombardements, et certaines bombes sont tombées près de nous, à quelques centaines de mètres, dans les quartiers situés entre l’église catholique et l’église orthodoxe. »

L’église Saint-Porphyre, plus au sud, et celle de la Sainte-Famille, plus au nord, sont distantes d’environ deux kilomètres à vol d’oiseau. Ce sont les seules églises chrétiennes de la bande de Gaza.
Les bombardements du 18 mars ont fait plus de 400 morts et plus de 500 blessés. Le 19 mars, 24 autres civils ont été tués, selon Al Jazeera, tandis que les frappes se poursuivent. Durant les deux mois de trêve fragile, des affrontements avaient néanmoins continué, causant la mort de 170 personnes.
« Ici, nous n’avons pas eu de victimes ni de blessés », poursuit le père Romanelli. « Aucun éclat d’obus n’est arrivé jusqu’à nous, mais le danger demeure. Des ordres d’évacuation ont été donnés pour plusieurs quartiers du nord et de l’est de la bande de Gaza. Pour l’instant, notre secteur n’est pas concerné. »
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Le Conseil œcuménique des Églises et Caritas Internationalis ont fermement condamné cette nouvelle escalade de violence, appelant toutes les parties en conflit, en particulier Israël, à respecter les droits des populations les plus vulnérables.
Le curé témoigne de l’angoisse qui saisit la communauté face à la reprise des hostilités. Les cours organisés par la paroisse ont été suspendus en raison des dangers liés aux déplacements.
« Nous continuons à assister nos réfugiés, qui sont environ cinq cents », ajoute-t-il. « Parmi eux, il y a de nombreuses personnes âgées, des malades et des enfants handicapés pris en charge par les sœurs de Mère Teresa. »
La majorité des réfugiés hébergés dans les locaux de la paroisse appartiennent à la communauté chrétienne, qu’ils soient catholiques ou orthodoxes.
Avec le soutien politique de Washington, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a décidé de reprendre les frappes aériennes. Cependant, les signes de la fragilité de la trêve étaient nombreux. L’armée israélienne ne s’était pas retirée du corridor de Philadelphie, le long de la frontière entre Gaza et l’Égypte. De son côté, le Hamas avait suspendu la libération des otages. Netanyahu a donc annoncé que « les négociations reprendront désormais sous les bombardements ».

Depuis deux semaines, Israël bloque les approvisionnements en nourriture, médicaments, carburant et électricité pour faire pression sur le Hamas. Le 2 mars, à la veille du mois de Ramadan, les points d’accès à la bande de Gaza ont été fermés. La coupure de l’approvisionnement en électricité a réduit le fonctionnement de l’usine de dessalement qui fournit de l’eau à des centaines de milliers de personnes, rendant l’accès à l’eau potable de plus en plus difficile. Alors que la majorité musulmane de Gaza vit son mois le plus spirituel de l’année, le site d’information israélien +972 titre : « Jeûner en mourant de faim », illustrant la situation critique des habitants de Gaza ces dernières semaines.
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Après la libération de 33 otages israéliens, échangés contre la libération de 2 000 détenus palestiniens, il reste encore 59 otages aux mains du Hamas et des groupes jihadistes. Selon les autorités israéliennes, la moitié d’entre eux pourraient ne plus être en vie. En Israël, les familles des otages perçoivent la reprise de la guerre comme un abandon politique de leurs proches et de leurs dépouilles. Pendant ce temps, la coalition gouvernementale de Netanyahu se recompose, avec l’annonce du retour de l’extrême droite d’Itamar Ben-Gvir au sein de l’exécutif.
Unis dans la foi, les chrétiens de Gaza se tournent vers la prière. Le père Romanelli appelle à prier intensément pour la paix :
« Que le Seigneur nous accorde un pas nouveau, non seulement un cessez-le-feu, mais la fin de cette guerre et le début d’une période de paix pour toute la Terre Sainte, en Palestine comme en Israël. »
Les journées de la communauté sont rythmées par la prière : l’adoration eucharistique, le rosaire, les laudes, la messe, la prière du soir avec les jeunes.
« Avec eux, nous essayons de poursuivre autant que possible nos activités, bien que l’urgence actuelle ait conduit à leur suspension. Nous espérons un accord durable », conclut-il, « pour le bien de Gaza et de toute la population. »