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Les chefs des Églises exposent    leurs difficultés aux diplomates

Par le Conseil des chefs des Églises de Jérusalem
14 mars 2025
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Lors de la réunion, qui s’est tenue au patriarcat grec-orthodoxe et conduite par Théophilos III, assis sur la photo, chacun a pu illustrer les défis qui sont les siens. Ici, le custode de Terre Sainte le frère Francesco Patton. ©Patriarcat grec-orthodoxe de Jérusalem

Courant février, les chefs des Églises ont présenté, lors de leur rencontre annuelle avec les Consuls généraux et chefs de missions accrédités à Jérusalem et auprès de l’Autorité palestinienne, les principaux problèmes auxquels fait face la communauté chrétienne.
Nous avons traduit le document distribué aux diplomates et qui a fait l’objet d’une publication en ligne. La seule chose que nous ayons soustraite sont les recommandations qui s’adressaient aux diplomates.


Impact de la guerre sur les chrétiens à Gaza, en Cisjordanie et à Jérusalem

La communauté chrétienne en Terre Sainte continue de subir des difficultés, gravement exacerbées par la guerre. Le complexe de l’église orthodoxe grecque de Saint-Porphyre a de nouveau été endommagé par un missile israélien en août 2024. Le complexe de la paroisse catholique de la Sainte-Famille a subi des dommages, et l’école attenante a été endommagée lors d’un raid aérien en août. Le complexe a été pris pour cible par des tirs, entraînant la mort de civils réfugiés. L’hôpital [anglican] Al Ahli a poursuivi ses traitements, mais des inquiétudes persistent quant à la sécurité de son personnel et à sa capacité d’être approvisionné de manière plus complète et régulière. Ces incidents suscitent des inquiétudes quant à la préservation des sites historiques et spirituels, ainsi qu’au ciblage de civils innocents. Partout en Cisjordanie et à Jérusalem, la situation économique continue de se détériorer en raison du manque de pèlerins, de la rareté des emplois et de l’instabilité sécuritaire, conduisant à une augmentation de l’émigration parmi les chrétiens locaux.

Crimes haineux et liberté de culte

La possibilité de pratiquer leur culte librement et en toute sécurité demeure précaire pour les chrétiens. Ils font face à un nombre élevé de crimes haineux et à des restrictions qui violent la liberté de culte. À Pâques, les autorités israéliennes ont de nouveau empêché les chrétiens d’accéder au Saint-Sépulcre pour la cérémonie du Feu Sacré, l’un des jours les plus saints du christianisme orthodoxe, en barricadant la Vieille ville afin d’empêcher le pèlerinage vers l’église. Cela est perçu comme une violation de l’article 18 de la Déclaration universelle des droits de l’homme. De plus, les chrétiens en Cisjordanie n’ont pas reçu de permis pour participer aux célébrations de Pâques à Jérusalem. Au-delà des problèmes d’accès, les crimes haineux persistent. Nos observations ont révélé plus de 90 incidents spécifiques et uniques – selon une estimation prudente – contre les chrétiens en 2024, allant de radicaux crachant sur des nonnes et des prêtres dans la Vieille ville, à des agressions verbales et physiques contre des prêtres, en passant par le lancement de gaz poivré sur des convives dans un restaurant chrétien arménien. Il est préoccupant que les auteurs de ces incidents haineux soient rarement tenus responsables de leurs actes.

Jardin des Vaches [Parking arménien]

Le caractère chrétien de la Vieille ville reste menacé. Le patriarcat arménien ainsi que la communauté de Jérusalem se battent pour annuler le bail du Jardin des Vaches par le biais d’actions en justice engagées dans le district de Jérusalem en octobre 2023 et en février 2024. La communauté a maintenu et continue d’exercer une présence sur le terrain face aux radicaux israéliens. Utilisant une partie des décombres créés par un bulldozer sur le site, des militants arméniens ont érigé une barrière sur une partie du terrain et installé un abri de fortune pour passer la nuit, assurant ainsi une surveillance constante.

Arnona [Taxe municipale]

La situation actuelle concernant l’imposition d’une taxe municipale, également connue sous le nom d’Arnona, sur les sites de la Terre Sainte demeure une préoccupation majeure et un fardeau financier pour les Églises, en violation du Statu quo séculaire. Les municipalités ont menacé d’imposer des amendes, d’engager des poursuites judiciaires et de percevoir des taxes injustes sur les églises, dont les finances ont été fortement affectées par la guerre. Les questions relatives à l’Arnona et la recherche d’une solution globale ont été soulevées auprès du Premier ministre Netanyahou par des dirigeants d’Églises dans une correspondance écrite datée de juin 2024, sans qu’aucune réponse ne soit apportée, ainsi qu’au maire de Jérusalem, qui n’a pas encore abordé le problème ni proposé de résolution.

Écoles

Les écoles chrétiennes de Jérusalem-Est subissent une pression croissante de la part des autorités israéliennes, notamment par des réductions de financement, des plafonnements des frais de scolarité et des pressions pour adopter le programme israélien. Des fouilles intrusives dans les sacs à dos des enfants et sur les bureaux des enseignants, ainsi que la révocation des subventions en cas de non-respect, perturbent l’éducation et menacent la viabilité financière de ces établissements. Cela aggrave le traitement différencié dont elles font déjà l’objet par rapport aux autres écoles de Jérusalem.

Mont des Oliviers et téléphérique

Des projets visant à étendre le parc national des Murailles de Jérusalem sont actuellement à l’étude pour le 30 juin 2025. Cette proposition continue de menacer la présence des chrétiens à Jérusalem. Cette initiative, fruit d’un effort conjoint du groupe radical israélien Elad et de l’Autorité des parcs nationaux d’Israël, viserait à encercler diverses propriétés ecclésiastiques situées sur le mont des Oliviers, y compris le jardin de Gethsémani, coupant ainsi l’accès et limitant la circulation du clergé et des fidèles. Cette démarche s’inscrit dans une tendance observée ces dernières années, avec des actions similaires à la porte de Jaffa, sur le mont Sion et dans d’autres zones, y compris le projet de téléphérique qui empiéterait davantage sur les propriétés de l’Église et compromettrait la sacralité des sites et des chemins de pèlerinage.

Solution

Pour garantir le caractère multireligieux de la Vieille ville, les Églises réitèrent leur appel à la protection des quartiers chrétiens et au maintien du Statu quo. Le soutien de l’agence principale des Nations Unies pour le développement à l’hôpital Al-Ahli est salué, mais une aide plus conséquente doit être accordée aux Églises afin de soutenir les efforts de reconstruction à Gaza et dans les communautés de Cisjordanie et de Jérusalem. Les Églises jouent un rôle clé dans la création d’une paix durable pour les Israéliens et les Palestiniens, contribuant à façonner un avenir dans lequel chacun peut prospérer. Il est fortement recommandé aux organismes externes et aux gouvernements de soutenir de toute urgence les institutions ecclésiastiques et la présence chrétienne par un appui économique et une pression diplomatique sur les questions évoquées ci-dessus.

Dernière mise à jour: 15/03/2025 00:24